ADER. Paris. Femmes de lettres et manuscrits autographes - page 337

333
l’aime, mais sans doute elle fuirait encore dans un joli sourire,
dans un regard un peu moqueur, et cela finirait par une de ces
boutades célèbres où ton esprit semble si joliment d’ailleurs,
faire ses griffes sur l’âme d’autrui... C’est aussi parce que tu es
moralement la créature la plus pudique que l’on puisse rêver – je
ne l’ai jamais si bien discerné qu’aux répétitions du petit faune,
quand je te voyais en caleçon de bain, à demi-nue, éclaboussant
la scène de tes drôleries – et c’est pourquoi, sans rire, je garde
l’éternel désir de
te connaître
! ». Elle voudrait la voir, ainsi que
W
ILLY
, et lui redit son admiration pour ce livre « qui nous donne
avec tant de simplicité un si bel exemple d’amoureuse : une
femme qui aime noblement et qui sait souffrir dignement ! »
Elle ajoute en post-scriptum qu’elle est à Paris, « car ma chère
Abbaye où j’irai bientôt pour toujours ne sera possible que dans
un mois », et qu’elle envoie son livre à Maurice [M
AETERLINCK
]
qui est à Grasse.
Vente 24 novembre 1999
(n° 154).
611.
Blanche SELVA
(1884-1942) pianiste et pédagogue.
Lettre autographe signée « Blanche Selva », La Forest près Valence (Drôme) 29 septembre 1908, [à Albert R
OUSSEL
] ;
4 pages in-8.
300/400
L
ONGUE
ET
BELLE
LETTRE
SUR
SON
TRAVAIL
AVEC
V
INCENT
D
’I
NDY
,
ET
LES
COMPOSITIONS
DE
R
OUSSEL
.
La voici de retour des Faugs : « J’ai travaillé avec le Maître [d’I
NDY
] toutes les
Sonates de B
EETHOVEN
; vous savez que jusqu’ici le Maître ne m’avait pas jugée
assez mûre pour me permettre de faire à Paris toute une série de concerts
Beethoven ; il m’avait dit, il y a 3 ans, que je les jouais aussi bien que tout le
monde mais qu’il voulait, quand je lancerai cela, que ça soit tout à fait épatant.
Il m’avait donc défendu de jouer Beethoven jusqu’à ce que j’aie 27 ans ! Or,
j’ai énormément travaillé ces vacances, et lui ai apporté, comme butin, le
travail de ces terribles Sonates que j’adore en tremblant »... Maintenant le
Maître lui ordonne de faire des concerts Beethoven cet hiver à Paris, ce qui lui
procure une joie profonde, et des craintes qu’elle confie à Roussel. Elle tâchera
d’être le fidèle reflet de la géniale interprétation du Maître... Puis elle ajoute :
« J’ai vu avec le Maître, aux Faugs, une nouvelle
Sonate
pour piano et violon,
d’un jeune compositeur nommé Albert R
OUSSEL
. Le connaissez-vous ? C’est
un jeune qui paraît appelé au plus bel avenir et sur lequel le Maître fonde
de grandes espérances. Je connaissais de lui jusqu’ici un
Trio
(un peu inégal,
mais dont certains coins sont déjà tout à fait bien venus et témoignent chez
leur auteur, d’un fond de
musique
bien rare à notre époque). J’ai vu paraître
ensuite 3 pièces de piano, jolies, mais que j’aime moins tout de même que
le Trio, car elles sont un peu influencées par l’école Debussel-Ravy, puis
toute une symphonie sur les Saisons, qui me plaît beaucoup. J’ai aussi vu
quelques mélodies charmantes et même une belle, ainsi qu’un prélude pour
Résurrection
. La Sonate que je viens de voir chez le Maître est de beaucoup
l’œuvre la plus complète de Roussel, et je dois avouer que j’ai passé à sa
lecture une matinée exquise. Quelle joie de voir une œuvre (ce n’est plus un tâtillonnement, c’est une
ŒUVRE
) pleine de musique,
de cœur, de pensée : solidement charpentée, au rythme franc et plein de vie, une œuvre saine et noble, qui gagne à être vue dans
les coins et qui pourtant se présente dès l’abord avec clarté et émotion. Cela nous change des ébauches d’impuissants des Ravel et
C
ie
»... Elle fera avec T
OUCHE
une séance de sonates pour piano et violon de Magnard, d’Indy et Roussel ; par ailleurs elle jouera sa
sonate à la Nationale, à la Libre Esthétique, partout où elle pourrra. « Les œuvres vraiment belles sont rares et quand on en tient
une on ne lâche pas prise facilement »...
Librairie Les Autographes, 2006
.
612.
Mary GARDEN
(1874-1967) soprano écossaise, créatrice de la Mélisande de Debussy.
10 lettres ou cartes autographes signées « Mary Garden », [1908 et s.d.], à divers correspondants ; 19 pages formats
divers dont 3 cartes de visite (traces d’onglets ; 3 photos jointes).
250/300
[
1908
], à Édouard de R
OUGEMONT
: elle a lu ses
Souvenances et Nostalgies
« avec grande joie. Quel charme infini vous avez mis
dans ce petit livre »... – Remerciements à un jeune auteur pour l’envoi de « la
Révélatrice
que j’ai lu avec plaisir. Je trouve que c’est
un beau début littéraire »... – « Mon cachet pour les salons est de
2000 francs
et je chanterai le 28 mai, si l’Opéra ne m’affiche
pas – et ça c’est peu probable »... – « Tous mes regrets mais je ne pourrais promettre de chanter pour vous en ce moment »... – Elle
part pour Londres, où elle est attendue… Demandes de places ; réponse à un rendez-vous ; regrets de ne pouvoir venir à un dîner,
prise par le théâtre ; etc.
1...,327,328,329,330,331,332,333,334,335,336 338,339,340,341,342,343,344,345,346,347,...444
Powered by FlippingBook