Previous Page  17 / 120 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 17 / 120 Next Page
Page Background

15

aimez – le sens “Sphinx”. Or Yvonne à l’école Bataille

s’est faite au barbouillage du texte. Elle en invente la

moitié et ajoute des “Na” et des “Ho” et des “Ben”

qui m’étaient indifférents dans les

Monstres

[

sacrés

]

mais qui enlèveraient à la

Machine

sa ligne inflexible.

3° Jean Marais dont l’instinct est sûr et qui rêve de

jouer avec Yvonne, estime que dans ce rôle elle rendrait

tout suspect, vicieux etc... genre “Venin” – qu’on nous

reprocherait d’être “pourris” alors que l’ensemble doit

être du feu et alors que Dorziat aurait, elle, la dignité,

l’élégance, la tenue parfaite d’une femme qui a la pudeur

du couchage. 4° Yvonne fait femme plus jeune, flétrie,

avachie par les désordres. Dorziat fait femme plus vieille

qui est restée jeune, mince, droite, fraîche, par discipline

et ordre. Yvonne coupable de lettres anonymes ce serait

terrible et laid. Dorziat, fière… etc... terrible et beau.

Pour employer mon jargon que vous entendez si bien

et qui vous amuse, je dirai que Dorziat est gruyère à

trous et Yvonne cam[em]bert qui coule. 5° Jouvet n’a

pas joué les

Parents

[

terribles

] à cause d’Yvonne. Il n’en

voulait pour rien au monde dans son théâtre »... Enfin

il invoque les sautes d’humeur d’Yvonne, sa mauvaise

influence, ses trous de mémoire, son indifférence, ses

insultes d’ivrogne et ses hurlements en coulisse... Il

déplore que la salle du Palais-Royal se perde, et imagine

des matinées de lecture de classiques : « de l’ancienne

Athénée à Jouvet il y avait aussi loin et notre époque

permet tous les coups d’État »... Il ajoute que Willemetz

avait raison « pour la fin

inévitable

[…] et pour le

départ de Margot. Je crois avoir trouvé une chose très

jolie – Margot et Maxime recommençant à se disputer devant Solange et Fred – ils pensent dans leur tempête. Merci ».

39.

Jean COCTEAU

. L.A.S., Saint-Jean-Cap-Ferrat 17 mars 1952, à René Bertrand ; 1 page in-4.

200/300

Sur

J

ournal d

un

inconnu

, au futur dédicataire du livre, René Bertrand, dont il préfacera

Sagesse et Chimères

(Grasset,

1953).

« Le livre avance et s’adresse souvent à vous, en personne. J’en suis au chapitre “

De l’innocence criminelle

” qui se présentera

sous forme d’une histoire-exemple assez curieuse. J’ai terminé le chapitre “

De la mémoire

”. Le difficile est de garder le style de

métaphysique amusante

” d’un Tom-Tit de l’invisible. Je m’efforce de ne m’embarquer jamais sur une mer qui ne m’appartient

pas et d’éviter les vocables de la science. De conserver à mon étude un certain air enfantin. Racontez-moi où vous en êtes et si

vous avez pris contact avec Grasset. Il me tarde que vos enfants paraissent sous un costume digne d’eux. [...] Nos pages doivent

s’accumuler selon un rythme analogue »...

40.

Jean COCTEAU

. L.A.S. « Jean », Saint-Jean Cap-Ferrat 7 décembre 1952, à une amie [Marie Cuttoli] ; 1 page

in-4.

300/400

Sur sa tapisserie

M

éditerranée

, qui sera exécutée dans les ateliers de Marie Cuttoli. « J’ai travaillé jour et nuit (vous

connaissez le rythme de Picasso et le mien) sur notre tapisserie. Je crois qu’elle sera belle et digne de vous. Je travaille la peinture

avec les doigts afin que la matière ne se présente jamais plate et qu’elle vive. Il me semble que vos ateliers ont fait des miracles

dans ce genre de traductions. Ce matin il y a tempête de mistral et ma vaste toile risque de m’emporter en l’air comme un cerf

volant. Les fenêtres et les portes s’ouvrent sans qu’on s’y attende avec une violence incroyable. Je suppose que j’aurai terminé

dans 2 ou 3 jours »... Il est accablé de demandes pour l’Italie. « Je préfère que notre tapisserie soit mon premier message. J’irai

après ».

41.

Jean COCTEAU

. L.A.S.,

S

t

-Jean Cap-Ferrat

6 décembre 1958, à un ami ; 1 page in-4 à en-tête de

“Santo-Sospir”

.

250/300

« Mon existence qui serait le rêve pour un égoïste ne l’est pas pour un homme qui n’estime que l’intelligence de cœur et

les contacts d’affection. Je serai à Paris en janvier pour la

Voix Humaine

de Poulenc que je costume, décore et mets en scène ».

Il n’a pas de texte : « j’ai mis momentanément mon encre en bouteille dans la cave. Elle repose. Je me suis aperçu en France

du danger d’une œuvre considérable comme la mienne. La France est le pays “d’une seule œuvre”. Je reste l’auteur de

Plain-

chant

,

Enfants terribles

,

Machine infernale

. Le reste “on me le passe” et encore. Le Français se repose l’esprit dans un titre

célèbre :

Adolphe

,

La P

esse

de Clèves

,

Le Rouge et le Noir

, etc. […] S’il m’arrive de trouver un texte inédit dans ma montagne

de paperasses, je vous le garde »...