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les collections aristophil

638

ALEXANDRE II

(1818-1881) Tsar de Russie.

5 L.A., [Saint-Pétersbourg] 1868-1869, à Catherine

DOLGOROUKI (Katia) ; 21 pages in-8 ; et 5 L.A. de Katia

DOLGOROUKI à ALEXANDRE II, novembre-décembre 1871 ;

4 pages in-8 chaque ; en français.

5 000 / 7 000 €

Belles lettres d’amour fou à Katia, avec cinq lettres d’elle

.

Cet ensemble regroupe cinq lettres de la correspondance amoureuse

du Tsar Alexandre II à Catherine (Katia) DOLGOROUKI (1847-1922),

témoins de cette extraordinaire histoire d’amour. Leur liaison débuta en

1866. Elle avait dix-huit ans, lui quarante-sept. En 1870, l’installation de

Katia dans une chambre du Palais d’Hiver, au-dessus des appartements

impériaux où résidait la Tsarine Marie Alexandrovna, fit un énorme

scandale à la Cour. En 1872, elle lui donnait un fils, Georges, puis

deux filles, Olga et Catherine. La Tsarine, depuis longtemps souÀrante,

mourut le 3 juin 1880, et quarante jours seulement après sa disparition,

Alexandre fit de Catherine son épouse morganatique, lui conférant

le titre de Princesse Yurievskaya. La vie légitime du couple fut de

courte durée, car le Tsar fut victime d’un attentat à la bombe le

13 mars 1881. Ramené mortellement blessé au palais, il agonisait

quelques heures plus tard dans les bras de Katia. Devenue veuve,

la princesse Yurievskaya s’exila en France à Nice, où elle mourut

en 1922, emportant avec elle sa précieuse correspondance que le

nouveau Tsar Alexandre III avait tenté de récupérer pour la détruire.

Les lettres sont numérotées, et portent la date et l’heure, comme

un journal de conversation. Elles sont rédigées principalement en

français, avec quelques phrases en russe généralement dans l’alphabet

latin, et un vocabulaire secret (comme les

bingerles

désignant leurs

ébats érotiques). Par mesure de sécurité, elles ne comportent pas le

nom de Catherine et ne sont pas signées. La formule finale en russe :

«

мвойн на всегда

» (à toi pour toujours), tient lieu de signature. En

tête des lettres de Katia, Alexandre II a inscrit la date de réception.

Alexandre II

Lundi 19 février/2 mars 1868, à 3 ½ h. après-midi – Mardi

20 février/3 mars, à 9 ½ h. du matin

« N° 48 » (5 pages). « Je rentre

tout imprégné comme toi, cher ange adoré, de notre bon soleil et

nous pouvons nous adresser la même question : qu’avons-nous

fait l’un de l’autre ? Car nous devenons tous les jours plus foux l’un

de l’autre. Oh ! que tu m’as rendu heureux en venant au jardin, où

il y a déjà plus de deux ans de cela que nous avons commencé à

nous sentir attirer l’un vers l’autre, sans nous rendre compte de ce

que nous éprouvions et sans nous douter qu’alors déjà nous nous

aimions d’amour ! comme nous nous le sommes avoués seulement

le 1 Juillet

[1866]. Et depuis ce jour nous nous sommes faits cadeau

réciproquement de nos cœurs, qui n’en forment plus

qu’un

. Tu ne te

doutais pas toi même de la preuve d’amour que tu m’as donné dès

le premier soir et ce n’est que plus tard que je suis parvenu à te le

faire comprendre et tu te rappeleras de tous les combats que je me

livrais à moi même, pour ne pas agir, comme j’ai pourtant fini par

le faire, pour ainsi dire malgré moi. Et maintenant nous en sommes

également heureux et n’en avons pas de remords, parce que nous

l’avons fait par amour et sentons que c’est devenu un

lien sacré

entre

nous, pour toute notre vie. […] Oh ! mon Ange, j’ai une telle râge de

faire bingerle, depuis nos rencontres, que je ne sais que devenir et

j’ai senti que cela se mouillait chez moi en traîneau après que nous

nous séparâmes près du pont. […] J’ai besoin de me retremper en

toi. […] Oh ! merci de me dire que tu sens que c’est

toi seule

qui me

rattache à la vie et que tu te sens aimée avec la même passion que

toi tu m’aimes. [...] Hélas ! nous devrons patienter jusqu’à demain

soir, mais aussi je prévois avec quelle rage nous nous précipiterons

l’un sur l’autre »...

Mardi 20 février/3 mars 1868, à 4 ¼ h. après midi – Mercredi 21

février/4 mars, à 9 ½ h. du matin

« N° 49 » (4 pages). « Oh ! mon Ange,

ce serait vraiement vilain à toi si tu osais douter encore de l’être qui

t’appartient corps et âme et pour lequel

tout

se concentre

en toi

. Tu

as dû voir, dans l’expression de mes yeux, pendant nos rencontres

de tantôt, ce qui déborde de ce cœur qui est et restera

ton bien

à

tout jamais et qui ne respire que par toi. [...] Maintenant j’ai déjà la

fièvre d’impatience de me trouver

дома

[chez nous] et oublier tout,

excepté le bonheur de t’appartenir corps et âme. J’ai une telle rage

de faire bingerle, que je ne sais que devenir ! »... À 11 ½ h. du soir.

« Je me sens encore tout imprégné de notre bonne soirée et de

nos bingerles délirants, qui

nous

ont fait jouir comme des foux. Je

vois encore l’expression de tes adorables yeux et j’entends les sons

que tu poussais,

пока я гулял в тебя

[pendant que je me promenais

en toi]. Malgré que tu avais commencé par être un peu capricieuse

et méchante, ton cœur, c.a.d. le mien, a pourtant fini par fondre

sous mes caresses et mon vilain lutin est redevenu ce qu’il est

véritablement, aussi je ne me rappèle que des bonnes paroles de

mon ange adoré et je les entends encore résonner à mes oreilles,

comme pendant les chers moments où nous étions couchés dans

les bras l’un de l’autre. Oh ! que j’aime nos bonnes conversations,

qui suivent ordinairement nos bingerles et c’est comme cela que

nous nous serions retrouvés tous les soirs dans

notre lit

, si Dieu

nous accordait un jour le bonheur que nous rêvons. Demain hélas !

ce sera une journée bien triste pour nous, car nous serons privés

du bonheur de nous voir, ce qui est devenu pour nous un besoin

de cœur et constitue notre véritable vie. Je veux que tu saches que

cela déborde chez moi plus que jamais et que tu n’oublies pas que

tout

se concentre pour moi en toi »...

Mercredi 1/13 Janvier 1869 à 10 ½ h. du matin – Jeudi 2/14 Janv. à 8 ½ h.

du matin

« N° 2 » (4 pages). « Quelques mots seulement, avant d’aller

à la messe, pour te dire, cher ange de mon âme, que ton adorable

lettre, achevée ce matin, m’a rendu à la vie et inondé de notre bon

soleil. Je t’aime, me sens aimé et suis heureux de t’appartenir, à toi

seule, devant Dieu pour toujours »... À 4 h. après midi … «

tout

se

concentre pour moi

en toi

, mon adorable petite femme devant Dieu.

J’ai senti que nos pensées et prières étaient les mêmes pendant la

messe et j’espère que Dieu ne nous abandonnera pas et ne nous

refusera pas Sa bénédiction. En rentrant tout rempli de soleil, j’ai dû

encore achever des paperasses et répondre à une quantité de télégr.

et veux me coucher, car j’avoue que je n’en peux plus. Je voudrais

que tu puisses aussi dormire un peu et nous retrouver ce soir tous

les deux reposés [...] À 11 ½ h. du soir. « J’espère que mon adorable

petite femme aura gardé la même bonne impression de notre chère

soirée que son mari […] je veux qu’elle sache que nos bingerles l’ont

fait jouir de nouveau jusqu’au délire. […] J’ai paru au thé avec un

appétit dévorant, que je n’avais nullement eu à dîner et après avoir

achevé une partie de mes paperasses, je viens de rentrer d’un tour

en traîneau en passant devant tes fenêtres et en soupirant de n’avoir

pas pu le faire ensemble »...

Jeudi 23 Janvier/4 février 1869, à midi – Vendredi 24 Janv./5 Févr. À

8 h. du matin

« N° 24 » (4 pages). « Ta chère lettre, achevée ce matin,

m’est parvenue à 11 h. et m’a inondé comme toujours de notre bon

soleil. Et comment faire, je ne puis me sentir heureux quand je me

sens aimé, comme moi je t’adore et qu’étant devenu la vie l’un de

l’autre, tout se concentre pour nous en nous. Cette absorbtion mutuelle

est notre trésor et notre soutient, dont nous avons tout le droit d’être

fier, car aucun couple dans ce monde ne sait apprécier comme nous

le bonheur de s’appartenir devant Dieu, comme mari et femme. [...]

Quand à ce que nous nous sentons tous les deux imprégnés de notre

soirée d’hier, cela ne peut plus nous étonner, ne formant,

en tout

qu’un seul être sacré devant Dieu »... Il s’habille pour « cet ennuyeux

bal »… Il écrit au retour du bal, puis le lendemain au réveil.

Samedi 25 Janvier/6 Février 1869 à 11 ¾ h. du matin – Dimanche

26 Janv./7 Févr. à 8 ½ h. du matin

« N° 26 (4 pages). « Oh ! merci,

merci, mon Ange, pour ton adorable lettre de ce matin, qui m’a

inondé de soleil et où j’ai retrouvé plus que jamais le reflet de

notre