Lot n° 640

RACINE, Jean & MOREAU, Jean-Baptiste. Esther. Tragédie tirée de l'Écriture Sainte. [Relié à la suite :] Chœurs de la tragédie d'Esther, avec la musique composée par J.B. Moreau, Maistre de Musique du Roy. Paris, Denys Thierry [et :] Denys...

Estimation : 12 000 / 15 000 €
Adjudication : Invendu
Description
Thierry, Claude Barbin et Christophle [sic] Ballard, 1689.
2 ouvrages en un volume in-4 (246 x 186 mm) de un frontispice et (12)-83-(1) pp. pour le texte de la pièce ; (8)-99-(1) pp. (frontispice compris) pour la musique : maroquin grenat, dos à nerfs, compartiments ornés de fleurons et fers d'angle, plats décorés à la Du Seuil, dentelle intérieure et sur les coupes, tranches dorées sur marbrure (pastiche de reliure ancienne).

→Édition originale d’Esther.

Partagée entre Denys Thierry et Claude Barbin, elle est ornée d'un frontispice gravé sur cuivre par Sébastien Le Clerc d'après Charles Le Brun.

Esther, composée à la demande de Madame de Maintenon, fut représentée par les demoiselles de Saint-Louis de Saint-Cyr le 26 janvier 1689. La pièce, accompagnée de la musique et des chœurs composés par Jean-Baptiste Moreau (v. 1656-1733), maître de musique du roi et de l'institution de Saint-Cyr, valut à Racine le titre de gentilhomme ordinaire du roi.

Pour la première fois, l'auteur de Phèdre intégrait la musique et les chœurs à l'action d'une pièce de théâtre, montrant ainsi sa volonté d'unifier les deux disciplines – tragédie en vers et musique de scène – en se rapprochant de l'opéra, genre qui s'était imposé en France en 1671 avec la Pomone de Cambert et venait de triompher en 1686 avec l'Armide de Lully.

►La deuxième partie du volume contient la très rare édition originale de la musique d'Esther composée par Jean-Baptiste Moreau.

Imprimée au moyen de caractères mobiles – et non gravée sur cuivre comme ce sera le cas pour Athalie en 1691 – cette partition musicale est précédée d'une épître du compositeur à Louis XIV et du privilège déjà présent à la fin du volume contenant Esther, auquel on a ajouté la permission, accordée par les Dames de la communauté de Saint-Louis de Saint-Cyr, de faire imprimer la musique de la pièce. Le texte seul des chœurs avait paru peu de temps auparavant, probablement à la fin de l'année 1688 (cf. Guibert,
p. 102). La partition présente la musique instrumentale, les sections chorales et les airs.

Le titre de départ et le titre courant portent : "Intermèdes en musique de la tragédie d'Esther". Le fleuron du titre et le frontispice sont les mêmes que ceux insérés dans l'édition originale d'Esther.
La page 1 présente un joli bandeau gravé par Jean Papillon le fils (1661-1723) et, en pied, le paraphe du compositeur à la plume (c'est aussi le cas de l'exemplaire de la BnF qui a servi de copie pour la numérisation sur Gallica). Deux corrections manuscrites page 59 et 61.

La musique d'Esther – près d'une heure de représentation sur un total de deux heures trente – demeure indispensable si l'on veut saisir dans son ensemble cette tentative de spectacle global "dont les insertions musicales n'obéissent à aucun principe formel établi" (Anne Piéjus).
Cette édition originale, copiée après la création de la pièce et reflétant fidèlement les conditions de la première représentation, constitue – avec le manuscrit complet copié par André Philidor et conservé à la BnF – la source principale sur la "tragédie musicale" d'Esther. Les manuscrits provenant de la maison de Saint-Louis de Saint-Cyr, lacunaires – ils ne comportent pas de parties purement instrumentales – relèvent plutôt d'une adaptation de la partition d'origine.

►Précieux exemplaire, apparemment le seul connu réunissant les éditions originales d'Esther
et de sa musique.

Remarquable pastiche de reliure ancienne à la Du Seuil ; faibles piqûres et auréoles, coiffe supérieure restaurée.

Tchemerzine-Scheler, V, p. 347 et 349. –
Guibert, Bibliographie des œuvres de Jean Racine, 1968, p. 95, n° 1 et p. 103, n° 2.
– RISM M 3622 : recense 16 exemplaires de la musique. – Vérène de Diesbach-Soultrait, Six siècles de littérature française : XVIIe siècle (Bibliothèque Jean Bonna), II, pp. 110-111, n° 253 (pour un exemplaire d'Esther relié en maroquin d'époque à la Du Seuil),
et n° 254 (pour la musique, reliée en veau marbré aux armes de la marquise de Pompadour). – Anne Piéjus (éd.) Esther. Tragédie de Jean Racine, intermèdes de Jean-Baptiste Moreau, IRPMF, 2003 (édition critique de la tragédie et des intermèdes musicaux).
Partager