Lot n° 71

CHOPIN (Frédéric) — LETTRE AUTOGRAPHE À GEORGE SAND, signée Ch, datée Jeudi 3 h [5 décembre 1844]. 3 pages in-8 (208 x 134 mm), adressée au château de Nohant, cachet de cire noire au chiffre C, sous chemise demi-maroquin rouge moderne.

Estimation : 20 000 - 30 000 €
Adjudication : 250 €
Description
LONGUE ÉVOCATION DE SA VIE PARISIENNE.

Le 28 novembre 1844, après un cinquième long séjour à Nohant, Chopin rentre seul à Paris. George Sand ne quittera Nohant pour le rejoindre que le 12 décembre. Elle s'impatiente, il la rassure avec tendresse et lui donne, non sans esprit, mille détails sur son existence parisienne et leurs amis communs.

Je viens de recevoir votre excellentissime lettre — et je vous vois toute tracassée par vos retards — Mais par pitié pour vos amis prenez patience — car vraiment nous serions tous peinés de vous savoir en chemise par ce temps-là et pas en parfaite santé [...] Tout le monde prétend que l'hiver s'annonce beaucoup trop brusquement. Tout le monde (c'est Mr Durand, et
Franchomme) [...] avec lequel j'ai dîné hier soir au coin du feu dans ma grosse redingotte et à côté de son gros garçon. Il était rose, frais, chaud et jambes nus. J'étais jaune, fané, froid et trois flanelles sous le pantalon. Je lui ai promis du chocolat de votre part — Vous et le chocolat c'est synonyme maintenant pour lui — je crois que vos cheveux qu'il racontait être si noirs sont devenus dans son souvenir couleur chocolat... Que je suis fâché que vos plantations sont finies, j'aurais voulu que vous ayez quelques choses à faire en sabots et dehors [...] ici il fait beau. Le ciel est pur et ne s'embrunit que pour laisser tomber un peu de neige. J'ai écrit à Grzym [Albert Grzymala] [...] mais nous ne nous sommes encore vu [...] avant d'aller chez Mlle de Rozières qui m'attend à dîner j'irai voir Mme Marliani [grande amie de G. Sand] [...] Je ne suis pas allé non plus chez Mme Doribeaux [Olympe d'Auribeau] car je suis sans beaux habits — ce qui fait que je n'ai pas fait de visites inutiles. Mes leçons ne sont pas encore en train.
Primo : Je viens seulement de recevoir un piano. Secundo : on ne sait pas encore trop que je suis arrivé. Cela viendra peu à peu que je ne m'en inquiette [sic] pas. Mais je m'inquiette [sic] de vous savoir quelques fois impatientée — et je mets mon nez à vos pieds pour vous prier de vous armer d'un peu d'indulgence pour les voituriers qui ne vous apporteront pas de réponse de Chateauroux [...] Je pense qu'il fait matin et que vous êtes dans votre robe de chambre, entourée de vos chers fanfi que je vous prie de vouloir bien embrasser de ma part ainsi que de me mettre à vos pieds.
Votre momiquement (de momie) vieux.

Correspondance de Chopin, éd. Sydow-Chainaye, t. III, n° 552. — Correspondance générale de G. Sand, éd. Lubin, t. VI, p. 723.

Légère déchirure par le bris du cachet.
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