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98

256

Marcel JOUHANDEAU

.

M

anuscrit

autographe,

XXII

e

Journaliers. Parousie. Marcopédie

,

février 1967-juillet 1968 ; 1146 pages in-8 sur papier quadrillé

de classeur perforé, en 6 liasses (laine bleue ou ficelle), sous

6 chemises titrées et numérotées avec 4 signets cartonnés

étiquetés.

M

anuscrit

complet

de

P

arousie

,

tome

XXII

des

J

ournaliers

(Gallimard, 1975)

consacré

au

petit

M

arc

.

Ce tome des

Journaliers

va du 20 février 1967 au 6 juillet 1968

(ou peu après), et commence au moment où le bien-aimé

« petit-fils », Marc (fils de Céline Ronseaux, qui avait été élevée

par les Jouhandeau comme leur fille), entre dans le foyer des

Jouhandeau [l’adoption de l’enfant, né le 13 décembre 1962,

sera confirmée par les tribunaux en octobre 1970]. Y sont

recueillis les mots de l’enfant, les joies, tristesses, craintes

et puérilités du grand-père (Pépé), ses relations toujours

tumultueuses avec la terrible Élise, ses ennuis avec Céline,

mais aussi des réflexions sur la sexualité, la vieillesse, la

mort, des souvenirs de Guéret, des bribes de dialogues, les

événements de Mai 68, et des reflets et échos de ses activités

littéraires : le contrat d’édition qui le « ruine », ses rapports

avec la maison Gallimard, une tournée de conférences en

Allemagne, des relations avec Louise de Vilmorin, Roger

Peyrefitte, Ernst Jünger, André Gide, Jean Cocteau, Roland

Dorgelès, Marcel Pagnol, Louis Aragon, Michel Leiris, Valery

Larbaud…

Parfaitement lisible, rédigé d’après les carnets « 123 » à « 138 »

dont Jouhandeau note les numéros, ce

manuscrit

de

travail

présente de

nombreuses

correction

et

additions

, avec aussi

des passages supprimés cancellés ou biffés, et des variantes

avec le texte définitif. Jouhandeau l’a classé en six parties,

liassées, chaque liasse paginée séparément au crayon rouge,

correspondant à la division du livre : 1 Février-avril 1967 (174

pages), 2 Avril-mai 1967 (197 p.), 3 Mai-juillet 1967 (159 p.), 4

Juillet-novembre 1967 (181 p.), 5 Novembre 1967-avril 1968

(269 p.), et 6 Mai-juillet 1968 (169 p.). Certaines pages sont

des mises au net insérées tardivement, que l’auteur n’a même

pas chiffrées. Chaque liasse est rangée dans une chemise

cartonnée rouge (la 6

e

jaune), portant le titre :

XXII

e

Journaliers.

Parousie. Marcopédie

 ; le livre sera publié sous le seul titre de

Parousie

, mettant bien en évidence cette seconde naissance

que fut pour Jouhandeau l’entrée du petit Marc dans son

existence.

« 20 Févr. 67. Dernier matin où nous nous réveillons sans

enfant, sans l’enfant dont la présence va tout changer dans

cette maison. […] En l’honneur de cet avènement, j’ai chanté

ce matin à l’harmonium un Magnificat de ma façon »…

« 22 Fév. 67. […] Cette journée d’hier a été idyllique. Était-ce

à mes yeux seulement ? Cet enfin a un charme divin. Je n’ai

pas assisté à ses premières réactions, quand on lui a annoncé

qu’il allait quitter sur-le-champ l’Hôpital pour toujours. Chargé

de multiples démarches auprès de l’administration, je courais

d’un bureau à l’autre, pour obtenir, comme on dit à propos

des prisonniers, la levée d’écrou. Il paraît qu’à la vue d’Élise,

quand on lui a dit qu’il allait partir, abandonner ses camarades,

il a éclaté en sanglots. Simple formalité du cœur peut-être, qui

a sa politesse, son savoir-vivre. Bien vite, quand je suis entré

avec sa tante Monique dans le dortoir, il a souri à l’idée de me

suivre, que j’étais là et à l’aventure qui l’attendait »…

Le livre s’achève sur une évocation de Limoges (le manuscrit

diffère du texte publié) : « Limoges est pour moi une ville

sainte, la plus sainte après Chaminadour. Dans mon enfance

quel prestige exerçait l’évêque ! et c’est là qu’il résidait. La

branche de ma famille maternelle qui habitait cette ville était

d’un pittoresque achevé. […] Le carmel de cette ville où les

deux meilleures amies de ma jeunesse avaient pris le voile,

avant de renoncer au cloître, m’inspirait un respect qui ne se

dément pas. La grande S

te

Thérèse et S

t

Jean de la Croix ont

passé par là pour me trouver. Sans eux je ne serais pas qui je

suis. Reste que j’ai brûlé pour ma cousine Amélie, aussi belle

que Gabrielle d’Estrées qu’elle croyait son aïeule. Et toujours je

me vois, je me verrai jusqu’à neuf ans accompagnant dans son

voyage annuel Tante Alexandre qui au temps de Pâques allait

se pourvoir de fleurs Place des Bancs. Dans cette capitale du

diocèse et de mon cœur ».

2 000 / 3 000

257

Marcel JOUHANDEAU

.

L.A.S. « Marcel », 7 juillet 1951, [à Robert

C

oquet

] ; 2 pages

in-8.

B

elle

lettre

d

amour

à

son

amant

,

héros de

Du Pur Amour

et de

L’École des garçons

. [Né en 1928, Robert Coquet, pianiste et

clarinettiste, entretint une liaison avec Jouhandeau dès 1948,

et pour environ dix ans ; Coquet se maria en août 1951.]

Jamais il ne fut plus heureux qu’hier soir, à l’Opéra, en le

contemplant, en regardant son visage : « Mon amour. […]

Jamais tu n’avais été, jamais tu ne seras plus beau qu’hier soir

pour moi seul. Et tu auras beau faire, tu auras beau te marier,

tu auras beau connaître d’autres êtres, d’autres amours,

personne jamais ne t’aura possédé comme moi, hier soir,

sans seulement te toucher. Posséder, c’est aimer à la vie à la

mort, sans réserve ni retour, c’est se sentir déjà mort sous les

pieds de celui qu’on aime. C’est avoir tout reçu de lui, tant reçu

qu’on ne lui demande plus rien, qu’on n’exige même plus de

lui sa présence. Je t’aimais tellement que j’avais besoin d’être

seul. Que tu t’éloignes ou que tu restes, désormais ton Visage,

comme je l’ai vu hier soir deux ou trois fois, brille au-dessus de

moi. Éternellement il éclairera ma Nuit. Et tu auras beau faire et

j’aurai beau faire, je te suis plus nécessaire que toi-même et tu

m’es plus essentiel que moi. Voilà notre Amour »…

500 / 700