39
– S.l., [
1904
].
«
C’est un livre magnifique, mon cher ami, que celui que vous avez écrit sur Vélasquez.
Je viens
seulement de le lire et je tiens à vous dire mon enthousiasme. Je veux croire que vous me supposez incapable d’une
basse flatterie. Vous pouvez être fier de cette étude si compréhensive, si humaine, tellement au-dessus d’une simple
“critique d’art”. C’est de la vie que vous étudiez à travers l’âme du grand peintre ;
comme j’aime ce souci que vous
avez eu de montrer un homme, tout près de nous, pas un dieu, un pauvre bougre d’homme qu’on peut, enfin, non
plus idolâtrer, mais aimer
et qui ne vous intimide pas avec son auréole. Et pourtant vous avez su éviter l’anecdote
puérile, aussi bien que le cours du professeur d’esthétique.
Je crois bien que vous êtes le seul qui parliez de l’art comme
on parle de la vie.
On a fait de l’art un paradis. Mais ce paradis-là et comme l’autre, le grand, il est temps de le
remettre sur terre. Et comme on comprend mieux l’art quand, comme vous, on comprend et on aime la vie. Vous avez
pu dire sur Vélasquez des choses jamais dites et profondément vraies, qui n’ont
rien à voir avec le dilettantisme des
terribles “gents de goût”, des dangereux “amateurs d’art”...
»
– S.l., [
1906
, d’après une note postérieure d’une autre main]. «
... Comme il est dommage qu’il n’existe pas une revue
pour défendre les idées que vous exposez avec tant de netteté ; car
c’est
tout un programme que cette conception du
vandalisme révolutionnaire opposé au vandalisme conservateur. Et comme il serait intéressant de pouvoir dire,
affirmer, répéter, prouver que – contrairement à ce qu’on dit –
les révolutionnaires ne méprisent pas le passé, qu’ils
en sont les continuateurs respectueux et que la compréhension intelligente de la vraie
tradition
ne peut être que
révolutionnaire.
Ces idées ne sont
discutées
nulle part. Elles sont seulement attaquées, raillées, avec une parfaite
mauvaise foi, avec un jésuitisme ingénieux d’ailleurs et parfois talentueux par tous les catholiques de l’Occident et
d’ailleurs...
»
– Une lettre concernant les révolutionnaires espagnols des Asturies (s.l., vers
1934
), une lettre concernant un projet
d’exposition qu’Élie Faure voulait organiser à Alger, et pour lequel Francis Jourdain lui conseille de contacter les
architectes André Lurçat, Georges-Henri Pingusson, Robert Mallet-Stevens, Le Corbusier, Willem Marinus Dudok et
Jakobus Johannes Pieter Oud (s.l.,
22
janvier
1936
), etc.
Les dessins de Francis Jourdain représentent un peintre à son chevalet en extérieur, un détail champêtre,
et, pour les trois autres, des maisons campagnardes.
Reproduction page 47
64. LAPRADE
(Pierre). Lettre autographe signée à Élie Faure. S.l.n.d. 2 pp. in-8.
100 / 150
«
J’ai reçu votre beau livre qui m’a fait un vif plaisir. J’aime ce que vous dites et la façon dont vous l’exprimez.
J’arrive
d’un long voyage. D’abord Rome qui, avec le Palatin fleuri et son charme violent m’attire plus que tout.
Puis Naples,
avec son musée extraordinaire, et la vision de cette ville que je trouve dramatique. Je suis revenu par Marseille où j’ai
également travaillé. Je viens d’y louer une maison (du moins dans une campagne voisine)...
»
Peintre gracieux héritier du xviii
e
siècle et de l’impressionnisme corrigé par Cézanne, Pierre Coffinhal-Laprade dit
Pierre Laprade demeura en marge des courants avant-gardistes de son temps, à la manière de Pierre Bonnard. Pierre
Laprade peignit vers
1912
un portrait de la fille d’Élie Faure,
Zizou au piano.
« Revendiquer pour le peintre le droit à l’attitude poétique... »
65. LHOTE
(André). 4 lettres autographes signées. 1923, 1934 et s.d.
300 / 400
Peintre, critique et théoricien d’art érudit, André Lhote
joua un rôle important dans l’histoire du cubisme
français, par son travail et sa pédagogie. Il exerça une influence déterminante sur des artistes de la génération suivante
comme Alfred Manessier.
– Paris, s.d. « ...
Je pense que vous avez lu mes articles de
La Nouvelle revue française
. En écrivant le dernier, j’ai
beaucoup pensé à l’unique conversation que j’aie eu le plaisir d’avoir avec vous... en 1918.
Vous parlâtes de Renoir,
de son esprit et de sa finesse.
J’ai essayé d’utiliser ces souvenirs dans ce petit article sur le grand disparu, que l’on
essaie de faire passer pour un gâteux. Mais, vous me direz : “C’est une réponse de peintre que je désire”. Voulez-vous
me faire l’honneur de la venir prendre chez Druet
[la galerie parisienne d’Eugène Druet]
... ?
J’aimerais savoir ce que
vous pensez de mon travail, et si le respect que j’ai pour les impressionnistes (les vrais) est suffisamment avoué...
»
– S.l.,
14
mai
1923
.
«
Il y a bien longtemps que je voulais vous écrire pour vous remercier de la place que vous
m’accordez dans votre histoire de l’art contemporain
[
L’Art moderne
, quatrième volume de son
Histoire de l’art
, paru
en
1921
]
. Je vous affirme que seule la timidité m’en empêcha. Je serais très heureux de vous voir pour dissiper bien
des malentendus...
Je sais que je ne vous convaincrai pas, sur divers points, mais je pense cependant que revendiquer
pour le peintre le droit à l’attitude poétique est une entreprise qui ne peut trop vous déplaire...
– Paris,
4
mars
1934
. «
... Je me sens bien sincèrement indigne des compliments que vous me faites. La presse,
heureusement pour ma modestie, est là, pour me rappeler
la fragilité de ma position d’esthète amateur.
Vous me
feriez un immense plaisir en venant me voir un jeudi après-midi... Je viendrais bien chez vous (si vous me le
permettiez) mais je crois que l’on parle mieux
devant un chevalet
... J’aimerais bien vous dire
mes tourments
plastiques,etmonidéalcompliqué(quel’assurancefeintedemeschroniquesnedévoilepeut-êtrequ’imparfaitement...
»




