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Mardi 6 octobre 2020
290.
PierreLOTI
.
M
anuscrit
autographe
signé,
Visite à la Reine
, 1898 ;
5 pages grand in-fol. découpées
pour l’impression et contrecollées
sur cartes, avec quelques ratures et
corrections.
800 / 1 000€
Récit d’une visite à la Reine
d’Espagne Marie-Christine, en pleine
guerre hispano-américaine
.
Ce récit, daté en tête « Madrid,
samedi 30 avril 98 », a été publié dans
Le Figaro
du 6 mai 1898, et recueilli en
1899 dans
Reflets sur la sombre route
.
Le titre primitif, rayé sur le manuscrit,
était : « Au Palais de Madrid ».
Loti relate sa visite à la Reine régente
d’Espagne
M
arie
-C
hristine
(veuve
d’Alphonse XII), quelques jours après
la déclaration de guerre des États-Unis à l’Espagne ; cette guerre fera 100.000 morts du côté espagnol qui perdra
Cuba, les Philippines et Porto-Rico. Cette visite de Loti, qui venait d’être mis à la retraite d’office, reste assez
mystérieuse ; largement relayée par les articles qu’il envoie au
Figaro
(du 2 au 31 mai), elle avait peut-être au départ
un aspect officieux, mais des pressions semblent avoir été très vite exercées sur Loti pour observer une certaine
neutralité.
Loti évoque la foule madrilène, « guettant les nouvelles, excitée par le vent de la guerre », et les promenades
élégantes sous les ombrages. Il raconte son arrivée au palais royal, son attente « dans les immenses salles aux
splendeurs anciennes »... Il se souvient de la Reine qui l’accueillait souvent à Saint-Sébastien. La Reine lui accorde
l’audience : « Sa Majesté daigne me recevoir aujourd’hui, me remercier d’être venu. Mais voici que ce trop précieux
remerciement me trouble et me gêne, comme d’ailleurs l’accueil que l’on veut bien me faire à Madrid, car j’ai
conscience de ne point mériter tout cela, puisque je n’ai aucun moyen, hélas ! de seulement prouver ma dévotion
pour une cause qui m’est cependant si chère ; étranger ici, retenu par les lois de neutralité, je n’ai même pas le droit
d’offrir ma vie, comme le plus obscur des soldats espagnols. Et tout à coup je me sens confus d’être venu, confus
d’avoir demandé cette audience en un pareil moment, confus de tout ce que j’ai fait, dans un élan sans doute par
trop irréfléchi, puisqu’il était sans résultat possible. En m’excusant, je ne puis que répéter à la Reine ce que tous mes
amis de France m’ont dit au moment de mon départ – et ce qui, je crois, ne serait désavoué par aucun français, – leur
entière sympathie pour l’Espagne, leur révolte de la voir ainsi attaquée et abandonnée ». Loti rapporte la réponse
de la Reine. Il voit ensuite le jeune Roi [
A
lphonse
XIII] : « il m’apparaît grandi, très fortifié, embelli, les joues roses,
les yeux vifs ; dans toute sa petite personne, une grâce élégante et fière »... Avant de quitter le palais, il va saluer
l’archiduchesse Élisabeth d’Autriche, mère de la Reine...




