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les collections aristophil

littérature

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VOLTAIRE (1694-1778).

Lettre dictée, [Ferney] 6 novembre 1770, au marquis de

Voyer d’ARGENSON ; 3 pages in-4 (petit trou).

1 000 / 1 200 €

Belle lettre de discussion philosophique

.

[Marc-René, marquis de Voyer d’ARGENSON (1722-1782), après une

brillante carrière militaire, était alors commandant en Saintonge,

Poitou et Aunis ; il protégeait, en son château des Ormes, les travaux

philosophiques de son bibliothécaire Dom Deschamps, partisan d’un

athéisme éclairé, et entretint à ce sujet avec Voltaire une correspon-

dance philosophique.]

« Auriez-vous jamais, Monsieur, dans vos campagnes en Flandre et

en Allemagne, porté les Satires de Perse dans votre poche ? » Il en

cite un vers curieux, qu’il traduit librement : « Il ne s’agit que d’une

bagatelle : que pensez-vous de Dieu ? Vous voiez que l’on fait de

ces questions depuis longtems. Nous ne sommes pas plus avancés

qu’on était alors. Nous savons très bien que telles et telles sottises

n’existent pas, mais nous sommes fort médiocrement instruits de ce

qui est. Il faudrait des volumes, non pas pour commencer à s’éclaircir,

mais pour commencer à s’entendre ; il faudrait bien savoir quelle

idée nette qu’on attache à chaque mot qu’on prononce. Ce n’est pas

encor assez, il faudrait savoir quelle idée ce mot fait passer dans la

tête de vôtre adverse partie. Quand tout cela est fait, on peut disputer

pendant toute sa vie sans convenir de rien. Jugez si cette petite

affaire peut se traitter par lettres. Et puis vous savez que quand deux

ministres négocient ensemble, ils ne disent jamais la moitié de leur

secret. J’avoue que la chose dont il est question mérite qu’on s’en

occupe très sérieusement ; mais gare l’illusion et les faiblesses. Il y a

une chose peut être consolante, c’est que la nature nous a donné à

peu près tout ce qui nous fallait, et que si nous ne comprenons pas

certaines choses un peu délicates, c’est aparemment qu’il n’était pas

nécessaire que nous les comprissions. Si certaines choses étaient

absolument nécessaires, tous les hommes les auraient comme tous

les chevaux ont des pieds. On peut être assez sur que ce qui n’est

pas d’une nécessité absolue pour tous les hommes en tous les temps

et dans tous les lieux n’est nécessaire à personne. Cette vérité est un

oreiller sur lequel on peut dormir en repos, le reste est un éternel

sujet d’arguments pour et contre »...

Wagnière signe pour Voltaire : « Le vieux malade ».

Correspondance

(Pléiade), t. X, p. 467.

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VOLTAIRE (1694-1778).

MANUSCRIT autographe,

Precis du livre de Dumarsai

qu’il faut refuter

 ; 1 page in-4.

4 000 / 5 000 €

Notes philosophiques sur la religion, qui semblent inédites

.

Ces notes sont écrites dans la partie gauche de la feuille. Le titre

« precis du livre de Dumarsai qu’il faut refuter » figure dans la

marge droite du feuillet ; il s’agit probablement de l’

Examen de

la religion

attribué à César DUMARSAIS (1676-1756). En haut à

gauche, Voltaire a noté le nom : « Abadie » [le théologien pro-

testant Jacques ABBADIE (1654-1727), plusieurs fois pris à partie

dans l’

Examen important de Milord Bolingbroke

(1767)].

« Pourquoy ce qui était permis à Simmaque [Symmaque] ne le

serait-il pas aujourd’hui.

On ecrivait contre la nouvelle secte, on peut de meme contre

la secte vieillie.

Les romains adoraient un seul dieu et des dieux secondaires ainsi

les cretiens. Ils avaient la meme morale. Mais les cretiens apor-

terent une metaphisique absurde. Il est permis de la trouver telle.

C’est rendre service au genre humain que d’acoutumer les peuples

a penser que le pape n’est pas Dieu qu’il ne doit pas commander

aux rois qu’un moine ne doit pas etre prince etc. »

Puis il dresse une liste :

« misteres tous absurdes

fondements tous ruineux

profetes – ridicules

miracles contes.

Si elle etoit vraie faudrait il des boureaux pour la soutenir –

exemples

Elle n’a fait que du mal.

C’est à son principe qu’il faut s’en prendre.

Tu crois en Dieu par Mahomet par Confucius par Numa, eh que

ne crois tu en Dieu par toy meme ».

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NON VENU

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VOLTAIRE (1694-1778).

L.S. « Voltaire gentilhomme ordin

re

du Roy », « au chateau

de Ferney, païs de Gex » 17 juin 1771, [à Pierre-Étienne de

BOYNES] ; 3 pages in-4.

1 200 / 1 500 €

En faveur des horlogers de Ferney

.

[Pierre-Étienne Bourgeois de BOYNES (1718-1783) avait succédé au

duc de Praslin au ministère de la Marine et des Colonies.]

« Mgr le Duc de Praslin sachant que j’avais fondé dans mon village de

Ferney une colonie des meilleurs artistes de Genêve en horlogerie,

lui accorda toute la protection que les autres ministres lui donnaient.

Il commanda qu’on tint prêtes quelques montres, dont je crois qu’il

voulait faire des présents aux puissances d’Afrique. J’ose implorer

pour cette fabrique utile les mêmes bontés de vôtre part. Nos artistes

travaillent d’ordinaire à un tiers meilleur marché qu’à Paris, et plusieurs

horlogers même de Paris prennent chez eux des ouvrages auxquels ils

mettent leur nom. C’est une chose assez singuliere que ces nouveaux

sujets du Roi, qui travaillent dans un village depuis quinze mois, aient

déja fourni assez amplement l’Espagne, Constantinople, la Russie et

la Hollande. Ils font entrer de l’argent en France, ils ont vivifié une

petite province aussi pauvre qu’ignorée, et par là ils méritent votre

proteection »...

Ancienne collection du comte Luigi CIBRARIO (Turin).

Correspon-

dance

(Pléiade), t. X, p. 737.

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