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de
vrais
ennemis, je n’en veux pas laisser de
faux
. Je veux dire que mes violences contre vous ont été à la mesure de ma déception
à l’égard d’un jeune frère que j’admirais – et que j’aimais. Je me rends compte aujourd’hui de cette folie d’exiger des êtres qu’ils
soient tels que nous le voulons »... –
14 mai 1957
. « Vous voulez pardonner – vous ne voulez pas être pardonné. Je n’entrerai pas
dans ce débat – puisque je ne veux plus en avoir avec vous. Le coup affreux que nous a porté telle page du
Solstice
, ou ces pages
de la
n.r.f.
(“mon Dieu voulez-vous jouer avec moâ”) était à la mesure, croyez-moi, de notre affection et de notre admiration »...
Mauriac n’a jamais attaqué personne que pour
défendre
quelqu’un, et il ne répond que par exception aux attaques personnelles.
« Pour
C
octeau
, ce fut une réaction “d’enfant de Dieu et de l’Église”, l’horreur du demi-blasphème, du double jeu. Il n’empêche
que j’ai été, ce jour-là, trop fort et trop loin. Vous oubliez aussi que dès le lendemain de la Libération, dès que j’ai vu et compris
ce qu’allait être l’épuration, je me suis battu – et presque seul – pour les confrères poursuivis.
B
éraud
dans son livre
40 jours avec
la mort
reconnaît que je lui ai sauvé la vie, si je n’ai pu sauver
B
rasillach
. Le
seul
article violent paru à la Libération où vous êtes
pris à partie, avait été écrit
pendant l’occupation
, en pleine bataille, et devait paraître aux Éditions de Minuit. Claude
M
organ
le
garda pour le premier numéro des
Lettres françaises
non clandestines. C’est
le seul
que j’aie écrit de ce ton. Si jamais vous avez en
main mes articles de 44-45 réunis sous ce titre
Le Bâillon dénoué
, vous constaterez que je n’ai cessé de batailler
pour les autres
. [...]
je vous écris tout ceci, non par vanterie, mais pour que vous m’accordiez les circonstances atténuantes, si vous pensez que je suis
coupable. [...] Je suis, que vous le vouliez ou non, réconcilié dans mon cœur avec vous »...
O
n
joint
2 L.A. (brouillons) de
M
ontherlant
à Mauriac, 28 juin 1932 et 2 juin 1933 (1 page in-8, et 1 page et demie in-4).
Reproduction page précédente
217.
Charles MAURRAS
(1868-1952). 4 L.A.S.,
Paris
1935-1936 et s.d., à l’éditeur Jean
V
ignaud
; 11 pages in-8, 2 à
en-tête
L’Action française
.
200/250
2 septembre 1935
. Condoléances pour « cette mort tragique de votre, de
notre
Brun [Louis
B
run
, assassiné par sa femme]. J’en ai
été profondément ému. La vie a des détours cruels. Dites à Bernard
G
rasset
que je pense beaucoup à la peine qu’il a dû avoir »...
2 septembre 1936
. Il a réuni bon nombre des volumes demandés, y compris les plus rares. « Vous aurez aussi des renseignements
précis
[...], j’aurai à vous communiquer quelques réflexions »...
Lundi matin
: « je reprendrai volontiers avec vous nos conversations
de l’été »...
Samedi
. Le quart d’heure de visite a passé « comme un songe ! Nous nous serons littéralement entrevus. Mais j’ai été
très heureux de vous voir, vivant, vibrant, débordant comme toujours de votre lumière et de votre amitié »...
218.
Robert de montesquiou
(1855-1921). L.A.S. « Robert de M. »,
Charnizay
11 décembre [1901 ?], à Sarah
B
ernhardt
; 4 pages in-8.
200/300
À
propos des
P
aons
.
Il eût aimé se retrouver chez elle, « dans la sécurité de l’amitié ancienne et renouvelée [...] Merci pour ce que
vous me dites de mon livre : vous l’avez parcouru, lisez-le, avant que
La Vie Parisienne
soit redevenue hostile à tout recueillement.
L’ordonnance, à elle seule, vaut, je crois, un salut, et, aussi, certaine tenue de caractère. Vous y rencontrerez, à côté d’étoffes plus
frivoles, et qui furent des robes de favorites avant d’être des ornements d’église, des trames réellement sacrées, et près des gemmes
qui furent aux colliers avant d’être aux calices, des jaspes où le sang d’un Dieu coule depuis toujours. Lisez
Angèle de Foligno
,
sans doute la meilleure pièce »... En post-scriptum, il évoque sa rencontre de Maurice et Simone au cirque Barnum, parmi des
« merveilles Elagabaliennes »...
219.
Robert de montesquiou
. L.A.S., à Gaston
C
almette
; 8 pages in-4.
300/400
L
ongue
mise
au
point
au
directeur
du
F
igaro
, à l’occasion d’un article. Les griefs de Calmette étant personnels, il aurait dû
les exprimer lui-même, mais ils font moins soupirer que sourire : il est difficile de « réagir contre les
petites intrigues
secrètes
qui visent un esprit aussi indépendant que le mien. Tout en étant cauteleuses, elles sont
audacieuses
»... Montesquiou n’en veut
pas à Calmette, mais trouve que l’« éminent protectorat » du directeur devrait planer au-dessus des menues querelles, et ainsi
éviter « un choix difficile, entre tant d’ostracismes qui, logiquement, devraient proscrire Hermant, au nom de M
me
Bulteau et de
M
me
de Noailles, Gyp, au nom de M
me
de Pierrebourg, etc. »... Et de rappeler un précédent conflit lorsqu’un défenseur de l’ordre
avait persuadé Calmette qu’un livre de Montesquiou était « plein d’attentats contre la société parisienne » : « J’ai réagi et réussi à
vous persuader (pendant qu’elle continuait de péricliter) que je pourrais bien être un des derniers qui continuent de la soutenir.
Aujourd’hui l’assaut recommence, cette fois, sous l’aspect de la
confraternité violée
»... On cherche à le déposséder de ce qu’il a
acquis « dans un amour désintéressé des choses d’art », et on a cherché à abuser Calmette. Montesquiou ne s’est jamais plaint de
l’hostilité de tel ou tel (le procédé de
caponner
lui déplaisait déjà, au collège), mais il propose de rectifier : sa collaboration n’est pas
« “momentanément interrompue”. Disons : ajournée de commun accord puisque ce sera vrai et sauvegardera mieux nos mutuelles
fiertés »... Ces réserves faites, il « accepte de grand cœur et de franc esprit » de s’adresser à lui
en toute confiance
« chaque fois
que le déroulement difficultueux de ma vie brillante m’en donnera le conseil » : « je croirai vous devoir cette consolation d’avoir
cédé, en ce qui me touche, à un mouvement moins bien inspiré que de coutume »... Rappelant que son concours fut « gracieux » et
« grammatical », il lui serre affectueusement la main, « celle de l’homme qui, ne l’oublions pas, a publié la terrible et magnifique
Discorde
... c’est-à-dire un Directeur qui a des minutes plus tolérantes, des aperçus moins modérés et moins tempérants »...




