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Auguste RENOIR

Rencontré en 1907 par l’intermédiaire de leur ami commun le peintre Albert André, Auguste Renoir se prendrait

d’amitié pour Élie Faure, avec qui il partageait des convictions comme la notion d’authenticité en art (ce que

rapporterait plus tard le cinéaste Jean Renoir, fils du peintre). Élie Faure consacra plusieurs articles à Renoir, de

1919 à 1921, un chapitre du volume

L’Art moderne

de son

Histoire de l’art

, en 1921, et préfaça en 1925 le catalogue

de la célèbre collection Gangnat, une des plus importantes d’œuvres de Renoir. Il intégra certains de ses articles

dans ses recueils

L’Arbre d’Eden

(1922) et

Ombres solides

(1934). Surtout, Élie Faure joua un rôle important dans

la réévaluation du style de la dernière période de Renoir, plus nourri de références classiques et qui heurta le public.

Il préfaça ainsi le catalogue de l’exposition « Les dix dernières années de Renoir », organisée chez Paul Rosenberg

en 1933.

Renoir aux Collettes :

« Tout pousse, c’est la corne d’abondance... »

95. RENOIR

(Auguste). Lettre autographe signée en deux endroits, «

Renoir

» et «

R.

», adressée à Élie Faure. Cagnes-

sur-Mer, 31 mars 1914. 2 pp. in-12, enveloppe.

1 000 / 1 500

«

Cher docteur, je serais très heureux de vous voir à Cagnes

où je resterai jusqu’à mon retour, mais le voyage entre

Cavallère et Cagnes est si difficile que réellement je n’ose vous y engager.

Je serais content de pouvoir bavarder un peu avec un Parisien,

mais je ne sais si je dois le désirer, à cause de la peine

que cela vous donnerais. J’ai lu votre lettre avec plaisir, lettre pleine d’amitié et de bons souvenirs. Enfin, on verra. Bien

amicalement à vous et aux amis...

P.S. Temps superbe, tout pousse, c’est la corne d’abondance...

»

Auguste Renoir avait découvert Cagnes-sur-Mer en

1898

, et, enchanté, y était venu régulièrement avant d’y acheter

le domaine des Collettes en

1907

. Il y passa les hivers, aimant à s’occuper du jardin où il cultivait des rosiers, des

orangers – Claude Monet lui offrit d’ailleurs des soleils pour ce jardin. Bien qu’il s’y sentît parfois un peu abandonné

de ses amis parisiens, Renoir y travailla fructueusement à son art jusqu’à sa mort.

Inquiet pour son fils Jean dans le tourbillon de la guerre

96. RENOIR

(Auguste). Lettre signée «

Renoir

» à Élie Faure. Cagnes-sur-Mer, «

1

er

novembre

» [1915]. 3 pp. in-12,

enveloppe.

1 000 / 1 500

«

Mon cher Monsieur Faure, Jean a été trouvé apte par la dernière commission à Nice et va probablement retourner

d’ici peu au front,

d’après ce que lui a dit son commandant.

Lui trouve cela tout naturel mais moi je suis obligé de ne pas être du même avis.

Un alpin a surtout besoin de ses

jambes, et comme il n’en a pas, il ne pourra rendre aucun service. Il a fait une demande pour entrer dans les

automitrailleuses où les jambes sont inutiles. C’est moins glorieux mais plus logique.

Je vous demanderai si, dans vos connaissances, vous ne connaissez pas personne qui puisse appuyer cette demande.

Cette demande a été faite au ministre par Jean, le 27 septembre. Mon ami Rivière

[le critique d’art Georges Rivière]

,

que vous devez connaître, l’ayant vu à l’atelier, a dû s’en occuper, connaissant M

r

Thomas, sous-secrétaire d’État aux

munitions, mais je ne sais pas s’il y a donné suite. Il habite 205bis Bd Raspail.

Excusez-moi de m’adresser à vous, mais je suis très ennuyé, et dans ces cas-là, il faut embêter les amis.

“Heurtez et

on vous ouvrira” a dit le sieur Jésus-Christ. À vous...

»

Futur cinéaste de

La Grande illusion

(1937), Jean Renoir

embrassa d’abord la carrière militaire : entré comme

élève officier à l’école de cavalerie de Saumur, en

1913

, il débuta la guerre dans les Dragons, avant d’être envoyé au

front dans le corps des Chasseurs alpins. Il fut blessé deux fois aux jambes, en octobre

1914

et en avril

1915

, mais, à

nouveau déclaré apte malgré des séquelles physiques, il demanda à servir dans les automitrailleuses, ce qui lui fut

refusé, puis dans l’aviation ce qui lui fut agréé : après une période de formation dans les écoles de l’air d’Ambérieu-en-

Bugey et de Châteauroux, il revint au front et y acquit le grade de lieutenant en novembre

1917

. Démobilisé en

1919

,

il quitta alors l’armée.