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provoquer ni pour éviter la rupture »...

Hanoï 2 avril

. Jugements portés sur feu Félix Faure (un « soliveau »), et Émile Loubet

(« incolore, un peu vieilli, un peu ramolli »), puis sur son métier de chef de du corps expéditionnaire du Tonkin : « le premier

imbécile venu » peut le faire. « Je passe mes matinées à envoyer des hommes devant le Conseil de Guerre et à distribuer 200

ou 300 jours de prison »...

« Sur le fleuve Rouge » 14 avril

. « Je suis en route pour Quong Tchéou Wan, un pays chinois qui

nous appartient. J’y vais avec le g

al

Delambre »... Sans surprise, il constate l’échec de ses derniers efforts contre les aspirations

militaires des Colonies...

Saigon 10 juin

. De retour de Poulo Condore, « un fichu pays », il constate que l’affaire Dreyfus se

déroule comme il l’avait prédit. « Mais ça n’est pas fini ; les coquins qui sont à la tête de toute cette monstrueuse iniquité ne se

tiennent pas encore pour battus. Et ils entraveront encore l’éclosion de la lumière, mais elle percera tout de même. Ce pauvre

Cavaignac qui s’est presque fâché contre moi quand je lui disais toutes les obscurités et toutes les saletés de cette histoire, il doit

être heureux de s’être lancé à fond dans un pareil guêpier. Il était si facile de manœuvrer bien en manœuvrant honnêtement »...

Hanoï 28 juin

. Le ministère actuel, « salade de bonshommes hétérogènes », est celui « de la liquidation de l’affaire Dreyfus ».

Lui-même avait raison contre presque tout le monde. « Le cousin de Cavaignac M. Dupaty de Clam est sous les verrous. Il ne l’a

pas volé, et il l’a bien cherché. Mais on ne se doute pas de la gravité que cela peut avoir. Il va accuser tous ceux qui l’ont dirigé »...

9 juillet

. Il s’amuse des débats de la Cour de Cassation : « Il y a longtemps que je suis fixé sur la valeur morale de notre grand

État-major, néanmoins bien que je les tienne pour de pauvres diables sans moralité et sans intelligence, je suis obligé d’avouer

qu’ils dépassent mes prévisions. Les conséquences de tout ce gâchis sont inéluctables »...

23 juillet

. « Le Père Six vient de

mourir. C’était un homme de génie. [...] Nous sommes indifférents à tout ce qui a quelque valeur »...

28 juillet

. La liquidation de

l’Affaire ne se fera pas immédiatement, et quelque révolution sociale pourra en sortir. La conséquence qui l’inquiète le plus sera

« le fossé profond qu’on va faire entre le soldat et ses chefs. Le soldat est contre nous dans cette affaire, et, à mon avis, il a mille

fois raison »... Il redoute le procès de Rennes : « Il peut sortir de ce procès nouveau de nouveaux scandales compromettant de

plus en plus ce hanneton de Mercier, cet imbécile de Boisdeffre, cet égoïste endormi de Gonse, et l’armée portera le poids de

toutes ces nouvelles fautes »...

Do-Son 1

er

octobre

. Il est de retour d’une tournée dans « quelques-uns des 180 et quelque pâtés

qu’occupent les 30 000 hommes qui ont l’honneur de m’avoir pour chef. C’est un drôle de métier que je fais [...] je suis en même

temps toute espèce de chose, agriculteur, ingénieur, artilleur aussi, administrateur, etc. Tout cela m’occupe, sans arriver d’ailleurs

à aucun résultat, le Ministre ne répondant jamais. Pauvre France ! Et dire qu’il y a des imbéciles qui ne s’aperçoivent pas que

nous marchons aux pires désastres ! »... Il a vu ces jours-ci des soldats plus mal logés que des cochons, et des ambulances avec

deux hommes par lit. « C’est ainsi que la France soigne ceux qui la servent. Je ne me gêne pas pour dire que c’est malpropre ;

et j’espère qu’on voudra se débarasser de moi, parce que je dis la vérité »...

Hanoï 31 décembre

. Les Chinois « ont tué 2 de nos

officiers, leur ont mangé le cœur et ont souillé leurs cadavres, après quoi nous avons fait des excuses en abandonnant des points

que nous occupions à Queng Tchéou Wan. – Ils ont bien voulu, ces Chinois, se contenter de cela, et nous sommes traités ici par

eux comme une quantité négligeable. Je ne peux dire grand-chose du chemin de fer Laokay Yu Nantzé. – Je ne crois pas que

les travaux puissent se faire sans coups de fusils. Les Chinois ont trop le mépris des Français pour nous permettre de venir les

troubler chez eux »...