Lot n° 82

Le Pautre (P.) - Matis (H.). Recueil des vues et plans, carte générale et particulière du château et seigneurie d’Oyron, des baronnies de Montcontour et de Cursé, avec les cartes et arpentages de chaque métairie. Levé par Matis arpenteur du Roi

Estimation : 70.000-90.000
Adjudication : 100 000 €
Description
en l’année 1713 : et orné par le Sr Le Pautre architecte et graveur Ord. du Roy. 1713. In-folio, maroquin rouge, élégante roulette à entrelacs autour des plats, alternant pot de fleurs et pièces d’armes (château, trois têtes de Maure), armes au centre surmontées du titre frappé en lettres dorées, dos à nerfs orné de même, tranches dorées (reliure de l’époque). Historique : Situé au nord des Deux-Sèvres, Oiron recèle un immense château au milieu d’un parc de 2500 hectares aux vastes perspectives, dont l’histoire se confond avec la destinée de la famille Gouffier. Guillaume Gouffier, valet de chambre de Charles VII, se vit offrir par le roi, en 1450, une seigneurie, sur laquelle il fit élever une vaste demeure fortifiée, organisée autour d’une cour carrée fermée, avec corps de logis principal face à l’entrée, et flanquée d’une tour ronde à chaque angle. Avec ses enfants, Oiron va briller de tout son éclat. Artus, gouverneur du futur François Ier et grand maître de France, entreprend d’agrandir ce logis, à la fois château de plaisance et forteresse de plaine, d’une galerie adossée à la courtine nord-est, et d’édifier une collégiale, dont la conception est héritée du style gothique tardif. Située à faible distance du château, elle était destinée à abriter les mausolées familiaux. Après sa mort, en 1519, son fils Claude, grand écuyer en 1546, prend la succession et fait ériger sa baronnie en duché. Il parachève les constructions du château afin que ses exceptionnelles collections y soient abritées. La galerie d’étage, située dans l’aile nord-est, renferme alors l’un des plus grands cycles de peintures de la Renaissance après Fontainebleau ; le seul dû à un artiste français avant 1550. Ses collections sont pillées à deux reprises par les Huguenots. Il faut attendre Louis, petit-fils de Claude, pour qu’Oiron retrouve son lustre. Disgracié puis condamné comme faux-monnayeur en 1630, pour s’être dressé contre l’autorité du cardinal de Richelieu, il s’exile à Oiron où il entreprend de rebâtir le château en surélevant la moitié du corps central et le pavillon sud, dit pavillon du roi. Il confie à des artistes parisiens la décoration, dont le cabinet des Muses, la chambre et la salle du roi offrent le meilleur exemple. Le Brun réalise notamment des portraits pour les appartements du roi. Après la mort prématurée du fils de Louis, la seigneurie échoit à son petit-fils Artus III, ami de Blaise Pascal, qui la cède à son tour à sa sœur, épouse de François d’Aubusson. Ce dernier entreprend alors de faire d’Oiron un grand palais classique en lui conférant une symétrie qu’il n’avait jamais eue. Il rhabille les constructions de la Renaissance pour terminer le corps central et obtenir en pendant du pavillon du roi, un pavillon d’angle, dit pavillon des trophées. Symétriquement à la galerie Renaissance, là où Louis Gouffier avait prévu une aile, il crée un portique ouvert portant une terrasse de plain-pied avec les appartements de l’étage. Tel est le château, lorsque la marquise de Montespan, disgraciée et éloignée de la cour, le rachète en 1700 pour son fils légitime, le duc d’Antin. Elle poursuit l’achèvement intérieur du pavillon des trophées pour s’y installer, et parachève la composition de la cour d’honneur en élevant la tour des gardes en pendant de celle du connétable, située à l’extrémité de la galerie de François d’Aubusson. À la mort de la marquise, en 1707, le duc d’Antin hérite du château dont il se désintéresse, le jugeant trop éloigné de la Cour. Oiron entame alors une lente décadence et connaît plusieurs propriétaires : le marquis de Villeroy, puis la famille Fournier de Boisairault... La révolution précipite son déclin. Des campagnes de restauration furent entreprises en 1820, puis de 1869 à 1873, par l’architecte Daviau, mais restèrent insuffisantes pour assurer la pérennité du château. Ce dernier, classé monument historique en 1923, fut acquis par l’État afin d’assurer sa sauvegarde. Il est devenu aujourd’hui un lieu dédié à l’art contemporain. Iconographie : À notre connaissance, cet album est le document iconographique le plus important que l’on puisse consulter sur Oiron. Un état manuscrit des arpentages des domaines d’Oiron, Cursé et Montcontour, établi par Matis, est conservé au département des manuscrits de la Bibliothèque nationale (NAF 17384). Il existe aussi un plan, levé en 1699, à la demande de Roger de Gaignieres (1642-1715), lorsqu’il effectua un voyage en Poitou et se porta acquéreur d’une partie des collections de Claude Gouffier, dont le célèbre portrait de Jean Le Bon aujourd’hui au Louvre. L’idée du duc d’Antin, en commandant cet album, était d’illustrer l’arpentage de ses terres dressé par le géographe du roi Matis, souvent nommé dans les comptes des Bâtiments, et mis au net par le dessinateur Dubois. Ici, on compte 15 cartes détaillées des terres, lieux-dits et fermes. Ces plans plutôt techniques, accompagnés d’un commentaire explicatif, sont précédés de 5 vues en perspective et de 4 plans du château. Le cycle iconographique se complète par un frontispice, un plan de la bataille de Montcontour remporté par l’armée de Charles IX et un cul-de-lampe figurant le chiffre entrelacé du duc d’Antin. Ces dessins très soignés ont été aquarellés. Le frontispice, les vues perspectives et le cul-de-lampe furent exécutés par Pierre Le Pautre, selon l’indication portée sur la page de titre. Pour Bertrand Jestaz, le retable qui, au frontispice, porte le titre du recueil aurait été dessiné d’après un modèle d’Hardouin-Mansart. Pierre Le Pautre (1652 (?)-1716), un brillant dessinateur, abondant et inventif. Pierre Le Pautre, fils aîné du célèbre Jean Le Pautre, est connu comme graveur et surtout dessinateur. Il apprit de son père l’art du dessin et de la perspective, et fut l’élève de Magnier. Très tôt, il manifesta des dispositions pour le dessin d’architecture, ce qui lui valut d’être remarqué par Mansart qui le fit entrer dans son cabinet. En compagnie de Pierre Cailleteau (), dit Lassurance, il travailla pour ce dernier de 1699 à 1708, date de la mort du surintendant des Bâtiments du roi. Il reçut le titre de dessinateur du roi. Superbe album nous montrant l’œuvre architectural des Gouffier dans son plein accomplissement. Il est d’autant plus précieux qu’il est l’un des rares documents connus de Pierre Le Pautre, avec le dessin de la pompe funèbre de la reine de Suède, Ulrika Eleonora, conservé à Stockholm, au Nationalmuseum. Un mors légèrement fendu. Coiffe inférieure et coins fatigués. Dimensions : 631 x 484 mm.
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