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218

les collections aristophil

1915

. « Les gens sont inquiets. Vraie panique, beaucoup disent que

les Allemands approchent. On a tellement peur de les voir revenir

qu’à tout instant on s’aÀole et chaque fois que nos pièces tirent plus

que de coutume on croit à une attaque victorieuse. […] La nuit et la

neige amplifient le son. Ce sont d’énormes et fréquents coups de

gueule. Jamais encore nous n’avions entendu pareille canonnade »…

Plus tard, il attribuera cette attaque funeste pour les 23

e

et 133

e

R.I.

au désir du général BULOT, dont on avait célébré dernièrement la

promotion, de se distinguer. « Un peu de vérité sur l’attaque du 27.

Sous les ordres du L

t

colonel Dayet du 133 le 2

e

bataillon du 23 devait

attaquer. Le colonel Dayet fit tous ses eÀorts pour que l’attaque n’ait

pas lieu, la jugeant vouée à un échec. Le général Bulot maintint ses

ordres. L’attaque partit, le colonel Dayet la suivit, sa cravache à la

main, cherchant manifestement la mort qu’il trouva. Le résultat fut

aÀreux : 230 hommes perdus dont 130 tués. Pas d’autre résultat que

ces morts et une solide haine des soldats pour le général Bulot »…

22

décembre

. « Pas de nouvelle de Joseph. Nul ne l’a vu, ça me paraît

bizarre »… Les circonstances des jours précédant la mort de Joseph,

et des dišcultés pour obtenir de ses nouvelles sont racontées dans

le détail.

24 décembre

. Lettre de Loys annonçant à ses parents la

mort de Joseph : « L’attaque eut lieu et réussit très bien. J’appris que

Joseph était parti avec la deuxième vague d’assaut afin de soigner les

blessés restés sur le terrain […]. Il n’a pas souÀert car il a été tué net.

Bien heureux ceux qui meurent pour la justice, car ils verront Dieu »…

1916.

[Secteur de Quiry-le-Sec (Somme)] 1

er

juillet

. « Très chaud soleil.

Violente canonade. Le soir revue de la division par JOFFRE assez

loin de Quiry. J’aurais voulu y aller. Le major me fit rester avec des

brancardiers pour nettoyer le pays. Succès de l’oÀensive. À peu près

toute la 1

re

ligne est enlevée. Succès anglais »…

11 juillet

. « Couvert

les Allemands qui battent en retraite, le régiment de Roux se trouva

à Maerke-Kerckem, en Flandre-Orientale (Belgique), au moment de

l’armistice.

Nous ne pouvons donner ici qu’un rapide aperçu de ce document

exceptionnel, où le récit des marches et des combats alterne avec

des notes sur les tranchées, les postes de secours, les pertes (dont

des états nominatifs, en 1918), les chefs sur le terrain et l’état-major

lointain, la propagande, ainsi que des impressions personnelles,

rumeurs, preuves d’incompétence et d’injustice militaires et de

préventions contre le clergé, et des remarques sur l’état d’esprit des

soldats, les dégâts matériels, la détresse humaine, la lassitude teinte

d’amertume avec lesquelles on a accueilli la fin…

1914-1915.

[Saint-Jean d’Ardières (Rhône)]

1

er

août 1914

. En vacances

avec Joseph chez leurs parents, Loys apprend la mobilisation : « Me

voilà content. Il y a dix ans que j’attends la guerre. Je me suis fait une

âme héroïque dès mon jeune âge par mes lectures et mes rêveries

et je partirai sans pleurs. […] J’ai à venger : mon bisaïeul Louis Garde,

capitaine de la Grande Armée et mon grand-père Philibert Monnet

grenadier au 17

e

de ligne sous Louis-Philippe et qui non combattant

en 1870 a tant versé de larmes sur nos revers. […] Je note sur mon

carnet les principaux anniversaires d’anciennes guerres »…

Saint-Dié

(Vosges) 14 novembre

. Joseph écrit à leurs parents : « Loys et moi

venons d’être proposés pour l’avancement. Loys pour le grade de

sergent et moi pour celui de caporal. Mais… ns av. refusé pcq’il aurait

fallu ns séparer et quitter notre ambulance »… Loys ajoute : « J’ai

refusé mais avec un certain regret. Il aurait été bon d’être sergent et

surtout d’aller au service “de l’avant”. Ça me pèse tant d’être bêtement

caporal d’ordinaire »… Et de confier à son journal, le 16, sa honte d’être

resté « un piteux caporal infirmier »…

[Secteur de Saint-Dié] 27 janvier