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“
L
a
F
rance
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est
le
pays de
l
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union dans
la diversité
”
231
[Louis ARAGON].
Parlons français
.
Sans lieu ni date
[décembre 1944].
Manuscrit autographe signé “François la Colère”, ¾ page in-folio.
Virulent éditorial du quotidien
C
e
S
oir
du 15 décembre 1944 : le manuscrit autographe est signé du
pseudonyme de Louis Aragon durant la Résistance,
F
rançois
la
C
olère
.
Le journal fondé en mars 1937 au moment de la guerre d’Espagne, dirigé par Aragon et Jean-Richard Bloch,
avait été interdit en août 1939 comme quotidien communiste ; il n’avait commencé de reparaître qu’en août
1944 et Louis Aragon y publiait des éditoriaux intitulés “Parlons français” signés de son pseudonyme de
Résistance. Il devait s’en éloigner peu après, en janvier 1945.
Aragon dresse ici la liste des “grandes maladies qui favorisaient le règne de l’ennemi parce qu’elles étaient la
division” : l’antisémitisme, l’anticléricalisme, l’antimilitarisme, l’anticommunisme enfin.
L’antisémitisme. Il en existait sans doute une graine française : mais quand l’ennemi souffla dessus, il en sortit
une plante monstrueuse, allemande. Devant ces hécatombes d’innocents, ces wagons plombés où hommes et
femmes périssaient dans la chaux, devant l’étoile jaune de Bergson et le cadavre de Max Jacob à Drancy,
Victor Basch et sa femme de 80 ans abattus par les miliciens, l’antisémitisme à tout Français s’interdit.
L’anticléricalisme. Et certes, s’il y avait à l’antisémitisme l’excuse de certains juifs, certains prélats, comme
hier encore ce Baudrillart, qui couvrit de sa pourpre l’enrôlement des Français sous l’uniforme allemand, ont
favorisé cet anticléricalisme. Mais comment oublier l’immense cohorte chrétienne qui a donné son sang sans
compter, ces prêtres qui ont pris le fusil du partisan, ces curés qui cachaient des enfants juifs, ravitaillaient
les réfectoires ?
[…].




