Lot n° 74

HILLEL-ELANGER (Irène). Voyages en Kaleidoscope. Paris, Les Éditions G. Crès et Cie, 1919.

Estimation : 1200 / 1500
Adjudication : 1200 €
Description
In-12 de 181 pp., broché, couverture graphique et illustration (thermomètre p. 107) dessinée par VAN DONGEN.
Exemplaire de la bibliothèque d'André BRETON (n° 499 de la vente Breton - Livres) agrémenté d'un ENVOI de l'Auteur.
Édition originale de cet étonnant ouvrage dans lequel l'auteur distille ses connaissances hermétiques. " Sous le couvert d'une fiction surréaliste, l'auteur dévoile les plus hauts secrets de l'Hermétisme transcendant. Mais ne les déchiffre pas qui veut… " indique une notice tapuscrite jointe à l'ouvrage. Entre surréalisme et occultisme, un curieux récit (écrit en 1919) dont le héros est l'inventeur d'un appareil bien spécial, un kaléidoscope dans lequel chacun découvre - selon ses tendances - " le SENS CACHE de toutes choses " (p. 14). Le cœur du héros est partagé entre deux femmes, l'une représentant la Réalité et l'autre la Vérité.
André Savoret n'hésitant pas dans son article à qualifier Irène Hillel-Erlanger (1878-1920) d'alchimiste, y souligne le curieux destin du livre le plus célèbre de cet auteur, seul ouvrage publié sous son vrai nom et après la première guerre mondiale. Sitôt parus en 1919 chez Georges Crès, les Voyages en Kaléidoscope disparurent de la circulation, ainsi que toute l'édition commerciale de l'ouvrage. Seuls quelques exemplaires dédicacés peuvent de loin en loin passer des bibliothèques particulières chez quelque bouquiniste. Irène Hillel-Erlanger mourut peu de temps après la sortie de son ouvrage le 21 mars 1920 dans des conditions pour le moins suspectes. Une légende rapporte qu'un être mystérieux se serait chargé de détruire par le feu tous les exemplaires du Voyage en kaléidoscope lors de sa publication en 1919, vraisemblablement parce qu'Irène Hillel-Erlanger y dévoilait des secrets alchimiques de premier ordre et livre quelques éléments de la personnalité d'un mystérieux Thermo-maître…
Les voyages en kaleidoscope, parus en 1919 dans l'heureuse ambiance des débuts parisiens de Dada, de l'avant-garde cinématographique et des premiers jazz-bands, dont ils empruntent parfois le rythme syncopé, n'auraient peut-être laissé d'autre trace qu'une élogieuse chronique d'Aragon dans " Littérature " (inspiratrice du Con d'Irène…), si Fulcanelli puis son disciple Eugène Canseliet n'avaient régulièrement attiré l'attention des Amoureux de Science sur ce roman novateur, bref et insolite, et ses implications alchimiques. Ce livre est devenu un classique de la littérature ésotérique. Fulcanelli cite cet ouvrage page 122 du tome II des Demeures philosophales. Eugène Canseliet avait ce livre en grande estime. Il y consacre 5 pages de ses Deux Logis Alchimiques (page 266 à 270). La brusque disparition de l'ouvrage parut accréditer l'histoire, du reste colportée sans preuves, du décès mystérieux de son auteur.
Nous n'oserions rien avancer dans le sens de cette hypothèse. Plus largement, il représente la tentative d'appliquer le cubisme au roman. Court et nerveux, le Voyage est aussi un enfant du cinéma. Son auteur, poète proche des surréalistes sous le nom de Claude Lorrey, intime de Valéry Larbaud et de Saint John Perse, était la scénariste de la cinéaste Germaine Dulac. D'où la puissance formidable de ses visions et l'invention du projecteur-kaléidoscope qui restitue en métaphores animées " le sens caché de toutes choses " et le miracle observé de la " fusion de l'individu et de la collectivité (...) L'Harmonie naissant d'un échange de vues ! "
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