90
Collection Alfred de Vigny
RTCURIAL
15 novembre 2016 14h30. Paris
92
Hector BERLIOZ
1803-1869
Réunion d’un billet et d’une lettre
autographes signés à Alfred de Vigny
[Paris, début décembre 1839 et juin 1844
(?)]. Ens. 2 p. in-12 et in-8
(13,1 x 10,3 et 21,5 x 13,5 cm).
Le billet amical, daté vraisemblablement
de début décembre 1839, fait référence
à la quatrième partie de
Roméo et
Juliette
, le célèbre scherzo intitulé
«La Reine Mab, ou la Fée des songes» :
«Bonjour ! On m’a dit que vous étiez
rétabli et je tiens à vous avoir
Dimanche. La Reine Mab m’a confié
qu’elle avait une passion pour vous…».
Les premières auditions de la grande
symphonie dramatique d’Hector Berlioz
furent données à la fin de l’année 1839.
Dans la lettre jointe, le compositeur
propose à Vigny de le revoir alors qu’ils
ne se sont pas rencontrés depuis «deux
ans et trois mois», chez Marie d’Agoult.
Provenance :
Archives Sangnier (cachet sur le billet)
Bibliographie :
Alfred de Vigny,
Correspondance
, 39-
130 ;44-86.
1 800 - 2 000 €
93
Marie d’AGOULT
1805-1876
Réunion de quatre-vingt-cinq lettres
et billets autographes signés
à Alfred de Vigny
[Paris, Neuilly-sur-Seine, Monnaie, etc. ],
28 décembre [1839]-vers 1849-1850. Ens.
environ 162 p. petit in-12, in-12 et in-8
(dimensions diverses), suscriptions et
15 enveloppes.
Exceptionnelle correspondance de Marie
d’Agoult à Alfred de Vigny, conservée,
à quelques lacunes près, dans son
intégralité. Alfred de Vigny avait
rencontré Marie de Flavigny vers 1823-
1824, avant son mariage avec le comte
d’Agoult. Il s’en était épris mais
cette intrigue amoureuse tourna court,
soit parce que la position sociale de
la jeune fille et de sa famille n’était
pas suffisante, soit parce que, comme
le suggère Jean-Pierre Lassalle, Marie
n’était tout simplement pas tombée sous
le charme d’Alfred. On sait que moins de
dix ans après son mariage, Marie d’Agoult
abandonna sa famille pour suivre Franz
Liszt à Genève et qu’elle se sépara de
lui en 1839, après avoir eu trois enfants
du compositeur. De retour à Paris,
elle ouvrit son salon aux artistes et
hommes de lettres, et écrivit elle-même
sous le pseudonyme de Daniel Stern, le
même pseudonyme avec lequel elle signe
certaines lettres ou s’y désigne parfois
de manière déguisée. L’amitié entre
Alfred de Vigny et Marie d’Agoult fut
fidèle et leur complicité manifeste,
comme le montre cette abondante
correspondance, particulièrement fournie
dans les années qui suivent le retour à
Paris de l’ancienne maîtresse de Liszt.
Si dans de nombreux billets, qui ne sont
pourtant que de courtes invitations à
lui rendre visite, Marie d’Agoult sait
se montrer spirituelle, elle exprime à
merveille ses souffrances, ses tourments,
sa sensibilité exacerbée et ses idées,
dans plusieurs longues lettres, parfois
teintées d’humour : «Vous souvenez-vous
encore de moi, Monsieur ? Quelques-uns
me disent que oui. Combien il serait
aimable de me le prouver en me permettant
de vous garder une place dans un cordial
souper où quelques amis viennent porter
un toast à l’année 1840 !» (28 décembre
[1839] ; Marie d’Agoult, ayant quitté
Franz Liszt, était depuis peu de retour
à Paris) ; «Vous n’aviez certainement
pas fait dix pas dans la rue, hier, que
j’avais déjà envie de vous écrire. Je
craignais de ne vous avoir pas convaincu.
Toute femme ment en pareille matière.
Comment vous persuader que je dis vrai ?
[…] Le monde dit que je suis brouillée
avec L. [Liszt] Ne le croyez pas. Je ne
le suis pas ; je ne le serai jamais. Je ne
veux plus entendre parler d’amour. Ce mot
m’épouvante. » ([1er février 1842]) ; «Je
lis, je relis, je suis charmée, ravie !
Je suis fière plus que je ne devrais de
vous avoir pour ami, car enfin qu’est-
ce que cela prouve pour moi ? Les plus
grands poètes, parce qu’ils parent tout
ce qu’ils approchent, ont précisément
le droit d’aimer ce qu’il y a de moins
digne. Par où commencer ? Il se fait
dans ma tête une confusion dithyrambique
que je voudrais vous épargner ! D’abord
c’est d’une originalité charmante. La
Maison du berger au milieu de la vaste
bruyère et la femme souple, indolente,
penchée, délicate qui s’y abrite ! Quel
tableau délicieux ! Puis vous avez trouvé
la poésie du chemin de fer, taureau
“qui fume, beugle”, ce rude aveugle
(superbe !) qui porte en son sein les
orages ! On ne dira pas que vous êtes le
poète du passé, vous qui découvrez la
poésie de l’industrie et des machines
et du charbon, etc. […] Laissez-moi
à mon enthousiasme et à mes bonds de
gazelle. Je suis trop contente pour avoir
le sens commun et vous bien expliquer
pourquoi je vous admire tant !» ([vers
le 20-25 juillet 1844]) ; «Un secret !
Je suis très près de vous dans le plus
grand incognito, même et surtout pour
ma famille. […] Demandez le pavillon
d’Arménonville au bois de Boulogne près
la porte Maillot et là la Csse Stern.
[…] Tout cela vous semble impossible.
Rien n’est plus simple pourtant.
C’est une solitude fantastique que je
suis venu choisir à l’endroit le plus
fréquenté de Paris…» (16 août [1844]) ;
«À propos de postérité, je vous prie de
signer vos billets. Je tiens bureau de
vos autographes pour l’Allemagne ; et
prévoyant les adversités d’une nouvelle
révolution, je suis bien aise de me
mettre en mesure d’en pouvoir vendre à
bon prix. Il faut penser à tout. » (23
août [1844]) ; «J’apprends, par hasard,
au fond de mes solitudes, que vous
êtes à Paris. Comment n’êtes-vous pas
venu m’annoncer cette Bonne Nouvelle ?
Serions-nous brouillés ? J’interroge ma
conscience ; elle ne m’accuse d’aucun
tort. Soyez le confesseur qui m’aide à
discerner mes péchés et surtout faites,
en venant dans ma demeure, que je vous
dise : Non sum dignus. Daniel» (8 janvier
1853).
[On joint :]
Alfred de VIGNY. 1797-1863. Réunion de
7 brouillons et minutes autographes de
lettres à Marie d’Agoult. [Paris, 30
décembre 1839-30 juillet 1844]. Ens. 24
p. in-8. «Adieu la plus aimable Marie du
monde, vos lettres me sont chères et le
soir si vous ne dormez pas, ma chère sœur,
contez-moi un de ces beaux contes que vous
contez si bien, etc. , etc. Par exemple
votre amitié pour moi. Est-ce un conte ?»
(30 juillet 1844). Les lettres d’Alfred
de Vigny à Marie d’Agoult, passées à sa
fille Blandine Liszt puis à la famille
Ollivier, sont aujourd’hui conservées à
la Bibliothèque nationale de France.
Quelques manques, déchirures et pliures
marginales, certains atteignant
légèrement le texte. Quelques
brunissures et trous d’épingles.
Provenance :
Archives Sangnier (cachets)
Bibliographie :
Alfred de Vigny,
Correspondance
, 39-137,
138 (M) ; 40-1, 6, 7 (M), 11, 18, 152,
161 ; 41-6, 11, 12, 14, 17, 39, 52, 54,
66, 83, 235 ; 42-24, 27, 166 ; 43-3, 7,
8, 11, 22, 24, 34, 37, 38 (M), 40, 43,
46, 52, 71, 74, 89, 113, 122, 127, 141,
149 M, 157, 216, 223 ; 44-15, 48, 55, 56
(M), 64, 65, 67, 77, 80, 83 (M), 88, 89,
95, 102 (M), 113, 119, 122, 133, 135,
153, 154, 161, 162, 163, 166, 168 ; 45-
13, 74, 85, 90 ; 46-47, 76, 82, 83, 129,
139, 140, 151 ; 47-20, 23, 34, 39, 167 ;
48-94, 109.
10 000 - 15 000 €




