Lot n° 45

Louise-Marie de Fontaine, Madame Dupin (1706-1799) dame de Chenonceau ; femme de lettres, et protectrice de Jean-Jacques Rousseau. Manuscrit en partie autographe, cahier de 24 pages in-4 (9 de sa main, 15 d’un secrétaire), fortes rousseurs....

Estimation : 700 / 800
Adjudication : 1 100 €
Description
Manuscrit inédit sur la vieillesse et les moyens de la prolonger. C’est une traduction libre d’importants extraits de l’ouvrage de Jean-Henri Cohausen (1665-1750), médecin du prince-évêque de Munster, Hermippus redivivus, sive Exercitatio physico-medica curiosa de methodo rara ad ^ ^ 1742). Cette traduction, d’après le latin, est probablement antérieure à l’édition anglaise de 1748 ; elle présente des ratures et corrections. Elle se rattache à l’important travail de Madame Dupin (auquel Jean-Jacques Rousseau a participé) Sur l’égalité des hommes et des femmes. Mme Dupin traduit elle-même la longue page de titre : « Hermipe rapellé a la vie ou dissertation phisique et medicinale curieuse touchant le secret singulier de prolonger la vie jusqua 125 ans par la respiration des jeunes filles tirée d’un vieux monument romain et maintenant constaté par les principes de la medecine rendu plus clair par les preuves et les exemples et confirmé par des raisons de chimie filosofique »., puis les 4 vers « sur Hermippe vieillard fort agé » mis en tête du livre : « Hermipe est enfant par l’esprit, il est rajeuny par le corps cest louvrage du soufle d’une jeune fille il ne convient point aux jeunes gens de joüer avec de belles filles, que la jeunesse se retire cette chose ne convient qu’a la vieillesse ». Suit, toujours par Mme Dupin, la « Preface aux vieillards venerables par leur prudence et par leurs cheveux blancs et a ceux qui approchent de la vieillesse ». On y raconte l’histoire d’Hermippe : « Claudius Hermippus dont l’inscription a été trouvée dans les antiquités de Rome [.] a vécu 115 ans et cinq jours par un secret innouy ; ce secret est la respiration des jeunes filles ». Certains jugent cette inscription apocryphe et « ne comprennent pas comment la vie humaine peut estre susceptible de prolongation par un tel moyen, qui ne se trouve nulle part au nombre des remèdes et ne se trouve point au nombre des six choses qui constituent la diette ». Le secrétaire donne alors la traduction de l’inscription et rappelle la recherche de l’immortalité par les magiciennes, alors qu’il est si facile, dit-on, de prolonger la vie par la respiration d’autrui. Mme Dupin reprend la plume pour mentionner la liqueur qui figure dans le Traité des 12 clefs de Basile Valentin : « Cest son propre soufle concentré par des moyens chimiques, qui s’apele esprit visible tiré d’une matière impalpable. [.] Lauteur fait icy une plaisanterie sur le soufle inferieur qui devroit aussy avoir sa vertu ». Puis elle traduit le dernier chapitre (chap. 7) « ou lon examine si lon peut légitimement employer la respiration dautruy pour consserver sa vie », déclinant alors, non sans humour, les difficultés à être toujours en compagnie de jeunes filles : « Comment obtiendroit on les honneurs de la guerre si lon preferoit lhaleine des filles a la fumée de la poudre a canon. Comment pouroit on abboyer les causes du barreau si lon etoit toujours avec des filles Comment rem pliroit on sa bourse avec elles, elles qui n’ont point dargent. Comment pouroit on estre medecin et porter la santé de malade en malade si lon preferoit la douce haleine des filles a lhaleine püante des moribons ». Quant aux moines, St Jérôme exclut « les filles du toict des cloistres » ; tous ces gens là « ne doivent donc pas se servir de ce vilain secret, le lecteur intelligent ne doit pas imaginer quoy que jaye decrit les qualités requises dans le soufle des filles pour prolonger la vie des vieillards que japrouve le remède. [.] Je laisse aux vieillards radoteurs de se se^ir de ce remede sils ont la foiblesse de sy confier ». Et l’auteur de conclure qu’il n’est pas attaché à la vie, « et même je la méprise dans lesperance dune vie meilleure et je vous conseille de penser de même ». Le cahier s’achève par la traduction, de la main du secrétaire, de la partie finale de l’ouvrage : « Badinage satyrique sur les haleines des filles et sur les P. des enfans très propres les unes et les autres à procurer de longues années », pour conclure que l’histoire d’Hermippe est « une pure chimère à laquelle on a donné une tournure ingénieuse ».
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