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BOSSUET (Jacques-Bénigne).

Consultations faites par Mme du

Mans auprès de Bossuet,

avec les réponses de ce dernier.

Sans lieu

ni date

[1697 ou 1698].

Pièce autographe à deux mains, signée “

Sr du Mans

” et “

J. Benigne E

de Meaux

”. 8 pages in-4.

Remarquable pièce autographe à deux mains : la spiritualité

catholique expliquée par Bossuet à sa dirigée.

Il est ainsi question de “communions fréquentes” :

Jay toujours de la peine sur mes communions frequentes par le peu de

profit que j’en fais, et je crains que les grands desirs que je sens d’en

approcher ne soit une tromperie du demon. Il y a quelques peres qui

disent qu’il ne faut pas sarreter a ses desirs et que ce sont des abus quand

le profit ne sensuit pas. St Grégoire, St Bernard, Gennande et le pere

Avila dans le livre de la tradition de l’église de Mr Arnauld ont ce

sentiment ; et que quand ST Paul n

[ou]

s dit de nous eprouver n

[ou]

s

memes pour ne pas boire et manger le pain celeste a notre condamnation

que cela ne sentend point des peches mortels seulement, mais aussi des

veniels.

[...]

et que cest recevoir JC indignement que de ne s’en pas

approcher avec assez d’attention et de révérence et q

[ue]

cest de ceux la

que lapostre dit qu’ils boivent et qu’ils mangent leur jugement.

Le profit n’est pas toujours aperceu : c’en est un de ne pas tomber plus

bas : je ne comprends pas le peche mortel dans ces chutes et je parle pour

ceux

[qui]

vivent bien dans la religion. Je conviens que lépreuve de St

Paul comprend mesme le peché veniel qui se fait avec attache et trop

deliberement

.

Je conviens de toutes ces maximes mais souvent on les applique mal :

l’amour et la confiance sont la meilleure disposition.”

La complaisance dans les tourments de l’âme paraît suspecte à

Bossuet - mieux vaut rechercher ce qui l’apaise. L’amour tel que

Bossuet l’entend n’est pas le “pur amour” de Mme Guyon et de

Fénelon, tout abandon passif. Il s’agit pour lui, comme pour Leibniz,

qui le lui écrivait en 1698, de “trouver son plaisir –je dis plaisir et non

pas utilité ou intérêt – dans le bien, perfection ou bonheur d’autrui.”

Ce débat renvoie à un traité publié par Antoine Arnauld en 1643

préconisant une communion la plus fréquente possible, à condition

de l’éloigner de la confession d’une faute. Bossuet respectait les

jansénistes ; toutefois, en juin 1665, il avait assisté l’archevêque de

Paris dans ses démarches qui devaient obtenir la soumission des

sœurs de Port-Royal de Paris.

Lorsque Mme du Mans demande la permission de “

voir et lire, des

livres, ecrits, cayers volants que lon me prete, q

[uan]

d ils ne sont point

mauvais, mais seulement curieux, comme tout ce qui se fait contre M

de C

[ambrai]

presentement

...”, Bossuet rétorque “

Ces choses seule

curieuses desseichent l’esprit. Les livres de M. de C

[ambrai]

font cet

effet : et ceux contre ne sont necessaires qu’autant qu’on y traite de

grandes et utiles veritez.”

Bossuet est tout aussi catégorique lorsqu’il est question de naturel

et de sensible :

“Quand les consolations intérieures sont sensibles, et que lon craint qu’il

ne sy mesle du naturel est on obligé a y renoncer et a faire quelq

[ue]

acte

pour cela, pour se rassurer

”(Mme du Mans). “

Il faut tascher de prendre

le pur et le spirituel et de laisser la le naturel qui s’y voudrait mesler. Une

pure intention fait ce discernement

” (Bossuet).

La pièce date de l’année même de la condamnation des

Maximes des

saints

de Fénelon par Innocent XII, mettant ainsi fin à la querelle du

Quiétisme. Bossuet y joua un rôle clé.

(

Correspondance

IX, 1915, n° 1619.-

Bulletin des Amis de Bossuet

,

n° 24).

1 500 / 2 000

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