les collections aristophil
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SAINT-AIGNAN François de
B
EAUVILLIER
, duc de
(1610-1687) pair
de France, premier gentilhomme
de la Chambre, lieutenant-général,
ordonnateur des fêtes de la Cour,
poète (de l’Académie française).
2 L.A.S. « Le Duc de St Aignan », 1674-
[1680 ?] ; 3 pages in-4 chaque (un
portrait gravé joint).
500 / 700 €
Le Havre 4 juin 1674
, au marquis de
SEIGNELAY,
comme gouverneur du Havre
.
Le Roi ne sera pas fâché de recevoir des
nouvelles de la Manche et de l’armée navale
ennemie : « les divers mouvemens de ceste
flotte les rend sy incertaines qu’on ne les
a pas tousjours bien sceuës ; on mescrit
mesme de Paris ce matin qu’elle est hors
de la Manche et quaparemment elle va à
Bayonne à Beslisle ; ou en Ré ; mais elle a
reviré vers les Dunes. […] ce matin estant allé
à cheval sur les quatre heures à deux lieuës
d’icy vers les costes, j’ay entendu un grand-
nombre de coups de canon de ces costés
là ; mais je ne peux juger ce que ce peut
estre ; ny quel dessein ces gens la peuvent
avoir sy ce n’est d’attendre que M. le Prince
soit attaché à quelque place pour tomber sur
le lieu qui leur sera le plus facile ; car pour
Dunkerque je m’imagine que quelque envie
qu’ils en ayent, ils auront peine à la passer »…
Du reste, les places de ce gouvernement
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SAINT-EXUPÉRY Antoine de
(1900-
1944) aviateur et écrivain.
MANUSCRIT autographe,
La Guerre
,
[mars 1939 ?] ; 4 pages et quart sur 5
feuillets in-4 de papier pelure jaune,
avec ratures et corrections, paginé en
bis de 3 à [7], avec un petit
croquis
à
la plume de visage en tête.
4 000 / 5 000 €
Manuscrit sur l’inéluctabilité de la guerre
contre l’Allemagne expansionniste, après
l’invasion hitlérienne de la Tchécoslovaquie
(15 mars 1939).
[Saint-Exupéry était parti début mars 1939 faire
un voyage en auto en Allemagne, rapidement
interrompu le 15 par les événements. Ce
texte, peut-être conçu comme un reportage,
semble
inédit
. Un développement sur le blé
est très proche d’un paragraphe de
Pilote
de guerre
(Pléiade, t. II, p. 207).]
« L’Allemagne. L’entrée à Prague. […] d’où
vient cette atmosphère sans enthousiasme ?
Sur les petits chemins de campagne des
troupes et des troupes et des troupes. […]
Dans cette auberge l’hôtesse, qui regarde
passer les hommes nous parle : c’est terrible,
n’est-ce pas ? On va certes lui prendre ses
fils. Elle a cinq fils. Elle résiste à la guerre.
Elle ne comprend pas la guerre. Mais voilà
longtemps que je ne crois plus au langage
intellectuel. Celle-là résiste à la guerre.
D’autres résistent à la guerre. Il faudrait sans
doute sonder loin les cœurs pour découvrir
même dans les jeunes gens, sages vides
et fatigués, autre chose que le refus de la
guerre. Où est-elle donc l’acceptation de
la guerre ? Et cependant elle est possible.
Voilà les témoins de la menace, tous ces
insectes carnivores, tous ces instruments
huilés […] polis, brillants qu’un peuple s’est
forgé comme un outil. Et qui s’écoulent vers
les routes en direction de Prague. Les écailles
de métal on les installe dans les campagnes
et les campagnes changent de sens. Je songe
aussi au mystère des natures, au mystère de
l’être. Il sut d’un instrument semblable aux
lisières d’un champ de blé et voilà que le blé
change de goût. Le pain n’a pas le même
goût. Le chant du moissonneur change de
sens. Toutes les seringues injectent leurs
venins et transforment l’être en un autre être.
Et cependant l’on n’a rien changé de la paix
des campagnes, du coup de vent dans les
moissons. Mais qu’est-ce qu’un champ de
blé ? L’homme n’est pas un bétail à l’engrais.
Il y a le cantique du blé et le poème de la
moisson. Le blé cet élément spirituel aussi.
sont en état de peu les craindre, et lui-même
« prest à me mettre à la teste d’un corps
de neuf à dix mil hommes ». Avec leurs
quatre pièces de canon, il a « peine a croire
que leur milice batte celle-cy ; bien que le
comte d’Hornes et Farjeau se promettent
merveilles »…
[1680 ?, à Madeleine de SCUDÉRY].
Belle
lettre relative aux
Conversations sur
divers sujets
de Mlle de Scudéry
. Il a
reçu son présent à genoux : « Ce qui vient
de vous mademoiselle porte avec soy une
recommandation qui charme ceux à qui il est
addressé ; et je me fais un sy grand honneur
de voir quayant ecrit d’aussy belles choses
vous m’ayés cru capable d’en connaistre le
prix que je vous en seray obligé toute ma vie ;
ces livres incomparables que vous nommés
si galammant des amys commodes nont pas
demeuré longtemps seuls dans mon cabinet.
J’ay desja eu une longue conference avec le
premier, qui m’a dit des choses sy delicates
sy justes et si bien tournées a la louange du
Roy que j’ay devoré ce que je devois gouster
peu a peu »… Il admire en particulier ce que
dit Timocrate à Telesile et à Cephise, de ce
grand monarque, « ma passion dominante »,
et l’entretien de Chrisante et Noromate, « qui
m’a fait connaistre que les religieux les plus
sçavans et les plus zellés ne sont pas ceux
qui parlent le mieux contre le libertinage ; et
que mademoiselle de Scudery est tousjours
inimitable »…
Au dos de la lettre, Madeleine de SCUDÉRY
a noté de sa main : « Le Duc de St Agnan ».




