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Victor FONTANIER (1796-1857)
.
Apperçu sur les affaires
de l’Orient et sur la position dans laquelle elles ont placé la
France
. ca. 1830
. Manuscrit autographe signé «V. Fontanier», in-fo-
lio de 12 pages écrites en demi-colonne à l’encre brune sur papier fin
filigrané avec annotations marginales.
[…]
Je suis resté pendant sept années en Russie, en Perse et en Turquie;
les circonstances m’ont placé de manière à voir d’assez prés les principaux
événements qui pendant ces derniers tems ont agité le Levant et la haute
Asie. Connaissant un grand nombre des principaux acteurs et parlant suf-
fisamment les mangues des pays que j’ai parcourus, j’ai pu juger par moi
même et saisir plus aisément l’ensemble des faits; Une longue absence de ma
patrie m’a jetté hors des partis qui la divisent quant à la politique intérieure
et étrangère
[…]
C’était pour se soustraire aux intérêts du Divan que les
ambassadeurs de Russie ont cherché si souvent à obtenir la concession d’un
port dans le canal de la mer noire et cette fois sans doute ils sauront se la
faire donner. Le Caucase et après Constantinople le point le plus important
de la discussion; Les peuples qui l’habitent font des irruptions continuelles
sur le territoire Russe; ils infestent les routes et trouvent à Anapa une place
de commerce où ils vendent facilement leurs esclaves et leur butin. Bien cer-
tainement la Porte quoiqu’elle entretienne un Pacha à Anapa n’a sur ces
peuples aucune influence; elle ne peut ni encourager ni arrêter leurs excur-
sions,mais elle alimente le commerce d’esclaves qui pour la plupart sont ven-
dus à Constantinople, et en cas d’attaque de la part des Russes ne manque
jamais de prendre le parti de ses protégés par suite de ses principes qui font
de la conformité de religion la meilleure de toutes les raisons
[…]
La France
occupe dans ce moment la Morée et sans chercher à pénétrer ses intentions
ultérieures, elles ne peuvent donner lieu qu’aux trois suppositions suivantes.
1
er
Elle se bornera à l’exécution du traité de Londres et se contentera d’une
occupation plus ou moins prolongée. 2
e
. Elle s’unira à l’Angleterre pour
s’opposer aux projets de la Russie. 3
e
Ses intérêts la porteront à s’unir à la
Russie plutôt qu’à l’Angleterre
[…]
L’agrandissement qu’a reçu l’Empire
Russe par les conquêtes faites sur la Perse, la domination bien plus impor-
tante du Caucase n’ont pas assez excité les inquiétudes des cabinets; on
n’a pas remarqué que la Russie se mettait dans une position indépendante
du reste de l’Europe, qu’elle pouvait dés à présent se suffire à elle-même,
qu’elle s’emparait des routes de commerce, qu’enfin toute puissante pour
attaquer, elle n’aurait bientôt à redouter personne. Certes, il n’est pas né-
cessaire qu’une possession dans le Bosphore en fasse encore une puissance
maritime du premier ordre, et je pense qu’il y aurait un moyen de lui ôter
cet avantage
[…]
Fontanier, Victor
(1796-1857). Voyageur et diplomate, après des études de
pharmacie, Fontanier entre à l’Ecole Normale en 1815, et à l’Ecole des na-
turalistes voyageurs en 1819, tout en travaillant au muséum. En 1821 il est
envoyé à Constantinople comme naturaliste, et jusqu’en 1833, parcourt l’Asie
Mineure. En 1838, il est nommé vice-consul de France à Bassorah, et visite
l’Irak et l’Arabie. Destitué en 1840 pour avoir rompu de sa propre initiative
avec le consul anglais, il rentre en grâce en 1846, est nommé consul à Singa-
pour et chevalier de la Légion d’Honneur. Il est aussi correspondant de l’Aca-
démie des inscriptions et belles lettres. En février 1848, il refuse de reconnaitre
le nouveau gouvernement, et il est destitué.
Fontanier a laissé des récits de ses séjours à l’étranger
:Voyage en Orient, fait
pendant les ann
ées 1831-32 (
Paris 1834),Voyage dans l’Inde et le Golfe Persique,
par l’Egypte et la mer rouge (Paris 1844-47),Voyage dans l’archipel indien (1852)
et des articles
dans la Revue de l’Orient.
On joint de la même époque un manuscrit anonyme de 8 pages in-folio,
S.l.n.d., écrites à l’encre noire sur les positions prises par les puissances eu-
ropéennes au moment du traité de Londres pour la pacification de la Grèce.
1200 - 1500
€




