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nombreux brouillons et versions successives d’un même passage s’y rattachent, avec les personnages du roman : Miauline, Loïs,
Ermetrude, Azoulaïs… Des feuillets mis au net sont corrigés, ou biffés, avec des notes et remarques en marge.
Un feuillet à la date du 17 mai 1927 recueille une citation d’Henri Clouard sur le génie poétique, et diverses réflexions :
« Au fond de l’inconnu pour trouver du nouveau. – L’originalité n’est pas le fruit de la volonté pure mais celui de la liberté
du Moi profond », etc. Un autre, de la même époque, consigne l’entrée : « Remarqué le 8 avril 1927 – dans
Le Passé vivant
[d’H. de Régnier] – suivant le caractère des personnages, plus ou moins de discours parlé dans leur bouche. Et pour Jean de
Lannois, pers. taciturne et falot
ne dit jamais un mot
»... Réflexions sur le style… Notes diverses et pense-bêtes : « Demain
matin avec P. Eluard. Le voyage d’Urien »... « Lire tout Jean Cocteau – Apollinaire etc. »... «
Fouiller les personnages
plus
profonds
que nature
»... «
Écrire tout d’abord, entièrement dialogué
»... Notes de lecture d’Emerson ; passages en latin sur le
péché de gourmandise et sur l’imagination tirés de Raymond Lulle (
Opera ea quae ad adinventam ab ipso artem universalem
scientiarum artiumque
) ; notes sur
Phèdre
et
Hamlet
; etc.
Reproduit en frontispice page 2
25.
Joe BOUSQUET
. Notes et manuscrits autographes ; 21 pages in-8.
1 200/1 500
Écrits intimes, de premier jet, parfaitement lisibles. Trois feuillets ont été arrachés à un cahier ; y figurent des citations,
un dialogue et des réflexions sur l’écrivain et ses choix, des observations sur une liaison et un fragment témoignant d’une
nostalgie personnelle : « Au milieu de l’après-midi, j’ai bavardé une grande heure avec mon père ; et comme nous avions
agité affectueusement mille pensées qui nous ramenaient toutes à l’époque où j’étais enfant, nous nous vîmes, par une pente
naturelle, amenés à parcourir en esprit la campagne où nous passions en ce temps-là, les étés entre les arbres et les vignes, dans
une jolie maison que mon père avait relevée et que nous aimions chacun en notre façon. Moi j’en parlais par la peine que je
trouve à savoir cette campagne en des mains étrangères, exprimant au fond le regret que j’ai de ma jeunesse par le chagrin
que j’éprouve à n’y pouvoir revenir »... D’autres feuillets comportent des ébauches, notes et réflexions diverses : « L’idée de la
fatalité, incompatible avec la foi en l’homme »... « Un paralytique écrit naturellement comme un aveugle. Grandir, c’est pour
lui faire concurrence à ce qui l’opprime. La courbe de ses progrès tend à le faire écrire comme un manchot »... « Cette vierge
de plâtre qui est dans une niche au-dessus de la porte qu’ont franchie la nuit, pour venir à moi, tour à tour, toutes mes amies,
Mygale me la montrait de loin, hier, en me disant : “C’est moi qui change l’eau de ses fleurs” »... « Si j’ai vécu pour détruire
l’idée du temps, je dois sentir que je n’ai pas d’âge. Le monde est devenu si clair qu’il efface le souvenir de mes yeux »... « Son
corps était un lieu d’étonnement et de délices où je me proposais d’inventer l’amour. Ma joie, c’était d’en éprouver la vie au plus
secret de moi-même. Il y avait quelque chose de miraculeux dans l’opération de la dévotion »... « Un mouvement de tête fort
joli comme si elle voulait mordre dans sa joie »... « Un artiste est un œil, un œil privé de corps : il donne des yeux à la lumière,
il trouve nécessairement dans l’activité des hommes un prolongement des grands spectacles naturels »... Etc.
Reproduit en frontispice page 2
26.
Joe BOUSQUET
. Manuscrit autographe,
Pour une poupée de cristal
, [vers décembre 1936-février 1937] ; cahier
petit in-4 (21,7 x 17 cm) de 125 pages de papier quadrillé (le reste vierge), gardes couvertes de notes, rel. cartonnée
toile beige.
6 000/8 000
Important cahier inédit de vers et prose, recueillant des réflexions, souvenirs, citations, aphorismes, « idées à
noter » et anecdotes, ainsi que quelques des faits et gestes de la vie quotidienne. Le texte présente peu de corrections.
Au verso de la page de garde figure un titre-dédicace :
« Pour une poupée de cristal.
Un enchaînement de faits qu’on chante à sa mémoire »...
On lit en regard, cette recommandation de Bousquet à lui-même : « Et dans la critique et dans les notes, aboutir à cette langue
extraordinairement claire, un langage de poupée, de poupée de cristal »...
Le contenu de ce cahier est principalement littéraire. On y lit, à côté de notes pour son livre
Iris et Petite Fumée
, des confidences
personnelles (sur son enfance et ses parents, sur l’usage de l’opium), des réflexions sur le bonheur, l’homme contemporain,
la fatalité, diverses locutions familières ou proverbiales, la Foi dans la littérature contemporaine, et de nombreuses citations
(parfois sans attribution) d’Alain, Saint Augustin, Bergson, Flaubert, Lacretelle, Lacordaire,Antoine-Raphaël Mengs (
Réflexions
sur la beauté et sur le goût dans la peinture
, 1786), Paillot de Montabert (
Traité complet de la peinture
, 1829-1851), Albert
Thibaudet…, ainsi que des extraits de critiques sur son œuvre par Jacques Béchot (
La Hune
), Gabriel Bounoure (
NRF
), Edmond
Jaloux (
Les Nouvelles littéraires
), Fernand Lot (
Comœdia
), Carlo Suarès (
Cahiers du Sud
)... Les références bibliographiques
abondent : œuvres de J.F. Angelloz (thèse sur Rilke), Aragon, Bachelard, Barrès, Descartes, Goncourt, R. Huyghe, M. Jacob,
Lhote, Maeterlinck, L. Stein, Verne, Wagner, Zola, etc. Les familiers carcassonnais de Bousquet se retrouvent ici : sont nommés
Ferdinand Alquié (fréquents échos de leurs conversations), James Ducellier, Jean-Baptiste Fourès, Jean Mistler, René Nelli,
ainsi que des domestiques. On relève aussi, sur la première page de garde, les coordonnées à Hanoï d’un fournisseur de « Pilules
anti-opium ».
Nous ne pouvons citer ici que quelques entrées qui donneront une idée de ce cahier-journal.
Le cahier commence par la relation, en 6 parties, de ses efforts pour se ressaisir, depuis qu’une « crise nerveuse » à l’automne
lui a révélé la « désaffection générale » qui s’est emparée de lui : « C’est fini de me subir [...] Je quitterai, pour habiter la maison
de mes actes, le désert illimité de mes impressions. [...] Je vais avoir quarante ans. On me fait crédit d’une certaine sagesse
apparue par hasard dans des livres que j’ai écrits comme en rêve. [...] j’écris, en réalité, pour m’imposer, pour dresser, de force,
dans le cadre des institutions sociales une construction entièrement arbitraire et que ses bases négligeables n’empêcheraient
pas de concourir avec tout ce qu’édifient les exigences les plus respectables de la nature humaine. Je veux que ma fantaisie et
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