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[1978]
. Genet réfute les arguments de la partie adverse et refuse un accord amiable : « Le contrat de 1944 avec Denoël
m’accordait 15%. J’ai signé quelques mois après le même contrat avec M. Barbezat pour 12%. Il est donc bien clair qu’une
pression a été faite sur moi. Pourquoi aurais-je abandonné spontanément 3% à M. Barbezat ? Je sortais de prison, je devais
y retourner, je n’avais pas d’argent et je me croyais fort du contrat Denoël à 15%. En fait, j’étais très faible, affaibli par la
prison. [...] Que M. Barbezat m’ait découvert comme écrivain, c’est faux. Cocteau a invité Robert Denoël à lire le manuscrit
de
Notre-Dame des Fleurs
. [...] M. Barbezat n’a pas, selon la loi de 1957, tout mis en œuvre pour faire connaître mes livres.
C’est Gallimard qui l’a fait. D’abord Gaston, ensuite Claude Gallimard »... Barbezat a voulu se faire passer pour un mécène,
« mécène pauvre, incapable de m’accorder les pourcentages du contrat-type », mécène « pleurant misère, mais qui avait une
usine, un château en Suisse, un appartement quai de Béthune », et qui exerçait « une sorte de terrorisme […] J’étais très pauvre,
j’étais un voleur et il ne l’ignorait pas, il “était intègre” et tout cela il m’a fait pour moi, jusqu’au jour où… » Genet lui reproche
aussi d’avoir publié sans son autorisation
Le Funambule
, « peu de temps après la mort de celui pour qui j’ai écrit ce livre. C’était
une goujaterie »… Il l’accuse du vol des manuscrits de ses pièces de théâtre, de la falsification des tirages… Genet veut être
présent à la négociation et à l’audience « où la parole est libre. Pendant 30 ans Barbezat a utilisé les 7% [3% corrige le tapuscrit]
de différence. Il a acheté des maisons quand je n’étais pas même sûr de pouvoir me payer une chambre pour la nuit. »
60.
Jean GENET.
Manuscrit autographe ; 1 page in-8, avec ratures et corrections.
500/700
Brouillon d’un appel en soutien à Betty, travesti grec. « À Athènes (Grèce) un auteur qui signe
Betty
a été condamné
par défaut à sept mois de prison.
Betty
a fait appel, et passera, probablement en septembre, devant la Cour. Pour son livre
qu’ils condamnent, les magistrats athéniens l’accusent d’attentat à la pudeur, par voie de presse, et d’immoralité. En fait c’est
l’homosexuel qu’est
Betty
qui gêne, c’est sa personne dont on voudrait oublier l’existence et même le souvenir. Avec l’espoir de
réussir cette opération, la censure s’est renforcée à Athènes, capitale de l’Attique. Nous sommes solidaires de Betty ».
On joint une liste autographe de noms de personnalités à contacter (complétée par Paule Thévenin) : Paule Thévenin,
Bernard Noël, Jacques Derrida, Michel Butor, Gilles Deleuze, Claude Mauriac, etc.
61. [
Jean GENET
]. Dossier relatif au manifeste
Pour George Jackson
, 1971 ; ensemble de plus de 350 pages.
700/800
Cette pétition initiée en réaction à l’injuste accusation du militant Black Panther George Jackson et de ses deux « frères de
Soledad », pour assassinat, fut
envoyée par voie postale à quelques centaines de personnes en juillet 1971. Le manifeste reprend
un texte de Genet, écrit pour être prononcé à Londres le 20 avril 1971, ainsi que l’
Appel pour un comité de soutien aux militants
politiques noirs emprisonnés,
également rédigé par Genet.
Le dossier comprend le brouillon de l’
Appel
dicté par Genet ; des tapuscrits avec annotations pour la mise en page et indications
typographiques, épreuves corrigées, exemplaires du manifeste imprimé ; les coordonnées des personnalités contactées ; la liste
des signataires ; plus de 300 appels signés et renvoyés à Paule Thévenin (parfois accompagnés de courriers). On y trouve les
signatures de nombreuses personnalités : Edoardo Arroyo, Rafael Alberti, Arman et César, Simone de Beauvoir, Béatrix Beck,
Cathy Berberian, Hector Bianciotti, François Billetdoux, Pascal Bonitzer, Pierre Bourgeade, Jean Cassou, François Châtelet,
Hélène Cixous, Georges Conchon, Costa-Gavras, Alain Cuny, Louis Daquin, Degottex, Michel Deguy, Jean Delannoy, Georges
Delerue, Jean Effel, Suzanne Flon, Armand Gatti, Jean-Luc Godard, Juliette Greco et Michel Piccoli, Étienne Hajdu, Claude
Helffer, Jean Hélion, Maurice Henry, Kijno, Henri Langlois, Claude Lanzmann, Jorge Lavelli, Colette Magny, Jean Mercure,
Henri Meschonnic, Anaïs Nin, Pierre Nora, Valère Novarina, Luis de Pablo, Nico Papatakis, Édouard Pignon, Micheline Presle,
Pierre Prévert, Bernard Rancillac, Alain Resnais, Rezvani, Jacques Rivette, Raymond Rouleau, Claude Roy, Armand Salacrou,
Jean-Paul Sartre, Claude Sautet, Siné,Michel Vitold, etc. Plus des courriers, textes et documents de travail relatifs à la publication
de l’ouvrage collectif
L’Assassinat de George Jackson
, avec une préface de Jean Genet (Gallimard 1971) ; une lettre du Comité
d’action et d’information pour la défense des droits des noirs américains adressée à Genet (18 novembre 1970), lui proposant
d’organiser conjointement un meeting de protestation pour alerter l’opinion publique française sur « les menaces de transfert
d’Angela Davis en Californie » et « les actions punitives menées contre les locaux des Black Panthers » ; et des exemplaires d’un
appel imprimé du Comité national pour la défense et la libération d’Angela Davis.
62.
André GIDE
(1869-1951). Manuscrit autographe, [
L’Offrande lyrique
, 1913] ; cahier in-fol. de 56 ff. (plus ff.
vierges) sur papier ligné (qqs ff. découpés ou enlevés), couverture de carton vert et dos toilé rouge.
4 000/5 000
Manuscrit de travail pour sa traduction de
G
itanjali
de Rabindranath Tagore, d’après la version anglaise en prose,
Song Offerings
, donnée par l’auteur en 1912.
L’Offrande lyrique
de Tagore, dans la traduction d’André Gide, parut en décembre
1913 à la Nouvelle Revue Française.
Le manuscrit comprend 80 poèmes sur les 103 du recueil imprimé, les autres (1, 56, 67 à 73, 80, 84, 86, 92 à 100, 102 et
103) ayant été soustraits pour prépublication dans la
Nouvelle Revue Française
(n° 60, 1
er
décembre 1913, pp. 831-851). Gide
a traduit les pièces dans l’ordre, sur la moitié droite du recto des feuillets, avec de nombreuses et importantes ratures et
corrections ; la moitié gauche peut porter un extrait du texte anglais, un premier jet au crayon, ou la mise au net d’un passage
particulièrement remanié et surchargé. On relève de fréquentes interversions et nouvelles leçons, ainsi que de nombreuses
variantes par rapport au texte imprimé. Ainsi
XXI
:
« Il me faut mettre à flot (?) ma barque » (deviendra : « Est-il temps de
lancer ma barque ? ») ;
LI
: « Nous avions accompli notre tâche quotidienne » (« Notre tâche du jour était faite ») ;
LV
: « Ton
cœur est languissant encore et tes yeux sont ensommeillés » (« La langueur pèse sur ton cœur, encore et l’assoupissement sur
tes yeux »), etc. Gide indique des hésitations, soit par des points d’interrogation, soit plus explicitement : « à retraduire ». La
plupart des poèmes sont marqués, en haut à gauche par « bon » ou « b », suivi de « D » ou « R » (dactylographier, revoir ?).
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