Description
(sans le feuillet blanc A1 tenant lieu de p. 1-2) : veau fauve moucheté, dos à nerfs, compartiments ornés de fleurons, palettes en tête et en pied, pièce de titre de maroquin brun, plats ornés à la Du Seuil, tranches mouchetées rouges (reliure anglaise du début du XVIIIe siècle).
Édition originale.
►Le chef-d'œuvre de la poésie maniériste et baroque italienne.
►L'ouvrage, tour de force de la typographie française du XVIIe siècle, est orné d'une vignette de titre gravée sur cuivre montrant les armes royales et d'un grand nombre de lettrines historiées, bandeaux et culs-de-lampe finement gravés sur bois.
Giovan Battista Marino (1569-1625) conçut l'idée de L'Adone à Naples, sa ville natale, à la fin du XVIe siècle. Il y travailla toute sa vie, transformant un poème d'une centaine d'octaves en une prodigieuse "machine" poétique, l'un des textes les plus extravagants et les plus longs des lettres européennes (20 chants, 5 183 huitans, 40 984 vers).
En 1615, Marino s'établit en France, où Marie de Médicis l'avait invité dès 1609. C'est dans l'environnement de l'hôtel de Rambouillet – où il fréquenta Malherbe, Vaugelas, Guez de Balzac, Voiture et Chapelain – qu'il mit la dernière main à son ouvrage, imprimé sous ses yeux par Abraham Paccard et achevé, après la mort de ce dernier, par Olivier de Varennes. Le livre imposa un style contourné et précieux, le marinisme, qui irriguera les principaux courants littéraires baroques.
Marie-France Tristan a remarquablement mis en lumière l'intérêt scientifique et philosophique de L'Adone, Marino manifestant "une sensibilité exacerbée aux perpétuelles transformations et transmutations des substances matérielles, associée à un goût marqué pour les récentes découvertes scientifiques", tant astronomiques que médicales.
L’épître à Marie de Médicis est suivie d'une longue préface composée en français par Jean Chapelain (1595-1674). Le jeune critique (il s'agit de sa première publication) y oppose l'épopée de la guerre, sujet traditionnel du genre épique, à la nouvelle épopée de la paix telle qu'elle se déploie dans le poème érotico-mythologique de Marino. Chapelain jette aussi les bases d'une théorie singulièrement moderne de la narration, "allant jusqu'à nier la notion d'événement, à lui ôter la qualité d'unité de mesure du narratif" (G. Pozzi).
►L'exemplaire a appartenu au poète Nicolas Vauquelin des Yveteaux (1567-1649).
On trouve au bas du titre l'ex-libris à la plume de cet extravagant poète libertin (fils aîné de Jean Vauquelin de la Fresnaye) dont Tallemant des Réaux nous a laissé un étonnant portrait dans l'une de ses Historiettes ("De la librerie de Vauquelin des Yveteaux"). Les annotations à l'encre dans les marges – des traductions françaises de mots italiens – sont très vraisemblablement de la main de ce littérateur singulier, qui fut le précepteur du jeune Louis XIII avant d'être renvoyé de la cour, en 1611, pour ses mœurs licencieuses.
→Bien complet du double feuillet S3 (pp. 145-145) qui complète le texte des huitains LIV à LXXIII, et manque souvent.
Exemplaire agréablement relié au XVIIIe siècle ;
quelques restaurations à la reliure ;
infimes manques de papier aux quatre derniers feuillets avec atteinte à deux lettres de l'errata.
Autre provenance :
•Bibliothèque Macclesfield, avec l'ex-libris gravé et armorié sur le premier contreplat ("North Library, 1860").
Brunet, III, 1433-34. – Gamba, 2002. – Govi, I Classici che hanno fatto l'Italia, n° 175. – G. Pozzi, préface et notes à : G.B. Marino, L'Adone, Milan, 1988, 2 volumes. – M.-Fr. Tristan, "La poésie scientifique du Cavalier Marin", in : La Naissance de la science dans l'Italie antique et moderne (collectif), Actes du Colloque de Mulhouse (1er et 2 décembre 2000), Berne, 2004, pp. 229-250. – M.-Fr. Tristan, La Scène de l'écriture. Essai sur la poésie philosophique du Cavalier Marin (1569-1625), Paris, 2002.