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193. OFFENBACH
(Jacques). Lettre autographe signée au poète Joseph Audran. S.l.n.d. 2 pp. 1/2 in-8.
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«
Méry me fait dire à l’instant qu’il part ce jour pour votre belle cité
[le poète Barthélemy Méry était marseillais
comme Joseph Audran]
. Je ne veux pas laisser passer une si bonne occasion sans vous donner signe de vie. Vous êtes
si paresseux de la plume (
que vous maniez si bien
) que je crois inutile de m’excuser auprès de vous du retard que j’ai
apporté à vous donner de mes nouvelles.
Je regrette bien vivement votre
beau
climat, vos
beaux
favoris, votre
beau
port (je ne parle pas du vôtre) et,
par-
dessus
de tout, votre exquise
Bouilla‑baïsso
,
dont j’ai reçu le baptême le premier jour de mon arrivée à Marseille.
Aussi mon bien vif désir serait de retrouver cela et surtout de revoir les bons amis que j’ai laissés là-bas...
David m’a dit que vous lui avez promis une scène maritime, je le plains, le malheureux, Dieu et votre paresse seul
savent quand il l’aura... et moi aussi, dans quelques mois je vous prierai de célébrer en vers mon héritier pour imiter
les princes royaux. Je vous enverrai, en signe de remerciements, et de gratitude, une bague en caoutchouc.
»
« Mon art tu me l’a donné... Je suis une artiste, mais c’est toi qui l’a faite,
donc si tu t’en va, il n’y a plus rien... »
194. PIAF
(Édith). Lettre autographe signée «
Didi
» à son compagnon le parolier Raymond Asso. [Château de La Font]
à Chenevelles [dans la Vienne], 13 septembre 1938. 4 pp. in-folio sur papier quadrillé.
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Extraordinaire lettre d’amour illustrant la passion houleuse qui unit Piaf à Raymond Asso, et offrant un
témoignage exceptionnel sur la force de caractère et les failles de la chanteuse.
Édith Piaf avait donné concert sur concert depuis le début de l’année, et sortait d’une tournée estivale qui venait de la
mener à Genève, Deauville, Ostende et Bruxelles. Ayant besoin de repos, elle était venue séjourner au château de
La Font, qui était loué comme maison d’hôtes par la famille de son nouveau pianiste et compositeur Max d’Yresnes –
elle y était déjà venue quelques jours avec Raymond Asso en juillet. L’éloignement et son cœur fougueux lui dictèrent
cette longue lettre exaltée écrite à cœur ouvert, pleine d’amour, de (re)sentiment, de doute, dans un style parlé
spontané, parfois argotique, tantôt suppliant, tantôt accusateur. Cette spontanéité, qui suit le flot discursif des pensées
de Piaf, n’empêche que la lettre ait été relue et corrigée avant d’avoir été envoyée.
Auteur de « Mon légionnaire », le parolier Raymond Asso
(
1901
-
1968
) rencontra Édith Piaf au milieu des
années trente, et fut son compagnon de
1937
à
1939
. Durant cette période de deux ans, Édith Piaf ne chanta plus que
des chansons de lui (dont
Mon légionnaire
, écrite peu avant pour Marie Dubas) et il n’écrivit plus que pour elle. C’est
Raymond Asso qui éloigna « la Môme Piaf » de ses relations avec le « milieu », lui fit apprendre le métier et fit d’elle
une des plus grandes vedettes de la chanson française.
Sa relation avec elle fut traversée d’orages, mais permit
véritablement à Édith Gassion de devenir Édith Piaf.
Édith Piaf reconnaît ici sa dette artistique envers son amant.
«
Mon pauvre mamour, comme tu dois souffrir pour m’écrire d’aussi vivlaine chose, mais tu a raison, je suis bête,
je te l’ai toujour dit, c’est toi qui a voulu me convaincre que j’ettait intelligente,
d’ailleurs pour faire toute les bêtises
que j’ai faites avant de te connaître prouvait toute mon inintelligence, et il est bien tant de pleurer comme je pleure
pour les êtres que j’ai rendu malheureux.
Les gens bêtes sont toujours malheureux,
ils s’apperçoises toujours des
gaffes qu’ils onts faites une fois qu’il et trop tard, alors ils pleurent croyant que sa va arrangé les choses et cela
n’arange rien, natturellement. Ceux-là sonts des êtres inutille sur la terre, mais ils ne sonts pas toujours si fautive que
sa c’est la fautes à leurs parents : pourquoi quand les parents sont bêtes fonts-t-ils des enfants...
…/…




