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Bossuet sous le couperet de la censure

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BOSSUET (Jacques-Bénigne).

Lettre adressée au cardinal Noailles

.

Germigny, le 24 octobre 1702.

Lettre autographe signée “

J. Benigne E de Meaux

”, 8 pages in-4.

Superbe et longue lettre au cardinal de Noailles à propos de la controverse qui suivit la

publication de la dernière riposte de Bossuet à l’ex-oratorien Richard Simon.

Ses

Instructions sur la version du Nouveau Testament

venaient d’être soumises à l’examen des cinq chanceliers :

coup dur pour le premier théologien de France qui se doublait alors d’une nouvelle humiliation. On lui

demandait de faire placer l’attestation de l’examinateur en tête de son ouvrage.

L’Aigle de Meaux s’en remet donc à son supérieur :

Comme je croy monseigneur v E presentement de retour de ses visites que le temps approche ou elle verra le Roy il est

temps que j’aye l’ honneur de luy parler sur le traitement qu’on me fait. J’ay dissimulé la premiere injure de me donner

un examen ce que cinq chanceliers de suite a commencer par m. Seguier n’ont jamais songé. J’ay, dis-je, dissimulé

dans le dessein d’avancer l’impression. Elle est achevée. Cela va bien de ce costé la : mais on passe a une autre injure

de vouloir que l’attestation de l’examinateur soit a la teste. C’est monseigneur ce que je ne consentirai jamais parce

que c’est une injure a tous les Evesques qu’on veut mettre par la sous le joug dans le point qui les touche le plus dans

lessentiel de leur ministere qui est la foy. En verité Monseigneur s’il ne s’agissait que de moy je pourrais encore m’y

soumettre dans l’esperance que le Roy nous ferait justice. Mais si j’abandonnois la cause on la croirait finie par mon

consentement et par mon exemple.

J’ay mandé a Mr Anysson ce qu’il avoit a dire sur cela pour empescher qu’on nen vinst a leffet.

[...]

J’espere tout après

dieu du secours et de la protection de v. E. que dieu na mise dans une si grande place avec tant de lumieres de pieté

et de crédit que pour soutenir l’Eglise. Je m’aiderai de mon costé et espere en dieu qu’il nous tirera de cette oppression

si nous ne perdons point courage. Si j’en manquais

v. E. seroit la premiere a me redresser. Il faut eviter l’examen aux

evesques : Je dresserai une requeste que je prierai v. E. de presenter et d’appuyer. J’attends de la dresser que j’aye une

reponse precise pour en regler la conclusion et paroles. J’espere que v. E. previendra le Roy qu’on n’aura pas manqué

de bien preparer contre nous. J’espere demain avoir reponse et d’ecrire plus precisement a v. E. par mon neveu que je

suivrai si je puis.

Je croy que mon livre sera utile principalement parce que se conformant en tout point a vostre censure, il fera voir

l’esprit socinien dans l’ouvrage qu’elle a condamné. Cela paraît devoir avoir un grand effet pour faire revenir les plus

prevenus et faire sentir a tout le monde le grand peril de l’église. Dieu nous aidera et pour moy je combattrai sous vos

ordres jusqu’au dernier soupir. Vous savez mon obeissance Monseigneur.”

Cette affaire éclata de fait au milieu d’un conflit plus large qui opposait la chancellerie aux évêques au sujet de

la censure des livres à caractère religieux.

(

Correspondance

XIII, 1920, n° 2181.)

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