111. BRETON (André). [
Lettre à Ecusette de Noireuil
(
L'Amour fou
)]. Manuscrit autographe, Sans date [1936],
2 pages 1/2 in-4, sous chemise demi-maroquin noir.
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€
P
RÉCIEUX MANUSCRIT DU CÉLÈBRE CHAPITRE
VII
ET DERNIER DE
L'A
MOUR FOU
.
Il s’agit de l’admirable “ Lettre à Ecusette de Noireuil ”, destinée à Aube Breton, la fille du poète et de Jacqueline Lamba,
née le 20 décembre 1935. Texte très lyrique, mais aussi fort émouvant par son côté intime, et qui clôt
L’Amour fou
par un
message d’amour et d’espoir. Cette lettre, que sa destinatrice devra lire en 1952, lorsqu’elle aura seize ans, témoigne de
toute l’affection de Breton pour sa fille, en même temps qu’il constitue une vibrante déclaration de principes, nous
conduisant au cœur même du Surréalisme et de la pensée de Breton.
Toujours et longtemps, les deux grands mots ennemis qui s’affrontent dès qu’il est question de l’amour n’ont jamais
échangé de plus aveuglants coups d’épée qu’aujourd’hui au-dessus de moi, dans un ciel tout entier comme vos yeux. De
ces mots, celui qui porte mes couleurs, même si son étoile faiblit à cette heure, même s’il doit perdre, c’est
TOUJOURS
.
Toujours, comme dans les serments qu’exigent les jeunes filles. Toujours, comme sur le sable blanc du temps.
(…)
Envers et contre tout j’aurai maintenu que ce toujours est la grande clé. Ce que j’ai aimé, que je l’aie gardé ou non,
je l’aimerai toujours.
Il revient ensuite sur la notion de
point sublime
(empruntée au
Second manifeste du Surréalisme
) :
J’avais choisi d’être ce guide, je m’étais astreint en conséquence à ne pas démériter de la puissance qui, dans la direction
de l’amour éternel, m’avait fait voir et accordé le privilège encore plus rare de faire voir. Je n’en ai jamais démérité, je
n’ai jamais cessé de ne faire qu’un de la chair de l’être que j’aime et de la neige des cimes au soleil levant…
Il affirme
longuement que sa naissance l’a réconcilié avec la vie et que c’est précisément pour rester avec elle qu’il n’a pas pu,
comme il l’aurait voulu, aller s’engager pour combattre aux côtés des républicains espagnols.
Le texte du manuscrit (qui comporte quelques ratures et corrections) est conforme à celui de l'édition, à l’exception de
légères variantes et de la fin : deux phrases seront supprimées :
Voilà pour l’amour fou à l’état second. / Je voudrais en
revenir à cette histoire qui est la vôtre. La queue de l’Ondine commençait par une sorte de parabole.
On constate par
ailleurs que, avant la fameuse phrase finale, Breton avait, à l’origine, prévu une photographie, en précisant :
ici un cliché.
Ce manuscrit est resté inconnu de l'éditeur des
Œuvres complètes,
Marguerite Bonnet, qui précise n'avoir retrouvé que le
manuscrit du chapitre VI du livre (voir
O. C.,
Pléiade, t. II, p. 778-785 et p. 1705).
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