Lot n° 62

Guy DEBORD (1931-1994). 9 L.A.S. et 5 L.S. « Guy », 1988-1990, à Anita Blanc ; 14 pages oblong petit in-8 (au dos de cartes postales représentant des chats).

Estimation : 4 000 / 4 500
Adjudication : 4000 €
Description
Rare correspondance à son assistante aux éditions Gérard Lebovici (assassiné en 1984), dont Anita Blanc était la cousine ; Debord et Anita Blanc avaient une passion commune pour les chats, d’où le choix des cartes. 14 octobre 1988. Il se fait adresser des textes sur la révolution anglaise retrouvés par Olivier Lutaud : « La moitié de mes connaissances sur la Révolution d’Angleterre me viennent du livre de Lutaud justement (et l’autre moitié peut-être de Guizot, qui a un peu vieilli). Enfin, seul en France sans doute maintenant, je ne lis même pas l’anglais ! »… 3 novembre. Il donne des instructions pour sa vitrine, aux Éditions Gérard Lebovici, suggérant, « en regard de celle où les Raditchev se rencontrent, d’y exposer maintenant un exemplaire seulement de quatre livres de moi : Considérations [sur l’assassinat de Gérard Lebovici], Spectacle [La Société du spectacle], Commentaires [sur la société du spectacle] et Le Jeu de la Guerre (ceci pour rappeler un peu la variété de mes talents). Et je verrai bien avec, en un autre alignement au-dessus ou au-dessous, quatre grands scandaleux qui sont : Sexby, Junius, Cravan et l’Hommage à la Catalogne. Le fait aussi que ce sont quatre Anglais constitue un bon rappel au moment où Mme Thatcher voyage en Pologne pour inspirer Jaruzelski »… 4 décembre. Il est très satisfait de la vitrine. « J’ai pensé que, pour la sortie du Martos, il faudra sûrement faire une vitrine où son livre devrait être entouré de ses diverses preuves (éditées par la Maison), c’est à dire : la revue I.S., Potlatch, La Véritable Scission, De la Misère, et Des tracts en Mai. Si en outre cela paraissait souhaitable pour l’esthétique de la présentation, je pourrais vous prêter (mais non certes offrir à Martos) quelques affiches ou documents originaux »... Janvier 1989, commentant la carte : « Ce n’est pas notre chatte Hija qui figure sur cette carte postale. […] ce n’est pas ma statue ». 10 mars. « Un crétin m’écrit au nom de l’Université du Montana à Missoula (?), pour me faire savoir que Baudrillard va y sévir et que je ferais bien d’y paraître en si bonne compagnie. Il dit d’abord que “le dragon-cerbère à voix de femme qui m’a répondu au téléphone à l’adresse de la maison d’édition G.L. n’a rien voulu savoir et m’a reçu de façon fort peu civile [...]. Cette même personne chez Lebovici m’a affirmé sur un ton scandalisé qu’il était hors de question de penser ou même d’oser penser que peut-être vous seriez intéressé par une invitation à Missoula”. Je pense que la personne évoquée ne peut être que vous. Je vous remercie une fois de plus ; et je vous félicite pour avoir réussi à si bien faire saisir au crétin cette vérité qu’il trouve tellement stupéfiante »... 6 juin. « Il faut naturellement refuser toute autorisation à ces urbanistes belges ! Et dans tous les cas, aux revues, anthologies, ou n’importe quel genre de recueil. Cela devra d’ailleurs s’entendre pour tous mes livres »... 29 septembre. Il s’insurge contre Jean-Edern Hallier qui, « dans son journal idiot […] s’est permis de mettre ma signature, et quelques pages de moi extraites de Panégyrique, sans aucune mention ou explication ; peut-être pour s’attirer une réponse. J’ai, bien sûr, l’intention de ne réagir d’aucune manière à propos d’une si méprisable bête. Si donc quelqu’un venait vous demander quelque chose, vous pouvez vous borner au style permanent : M. Debord n’écrit dans aucun journal... ni à aucun journal.., est indifférent à ce que peuvent faire des médiatiques... ne connaît pas Monsieur X (quel que soit le nom que l’on veuille vous citer)... ne veut pas le connaître »... 15 octobre, à propos de la traduction anglaise de ses œuvres. «II faut répondre à Malcolm Imric : que nous ne pouvons certainement rien contre un si vieux pirate que Red and Black ; que certes la traduction de ce dernier est très pauvre ; que donc si verso fait une meilleure, elle chassera l’autre ipso facto. À propos des Commentaires, dites-lui qu’il peut transmettre à l’auteur un questionnaire sur les difficultés que le traducteur y reconnaîtra. Pour Panégyrique, faites attendre systématiquement. Je vous communiquerai bientôt une note concernant les grandes difficultés de la traduction. […] Les heures où l’on va se coucher traduisent l’agrément des conversations »… 23 octobre, sur ses droits d’auteurs : il voudrait recevoir 250.000 F, « en partie comme une avance sur Panégyrique ». Il s’interroge sur le statut de la « Société des jeux stratégiques et historiques » (qu’il avait fondée avec G. Lebovici). Il a lu « avec plaisir l’ouvrage de Pascal Dumontier [Les Situationnistes et mai 68, que Debord va publier en 1990]. Il est très important. Je vais lui répondre »… 27 décembre, à propos de l’éditeur espagnol Jorge Herralde, dirceteur des éditions Anagrama : « Il est certain que ce bon Jorge se dérobe parce qu’il a l’intention, dangereuse, de se moquer de nous. Deux questions se posent : risque-t-il de publier quand même par surprise ? Peut-on trouver un autre éditeur en Espagne ; ou bien ce sabotage ouvert de toute apparence de traduction correcte, en dépit des engagements, deviendra-t-elle une forme efficace et nouvelle de censure ?». Et il commente la carte : « perfide chat catalan, affectant d’être plusieurs éditeurs »… Etc.
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