FRAYSSE & Associés. Collection de Monsieur Edouard Cochet - page 78

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George SAND
.
M
anuscrit
autographe signé,
Césarine Dietrich
, 1870 ; 1002 pages in-8, en 88 cahiers.
M
anuscrit
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Commencé au début de juillet 1870, le roman est terminé le 11 août 1870, en plein déclenchement de la guerre de 1870 ; Sand écrit à Flaubert le 15
août : « J’ai fini un roman au milieu de cette tempête, me hâtant pour n’être pas brisée avant la fin. Je suis lasse comme si je m’étais battue avec nos pauvres
soldats ».
Césarine Dietrich
paraît en 4 livraisons dans la
Revue des deux mondes
du 15 août au 1
er
octobre 1870 (George Sand a corrigé les épreuves du 4
août au 19 septembre) ; retardée par la guerre et la Commune, l’édition en librairie chez Michel Lévy n’aura lieu qu’en septembre 1871.
Comme le remarque Wladimir Karénine,
Césarine Dietrich
occupe une place à part parmi les derniers romans de George Sand : « l’héroïne demeure la
même jusqu’à la fin, ce qui est contraire à la poétique de George Sand, elle ne devient ni tendre, ni désintéressée, ni moins égoïste. Césarine ne ressemble
donc en rien aux autres dames et demoiselles de George Sand transformées par la puissance du vrai amour. Césarine n’aime qu’elle-même. C’est une toute
jeune personne, presque une enfant dont la narratrice de cette histoire, une pauvre vieille demoiselle noble, doit faire l’éducation. Césarine est la fille
gâtée et capricieuse d’un riche commerçant ; elle n’a plus de mère, et veut non seulement arranger sa propre vie à sa guise, mais encore faire la loi à cette
gouvernante, à son père, à tous ses parents et adorateurs. L’aplomb et la suffisance ne lui manquent pas plus que l’adresse et l’habileté à se tirer d’affaire.
Elle a toujours le dernier mot, ne se laisse jamais surprendre ni attraper. Sa marche victorieuse à travers la vie rencontre toutefois un obstacle inattendu dans
la personne du neveu de sa gouvernante. Ce jeune homme, que Césarine veut compter au nombre de ses adorateurs, décline cet honneur et lui témoigne
de l’indifférence. Césarine offensée entreprend une attaque en règle contre le jeune stoïcien, mais le jeune homme la repousse, bien qu’il soit, au fond de
l’âme, subjugué par son charme ; il ne veut ni se laisser écarter du droit chemin, ni manquer à ses principes. Césarine trahit involontairement devant sa
gouvernante sa vraie nature, elle révèle sa fausseté, sa sécheresse, l’absence de toute morale. Puis elle pousse à la démence, à la fureur le plus humble de
ses adorateurs, le marquis, qui provoque en duel le fils de sa gouvernante. À la fin, ayant manqué son but et désirant donner le change à ses proches par
dépit, par amour-propre, par désir vaniteux de faire admirer la grandeur de sa conduite, elle épouse ce marquis, demi-fou, espérant étonner tout le monde.
Cependant immédiatement après son mariage, dame Césarine s’efforce de faire la conquête de son ennemi le plus acharné, l’ami du marquis. Et l’auteur
laisse entendre que ce nouveau flirt va trop loin. Il est évident que Césarine, mariée, continuera ses manœuvres, ses “campagnes”, ses triomphes et ses
“captures”, que, par la logique même des choses, les amusements de cette coquette à froid ne seront plus les innocents romans de Césarine jeune fille ».
Elle ajoute : « L’attention publique prise par la guerre fit que peu de personnes l’ont lu lors de cette première publication, c’est le roman le moins connu de
George Sand. Chose curieuse : Césarine, son père sympathique et bonasse et toute leur parenté sont justement des Alsaciens allemands naturalisés à Paris,
se considérant eux-mêmes comme des Allemands » (W. Karénine,
George Sand, sa vie et ses œuvres
, t. IV, p. 581-582).
Nicole Mozet a mis en évidence que
Césarine Dietrich
est une réécriture par George Sand du roman de sa fille Solange,
Jacques Bruneau
(1870),
notamment dans sa « thématique sado-masochiste », avec « la condamnation de la femme coquette et tyrannique, mais accompagnée d’une analyse très
poussée de la violence érotique. On a l’impression que Solange a entrouvert pour sa mère une porte qui jusque-là lui avait résisté : bien que complètement
ignoré,
Césarine Dietrich
est un des très grands romans sandiens ». Solange a directement inspiré « ce personnage de femme mauvaise dès l’enfance, et
impossible à amender car incapable d’aimer » (Nicole Mozet, « Deux romans de la violence érotique :
Jacques Bruneau
, de Mme Clésinger-Sand, et sa
réécriture sandienne –
Césarine Dietrich
», in
George Sand écrivain de romans
, Christian Pirot, 1997, p. 117-129).
Le manuscrit est rédigé à l’encre brune sur 88 cahiers constitués de 5 ou 6 feuillets doubles cousus d’un fil blanc, écrits au seul recto. Il est divisé en quatre
parties : 1
ère
partie (cahiers 1 à 23, pages 1-231), 2
e
partie (cahiers 24 à 45, pages 232-487), 3
e
partie (cahiers 46 à 66, pages 488-736), 4
e
partie (cahiers 67
à 88, pages 737-1002). Le manuscrit a servi pour la composition du texte pour la
Revue des deux mondes
, et porte les noms des typographes. Il présente
d’importantes variantes, avec des nombreuses ratures et corrections, et des addistions interlinéaires. Quantité de passages, parfois de plusieurs lignes, sont
biffés et recouverts d’un trait large qui laisse lisible la leçon primitive, avec une nouvelle version rédigée dans les interlignes. Parfois un feuillet rapporté et
collé témoigne d’un remaniement plus important. Le manuscrit est signé et daté en fin « Nohant 15 juillet 70 » (probablement pour faire croire au lecteur
qu’il a été achevé avant la déclaration de guerre).
25 000 / 30 000
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