Lot n° 32

Pierre BOULEZ.

Estimation : 1800 / 2000
Adjudication : Invendu
Description
Deux manuscrits autographes, Alea, [1957] ; 7 et 14 pages in-4. Deux versions d’un article sur la musique aléatoire, publié dans La Nouvelle Revue Française du 1er novembre 1957, puis recueilli dans Relevés d’apprenti (Seuil, 1966). Les deux manuscrits ont été rédigés d’une minuscule écriture à l’encre bleu noir. Le premier, accompagné de notes préparatoires, présente de nombreuses ratures et corrections. Le second est une mise au net, avec quelques ratures et corrections. « On peut noter, actuellement, chez plusieurs compositeurs de notre génération, une préoccupation constante, pour ne pas dire une hantise, du hasard. C’est, à ma connaissance du moins, la première fois qu’une pareille notion intervient dans la musique occidentale, et le fait vaut certainement la peine qu’on s’y arrête longuement, car c’est une bifurcation trop importante dans l’idée de composition pour le sous-estimer ou le refuser sans condition. […] Ainsi face au hasard par inadvertance, trouvons-nous un hasard par automatisme, que cet automatisme se veuille pur ou que s’y introduise une notion de bifurcation surveillée. Cependant la hantise de ce qui Peut arriver prenant la place de ce qui Doit arriver, n’est pas due à la seule faiblesse des moyens de composition mis en jeu, à la seule volonté d’introduire la subjectivité de l’interprète ou de l’auditeur à l’intérieur de l’œuvre et de créer ainsi à ces derniers un constant et obligatoire choix instantané. On pourrait encore donner d’autres raisons apparentes tout aussi justifiables. Et d’abord, en ce qui concerne la structure de l’œuvre, le refus d’une structure préétablie, la volonté légitime de bâtir une sorte de labyrinthe à plusieurs circuits ; d’autre part, le désir de créer une complexité mouvante, renouvelée, spécifiquement caractéristique de la musique jouée, interprétée, par opposition à la complexité fixe et non renouvelable de la machine. Certes, dans un univers musical d’où toute notion de symétrie tend à disparaître, où une idée de densité variable prend une place de plus en plus primordiale à tous les échelons de la construction – depuis le matériau jusqu’à la structure – il est logique de rechercher une forme qui ne se fixe pas, une forme évoluante qui se refusera, rebelle, à sa propre répétition ; en bref, une virtualité. Nous en arrivons à l’idée-force de cette recherche qui peut, à mon sens, se concentrer sur la nécessité de détruire toute structure immanente »…
Partager