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Cela d’ailleurs prouve plus en votre faveur qu’en la mienne ; car si j’ai cessé d’aimer pas mal de gens des Bourget, des Hervieux, c’est

qu’ils étaient de trop intolérables salauds ! »... L’effort « héroïque » ne sera ni pour Calmette, ni pour

Le Figaro

, mais pour Huret : « Je

voudrais bien que vous ne fussiez pas trop puni par une prose que je ne vous promets pas supérieure à la morne et inutile prose de M.

Marcel

P

révost

– un bien charmant garçon, mais quel raseur ! »...

[25 juillet]

. Il a reçu les livres, mais des pontifes de la médecine lui

ont refusé tout travail pendant un mois : « Je leur ai parlé de l’article que je voulais faire ; ils ont crié comme des putois »... Ces augures

ont raison : « rien que d’écrire ce billet, voilà que des cloches sonnent, sonnent dans ma tête. Je suis un clocher de village, et je sonne

l’angélus, la messe, les baptêmes et la mort dès que mon pauvre cerveau veut s’occuper à quelque chose »...

Paris [23 ? août]

. «

G

émier

m’a répondu. Je ne le crois pas remonté sur ma petite pièce [

Le Portefeuille

]. Au contraire. [...] J’ai vu

C

laretie

hier mardi. Nous avons

causé en bons amis, et comme je lui manifestais mon regret de ce qui s’était passé entre nous, et que je le lui disais avec une certaine

émotion, il m’a sauté au cou et m’a embrassé. C’est tout de même un brave homme. Quel dommage qu’il n’ait pas plus de décision »...

Cormeilles-en-Vexin [25 septembre]

. Il remercie Huret de ses bons offices auprès du directeur du

Matin

B

unau

-V

arilla

, mais il tient à

son prix : « C’est gratuit, ou c’est très cher [...] le prix que Marcel Prévost, qui est un fantaisiste amusant, et un amuseur si profond,

touche au

Figaro

, c’est-à-dire 500 f. par article. Je n’en démords pas »... Il recommande un séjour à Pougues : Huret aurait la joie de

connaître l’aide-soignant Girard, dont Mirbeau rapporte les propos corsés sur le Brésilien Guzman et ses selles : « Girard nous donne une

conception moins lyrique, moins offenbachique du Brésilien. Encore un progrès de la science. [...] Oui, mais tout cela ne vaut pas notre

Francisco

. L’équilibre, la justice, l’abondance, l’abandon de tous les préjugés nationaux... C’est très épatant »...

[Vers le 26 novembre]

.

« Le 1

er

décembre, c’est le dîner Goncourt où nous attribuons le prix. [...]

D

audet

m’a écrit. Il lâche l’

Amérique

. Il n’y a donc plus que

moi... Comme ce serait ridicule, je voterai blanc »...

Paris [vers le 28 novembre]

. Il ne votera pas : « Je serais seul... Successivement, ils se

sont tous défilés. D’ailleurs mon sentiment est qu’il n’y aura pas de prix, cette année »... Lui-même travaille « comme un nègre. Je lâche

mon roman et fais une grande pièce »...

[Paris 24 ou 31 mai

1906

]

. Envoi d’une recommandation au Dr Feill, de Hambourg, qui mènera Huret auprès de tous les grands

Allemands... Observations de l’état de siège à Paris : une ville vide, le 1

er

mai, une police agressive, une troupe paternelle, alors que

les grèves continuent ; le soir il a dîné chez Léon

B

lum

. Mirbeau rapporte avec verve des propos indignés ou agressifs d’un patron

« quelconque », et des industriels

C

harron

et

D

e

D

ion

, alors que des régiments entiers gardent l’usine de ce dernier à la demande de

Clemenceau. « Quant aux élections... Charron prétend aussi que c’est la Société Mercedes qui a distribué cinq francs par jour, à tous les

électeurs »... Il termine par une savoureuse anecdote sur le Dr

F

eill

, riche « avocat, banquier, armateur », qui vient souvent à Paris pour

son plaisir, et qui se fait « arranger » par le portier de l’hôtel de l’Athénée des rendez-vous galants avec la duchesse de Cambacérès pour

3.000 fr. : « Il avait raison... Elle était épatante ! »...

Altenberg [août

1907

]

. À Contrexéville, il était « fou de travail, comme

H

okousaï

était

fou de dessin » ; mais en passant par Colmar une infâme drogue alsacienne l’a empoisonné. Entre les deux, il a revu et admiré Strasbourg

pour la première fois depuis 1876 : « ils ont eu une veine en 71, les Strasbourgeois. Croyez-vous que Strasbourg, sous l’administration

française, se fût développée de la sorte ? Ils ne sont pourtant pas contents ; car les alsaciens sont des types admirables. Ils détestent les

allemands ; mais ils détestent également les Français. Savez-vous, comment ils les appellent ?.. Des belges, mon cher. Ces gens me sont

très sympathiques »... Maintenant à Altenberg pour une « cure d’air », il décrit un hôtel calme, peuplé de Français « du type Fasquelle » et

d’Allemands à l’ancienne, sobres, polis et laids. Anecdote sur

M

illevoye

, qui était à Contrexéville, et sur l’éditeur allemand qui a rompu

son engagement pour

La 628-E8

, craignant d’être condamné à deux ans de prison « pour crime de lèse-majesté, et pour crime de haute

trahison »...

Cormeilles-en-Vexin [vers le 5 septembre]

. Félicitations pour la naissance d »un « gaillard solide » chez les Huret : « Mais dites

donc, en voilà assez, hein ? Et donnez à votre femme un peu de répit, pour qu’elle vive, elle aussi, une vie tranquille et heureuse ! » Il lit

le

Rhin et Westphalie

d’Huret : « Je n’avais pas voulu le lire tant que le mien n’était pas fini et corrigé – bien qu’ils ne se ressemblent pas.

Je suis émerveillé de votre tâche, cher ami, de tout ce que vous avez accumulé d’observations et documents. Comme votre

Amérique

,

c’est un livre qu’il faut à tout homme moderne, dans sa bibliothèque. Je ne suis pas toujours d’accord avec vous – mais c’est moi qui ai

tort sûrement – car depuis que je lis votre livre, je me dégoûte du mien horriblement »...

Paris [vers le 5 avril

1908

]

. Au sujet de l’impresario allemand

S

liwinski

, et nouvelles de l’affaire du

Foyer 

: « J’ai une lettre de

F

éraudy

,

si importante, que je me demande comment Claretie fera pour plaider le procès. Cette lettre met à nu tous ses mensonges. D’autre part,

j’ai des renseignements admirables. Ça va très bien... Ça va le mieux du monde »...

[26 avril]

, sur son procès, auquel il fera entrer Huret

par son défenseur

H

enri

-R

obert

. « J’ai tellement pioché mon affaire, que je ne sais plus où j’en suis »...

[30 juin]

. Résumé des « comédies

extraordinaires » qui ont entouré l’ambition de

C

laretie

d’être nommé Secrétaire perpétuel de l’Académie : haines violentes suscitées

par l’affaire du

Foyer

(« campagne enragée » de d’Haussonville), petite majorité de soutien (Mézières, Hervieu, Sardou, Roujon), annonce

de désistement suivie d’un démenti, fureur du gouvernement contre l’indécis intouchable... Et Claretie ne veut toujours pas jouer

Le

Foyer

. «

D

oumergue

, qui le défend mais qui voudrait que l’affaire s’arrangeât galamment entre lui et moi, ne peut rien obtenir de lui.

Claretie est mené bien plus par ses sentiments vindicatifs, que par ses intérêts. Je vais être obligé de lui faire un second procès, et, cette

fois, j’ai l’assurance que j’obtiendrai de la 1

ère

Chambre, plus de 150 mille francs de dommages et intérêts »... Le président

D

itte

est

indigné par la mauvaise foi de Claretie, admire la pièce, rejette comme calomnieuse toute notion de scandale... « Au fond

C

lemenceau

garde Claretie parce qu’il réserve le Théâtre Français à Antoine. [...] Il espère qu’Antoine aura des succès cet hiver, et, à la fin de la saison

prochaine, ou Antoine sera en prison, ou il ira au Théâtre Français. Alternative bien dramatique ! »...

[2 novembre]

. Mirbeau va « cahin-

caha. Encore très faible... et le cerveau resté encore ans la nuit. Je ne m’intéresse à rien... et je m’ennuie... je m’ennuie... je m’ennuie !

Et la perspective d’un hiver, recroquevillé à la maison, sans jamais sortir, le soir, et seul, seul !.. Ça me donne envie de pleurer... Ah !

Quelle sale blague que la maladie ! »...

O

n

joint

, outre une carte de visite a.s. et un télégramme de Mirbeau, 10 L.A.S. ou cartes a.s. d’Alice

M

irbeau

aux Huret. Plus 10

intéressantes L.A. (minutes) de Jules

H

uret

à Mirbeau, 1891-1907, et 3

manuscrits

autographes (un signé) de Jules

H

uret

sur Mirbeau :

compte rendu de la pièce

Les Mauvais Bergers

(1897) ; article sur

Le Journal d’une femme de chambre

(1900) ; notice sur Mirbeau et son

œuvre pour

La Grande Encyclopédie

, t. XXIII (1900). Coupures de presse et notes documentaires jointes.

Archives Jules Huret