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« “
Camarades... c’est directement du sang de Ferrer que surgissent tous les monuments à sa mémoire.
Ce sang
généreux mué en or d’offrande. Je n’y veux pas puiser, je ne veux de paiement aucun, ainsi que j’eus l’honneur de vous
l’écrire en octobre 1909.
J’offre de nouveau de mettre en état mon projet en travail d’un monument à Ferrer, mais, ce
projet-là qui en ma pensée est avant tout un acte de foi, je le veux laisser absolument gratuit
et absolument en
dehors de tout concours, de tout jury... Camarades, de toute manière, mon projet paraîtra et sera répandu, je n’ai donc
aucune sorte d’avantage à vous en faire don ici. Je tiens à souligner cela, car mon projet se fait et je le répandrai
largement, en don aux amis, aux artistes du pays et des autres nations.
C’est simplement que pour Francisco Ferrer,
pour sa cause, mes droits d’artiste s’effacent devant mes convictions d’homme. Je demeure toujours avec le même
émotion profonde qu’au lendemain du drame...”
Voilà, cher ami Faure, ce que j’ai bâclé et envoyé à la Ligue des droits Homme et citoyen.
Ils m’ont fait le grand
honneur de m’élire pour être l’un des concurrents pour un projet de monument. Il y a Maillol, Bloche et Lefèvre, bibi,
E. Desré, Loriaud, Séraphin, Véra Tchérémissinof, Malric.
Je ne mange pas de cette cuisine : pas de concours, ils
doivent faire confiance à quelqu’un et voilà, le concours c’est réactionnaire.
Ô ! Ligue des droits de l’Homme...
J’aime
mieux, à mon temps, à l’idée de ma tête et de mon cœur, faire un Ferrer pour moi. S’il y a de la flamme, il ira vivant
par le monde.
Tout est là. Je me refiche de tous leurs moyens d’école. Je demeure isolé. Tant mieux !...
Allons assez bien. Et vous et les vôtres ?
Venez, on causera, et bientôt buste en chantier
[le buste de l’écrivain
Charles-Louis Philippe
, mort en
1909
, qui fut installé à sa mémoire en
1911
dans son village natal de Cérilly]
.
À vous, aux autres...
»
Antoine Bourdelle dessina vers
1908
un portrait de la fille d’Élie Faure, Marie-Zéline, dite Zizou.
« Vous voyez les choses et vous raisonnez après.
Il y a tant de gens qui font le contraire... »
15. BONNARD
(Pierre). Correspondance de 5 lettres autographes signées à Élie Faure. 1918-1926. 4 enveloppes
conservées.
600 / 800
Éloges des ouvrages d’Élie Faure.
– Paris,
31
mars
1918
.
«
Je viens de terminer la lecture de votre livre
La Sainte Face
[souvenirs et réflexions sur son
expérience de la guerre comme médecin militaire, paru en
1917
]
. Combien je vous envie d’avoir vécu le grand drame.
Tout au moins vous aurez été pour ceux qui n’en ont pas été, un témoin sincère clairvoyant en qui on a tout de suite
confiance.
Vous voyez les choses et vous raisonnez après. Il y a tant de gens qui font le contraire...
»
– Paris,
29
décembre
1921
. «
Vous m’envoyez des étrennes tout à fait de mon goût.
Je vais donc avec vous confronter
tous ces monuments de pays si différents – quelle bonne leçon
[Élie Faure publia plusieurs ouvrages en
1921
]
. Merci
et sincère amitiés et souhaits...
Je n’ai pas encore déposé mon tableau chez Rosemberg. J’y fais encore de petites
retouches mais il est prêt...
»
– Paris,
18
avril
1922
.
«
Merci, cher ami, pour votre volume de L’Art renaissant
[troisième volume de son
Histoire de
l’art
, probablement dans la seconde édition augmentée de
1921
]
que je vais relire, je l’ai feuilleté – très bonne idée de
reproduire des fragments d’œuvres...
»
– Villa « Le Rêve » à Cannes,
7
février [
1926
]. «
Merci pour l’envoi de votre nouveau livre
[
Montaigne et ses trois
premiers-nés : Shakespeare, Cervantès, Pascal
]
.
J’aime beaucoup Montaigne et j’apprécie la place que vous lui faites
dans le monde.
Je suis comme tous les hivers dans le Midi où l’on travaille et où on lit...
»
Joint,
des notes autographes d’Élie Faure concernant la réédition d’un de ses ouvrages, probablement
L’Art renaissant
en
1921
.
« C’est directement du sang de Ferrer
que surgissent tous les monuments à sa mémoire... »
16. BOURDELLE
(Antoine). Lettre autographe signée en deux endroits, «
E. A. Bourdelle
» et
« Bourdelle
». Paris,
16 janvier 1910. 2 pp. in-4.
800 / 1 000
Sur un projet de monument en mémoire de l’anarchiste Francisco Ferrer
(
1859
-
1909
) qui avait été condamné
à mort et exécuté en octobre
1909
à la suite des émeutes ouvrières de Barcelone («
semana trágica
») – auxquelles il
n’avait pas participé mais dont il avait été jugé responsable moralement en raison de son action militante de longue
haleine. Le sort de cet intellectuel qui avait été un temps exilé à Paris, avait mobilisé des intellectuels français comme
Anatole France ou Élie Faure, au sein d’un comité de soutien.




