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« Fulminant toutes les doutes de l’esprit moderne
sous une forme moderniste... »
236. STRINDBERG
(August). 8 lettres et cartes autographes signées, en français, [au critique et directeur de la revue
Le Monde poétique,
Léon Roger-Milès]. 25 février 1884-1
er
juin 1885.
1 000 / 1 500
Très belle correspondance littéraire du grand écrivain suédois
alors installé en Suisse après avoir quitté son
pays où il était en butte aux critiques.
– Ouchy (canton de Vaud, en Suisse),
25
février
1884
:
«
... Je prends la liberté d’entamer une correspondance sur
votre collaboration de mon drame
[
La femme de sire Bengt
]
que vous avez eu la bonté de lire.
Premièrement, je me
fie à votre jugement éclairé pour ce qui concerne de la mettre en vers, quoique la pièce est une sorte d’opposition
contre le romantisme. Mais il y a aussi des changements que je trouve nécessaires pour des oreilles françaises. Je
veux parler des noms barbares et difficiles à prononcer.
Ainsi, Marguite se change en Margot, Bengt en Bénédict,
Mette en Marthe, Kerstin en Christine. Mais je vous laisse la plus parfaite liberté de les changer en noms avec plus
d’accent français et plus applicables à la scène.
Si vous trouvez le costume et les mœurs suédoises un peu étranges
pour le sens français, on pourrait très facilement, avec un trait de plume, remettre le drame en Flandres ou en
Suisse,
pays plus sympathiques et connus pour vos compatriotes, la Réforme étant de la même nature dans tous ces
pays et la clôture des couvents étant le point capital. En ce qui concerne la construction du drame.
Je voudrais proposer
une correction que j’ai trouvé nécessaire après la représentation de la pièce à Stockholm. La dernière acte est divisée
en deux scènes (tableaux). Voilà une grave erreur,
qui soit facile à refaire. Eh bien, je propose qu’on laisse Sir Bengt
entrer à la fin du premier tableau du cinquième acte et trouve Margot évanouie sur le plancher où elle est tombée
après la sortie du confesseur. Mais le confesseur sera donc obligé de courir à la maison pour chercher chez soi (et pas
dans le bois) une
flacon
qui contient l’antidote (et point des herbes). Or, le dialogue devient le même qu’auparavant
excepté ce qui concerne l’enfant...
»
– Ouchy,
9
mai
1884
. Il traite de sa participation à la diffusion de la revue
Le Monde poétique
en Scandinavie : «
... À
titre de rédacteur, je me trouve, naturellement empêché de faire faire mon apologie comme poète. Mais pour m’en
dédommager et pour soutenir ma position comme juge souverain, je pense nécessaire de me faire connaître sitôt que
possible dans votre littérature. Pour ce but, j’ai déjà pris mes mesures pour faire traduire un poème moderne qui viens
de brusquer mes chers compatriotes. Je vous remets ci-joint un exemplaire que je vous prie de passer aux mains de
M. Léoson Le Duc, l’un des deux Parisiens qui sachent lire notre langue (l’autre est M. Xavier Marmier)
[les écrivains
Louis-Antoine Léouzon Le Duc et Xavier Marmier, qui tous deux voyagèrent dans les pays scandinaves]
.
Il me serait
utile d’avoir de ses opinions sur cette pièce qui joue à demi à Paris, à demi à Stockholm, et intitulée
Nuits de
somnambule
traitant toutes les matières entre le ciel et la terre et encore un peu plus, “fulminant toutes les doutes
de l’esprit moderne sous une forme moderniste”
[pièce de Strindberg, intitulée
Nuits de somnambule par jours
éveillés
]
...
»
– Paris,
29
mai
1885
:
«
... Je vous ai envoyé un exemplaire de
Les Mariés
[une de ses pièces]
. En dépit de votre offre
si généreusement présentée de bien vouloir retoucher le texte pour la seconde édition, je n’ai pas voulu l’accepter qu’à
condition que votre travail fût largement rémunéré... Je vous promets de ne point impliquer votre nom en cas d’un
bruit fâcheux éveillé par les hardiesses du livre...
Je veux prendre chez votre concierge le manuscrit de Lycko-Per
[la
pièce de Strindberg
Lycko-Pers resa
]
que je compte voir imprimé dans un recueil...
Si vous trouvez par hasard dans
les journaux des critiques sur
Les Mariés
,
ayez la bonté de me les remettre coupées, quelque grossières qu’elles
soient...
Je vous prie en même temps, afin que je puisse présenter un exemplaire à M. Zola,
de bien vouloir me
donner le numéro de la rue de Boulogne, que j’ai oublié...
»
– Paris,
1
er
juin
1885
: «
Merci de votre aimable ! qui vient me trouver enseveli dans des pensées noires. Pour vos
bienveillantes intentions au sujet de mon livre , je vous remets cinq exemplaires destinés aux amis inconnus ou les
collègues du
Monde poétique.
J’ai vraiment besoin de votre secours puis que les ennemis trop nombreux et que je
suis oppressé par la lutte...
»
Joint,
une lettre autographe signée de Siri Van Essen, épouse d’August Strindberg, sur le procès concernant celui-ci au
sujet de son œuvre
Les Mariés.




