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À l’occasion du centième anniversaire de sa mort
Edmond
ROSTAND
(1868-1918),
les siens
:
Rosemonde ROSTAND
(1866-1953)
Maurice ROSTAND
(1891-1968)
Jean ROSTAND
(1894-1977)
et leurs amis
304.
Edmond ROSTAND
.
M
anuscrit
autographe d’une pièce de théâtre ; rouleau d’environ 800 x 10,2 cm, composé d’une
trentaine de feuillets collés ensemble (quelques réparations au scotch), plus le 1
er
feuillet très déchiré.
1 500/2 000
P
ièce
en
vers
de
jeunesse
,
inédite
,
inspirée
par
le
personnage
de
S
hakespeare
.
Cette pièce, en 5 scènes, et environ 500 alexandrins (avec plusieurs décomptes de vers en marge au crayon), est incomplète du tout
début. Elle met en scène quatre membres de la troupe de Shakespeare, et, à la fin, Shakespeare lui-même. Le personnage principal,
Yorick, craint d’être trompé par sa jeune femme, Alice. Il se doute que les autres sont complices, pour le lui cacher ; il s’en ouvre à
Walton, puis à Richard ; sa première « preuve » fut la réaction d’Alice à une réplique, «
Tremble, infidèle !
».
« Et du reste depuis cette première preuve
J’en ai pu découvrir chaque jour une neuve !
Car mon bonheur était comme un soleil joyeux :
Tant qu’il fut sans nuage il éblouit mes yeux,
Il m’aveugla ! »…
Il décide de demander la vérité à Alice elle-même, puisqu’elle ne ment jamais ; il sort. Richard supplie Alice de s’enfuir avec lui, mais
elle ne veut plus mentir. Yorick revient, renvoie Richard et se livre à une belle tirade, confessant à Alice sa passion née dès leur première
rencontre, et la mettant en garde contre l’amour éphémère des jeunes gens.
« Et l’Amour à l’Amour succédant sans raison,
Comme une floraison à l’autre floraison,
Pour eux, et l’Amour neuf leur semblant le sincère,
Ils ne regrettent rien ! – Mais notre cœur se serre,
À nous autres, les vieux, qui fûmes assez fous
Pour laisser la fleur bleue encor fleurir en nous,
Au penser que peut-être elle mourra, fanée,
Avant de parfumer notre suprême année ! »…
La réponse d’Alice mettra Yorick en fureur, mais l’arrivée du maître
S
hakespeare
provoque un dénouement inattendu…
305.
Edmond ROSTAND
. L.A.S. « Ton Edmond », Schönbrunn [été 1898], à sa femme
R
osemonde
; 2 pages et quart in-4
(fentes aux plis réparées).
600/800
B
elle
lettre
lors
de
son
premier
séjour
à
V
ienne
sur
les
traces
de
l
’A
iglon
,
et
sur
l
’A
ffaire
D
reyfus
.
Visite de Schönbrunn, où mourut le Duc de Reichstadt. Il a été au Musée du Trésor impérial « où j’ai pu longuement regarder le
Berceau. C’est une chose admirable dont aucune gravure ne saurait donner l’idée. En voilà un joli meuble empire ! Et c’est d’un goût
au milieu de tout ce mauvais goût allemand ! C’est une merveille ». Il est allé ensuite visiter le couvent des Capucins où l’Aiglon est
enterré : « j’ai vu son cercueil perdu au milieu de tous ceux de la maison d’Autriche […] cette sépulture des Empereurs d’Autriche est
affreuse, pauvre, laide. […] Celui du duc est d’une extraordinaire longueur, plus simple, heureusement, sans rocaille ; une simple plaque
de cuivre ». Il a été voir sa chambre au château de Vienne et a demandé l’autorisation de la photographier : « ça, c’est triste encore, et
laid, mais curieux » ; la fenêtre donne sur la cour, où l’on change la garde en musique tous les jours... Il a trouvé dans le parc de Schön-
brunn un coin en ruines qui ferait un admirable décor… Il trouve Vienne abominable : rien à rapporter, tous les théâtres fermés, etc. Ici
personne ne sait qui il est, mais on le regarde tout de même comme une bête curieuse : « à quoi voit-on que nous sommes Français ? ». Il
rentre bientôt et aimerait que son passage à Paris reste secret : « la recrudescence bien prévue par moi de l’affaire
D
reyfus
fait qu’on doit
me chercher pour me faire signer en faveur de
P
icquart
. Et comment refuser de signer contre une si abominable injustice ? D’autant
que les choses m’ont l’air de tourner mal pour
E
sterhazy
. Mais j’avoue que je n’aimerais pas signer contre un gouvernement qui vient
enfin de faire arrêter ce sale uhlan ; c’est déjà un pas vers la lumière, dont il faut lui savoir gré, et ne pas l’attaquer en ce moment. Si les
dreyfusistes ne gaffent pas, leurs affaires vont bien. Si on te demande où je suis, dis que tu ne sais, que je rayonne, que je suis peut-être
à Buda-Pesth »… Il termine en disant son amour…
Edmond ROSTAND




