Description
(1919-2016). 35 L.A.S. et 3 L.S., 1958-1998, au journaliste et nouvelliste portugais Luis Forjas Trigueiros (1915-2000) ; 45 pages formats divers, nombreux en-têtes Librairie Plon, Reid’s Hotel, ou Old Rectory, 3 au dos de cartes postales illustrées, qqs enveloppes et adresses (une fendue au pli). Belle correspondance littéraire et politique. Les lettres sont écrites de Tynagh (Irlande), Gandria (Suisse), Paris,Cabriz-Sintra (Portugal), Spetsai (Grèce), Kilcolgan (Irlande), etc. « Ébloui » par le français écrit de Luis (22 août 1958), il regrette d’avoir dû décliner de faire des conférences à Lisbonne, mais lance une invitation à Cabriz-Sintra… « La Carotte et le bâton poursuit une carrière honorable. J’aurais dû avoir le Grand Prix du Roman, mais votre ami Mauriac est intervenu et la belle récompense m’est passée sous le nez. Il n’est pas bon d’être “fasciste” en France. Je le sais depuis longtemps. Néanmoins, Mauriac se donnant tant de mal à l’Académie Française pour retourner contre moi les 22 votes favorables que j’avais (sur 30 participants), et ne me laissant plus qu’une voix (celle du brave Henriot), tout cela m’a beaucoup flatté. J’aurais quand même préféré le million et la vente » (28 août 1960)… Il évoque des articles pour Les Nouvelles littéraires : sur des vacances idéales, le Portugal, la politique gaulliste… Flatté par ce que Luis écrit sur son Prix Interallié, il estime faire l’objet d’une « conspiration de l’amitié. Tous les complots ne réussissent pas. […] je veux y voir l’ouverture d’une meilleure période pour les écrivains qui ne sont pas marxistes, une brèche dans le système agressif et défensif monté par le terrorisme littéraire de gauche ! » (15 janvier 1971)… Félicitations pour le doctorat honoris causa attribué à son ami, appréciation de son Monologue à Éphèse et de son Char de foin… Plusieurs commentaires sombres sur le coup d’État au Portugal, et ses suites : « Caetano en porte la responsabilité pour une grande part. C’était un remarquable homme d’État et très piètre homme politique. On le guettait, on l’a eu, et avec lui tout le Portugal s’effondre. Je vois avec stupeur l’Occident secourir ce nouveau régime, le soutenir avec des promesses inconsidérées. Si encore c’était pour l’empêcher de sombrer dans les bras de Moscou (où il est déjà), je comprendrais, mais je crois bien que c’est par aveuglement et bêtise » (6 juin 1975)… « Hélas, je ne vois pas beaucoup d’opportunités, sauf en France. Mais la France s’éloigne autant que je m’éloigne d’elle. Je n’y suis plus rattaché que par mon éditeur » [23 novembre 1976]… Il y a une lueur d’espoir, « bien qu’il faille des années pour réparer les dégâts commis par ces fous et ces imbéciles, et que certaines choses ont disparu à jamais. Il faut nous habituer à vivre ce spectacle mondial du déluge et voir monter avec philosophie les eaux qui engloutiront tout » (27 décembre 1979)… Il vient de passer quinze jours à Paris : « Nous avons décerné le Grand Prix du roman à un très beau livre de Jean Raspail. – J’ai d’ailleurs eu une belle année pendant laquelle j’ai pu faire distinguer les écrivains que j’aime : à Antoine Blondin, le prix Kléber Haedens, à Jacques Laurent le Grand Prix de littérature, à Ernst Jünger le prix Europa. Il est amusant de penser que c’est sous un gouvernement de gauche que les écrivains de droite sont honorés. Juste réaction contre l’atmosphère empoisonnée par la clique de Mitterrand » (29 novembre 1981)… « Oui, Jean d’Ormesson est un homme agréable. Ses articles sont intéressants et la défaite du giscardisme l’a sûrement fouetté. Avant, il était plus réservé. Melchior-Bonnet est un homme charmant et bienveillant. Toujours mystérieusement dans la coulisse » (6 janvier 1982)… Appréciation du président Soares, reçu à Paris, malgré sa « diatribe anticolonialiste qui, dans l’état où se trouvent actuellement l’Angola et le Mozambique, me semble étrangement absurde » (14 mars 1993)… Son livre sans prétentions [Parlons-en…] a reçu une bonne presse à droite. « J’aurais eu la presse de gauche si j’avais écrit que Salazar était un dictateur aussi sanguinaire que Staline, et Franco un autre Ceaucescu. Malgré l’effondrement de la Russie, la déroute navrante et totale du socialisme en France, nous vivons sur des idées toutes faites d’un poids insupportable pour la liberté d’esprit » (10 septembre 1993)… Nouvelles de sa famille, des traductions de ses œuvres, des projets de voyage, etc. On joint 2 L.A.S. de Chantal Déon, des L.S. de Jacques Duhamel, Jacques Tiné et Maurice Noël, à Trigueiros ; quelques doubles de réponses à Déon ; des photographies et coupures de presse, et les insignes de chevalier de la Légion d’honneur et d’officier des Arts et Lettres de Trigueiros.