Lot n° 5

Maurice BARRÈS (1862-1923). — 49 L.A.S. (une incomplète) et 17 L.S., 1911-1923, à Henry Cochin ; — 100 pages in-4 ou in-8, nombreux en-têtes Chambre des Députés, enveloppes.

Estimation : 1 000 - 1 500 €
Adjudication : Invendu
Description
Belle et intéressante correspondance à son ami Henry Cochin (1854-1926), son collègue à la Chambre (député du Nord, 1893-1914), écrivain et spécialiste de la Renaissance italienne, collaborateur dans diverses œuvres pendant la Guerre, et ami très estimé. Nous ne pouvons en donner ici qu’un rapide aperçu.

─ 1911.
• [Charmes 24 décembre]. Il loue la clarté, l’agrément, et « ce dosage exquis de poésie et de science » des Jubilés d’Italie…

─ 1912.
• 6 janvier. Son Pétrarque ravive l’admiration qu’on témoignait jadis, dans l’entourage d’Anatole France (« où j’étais jeune disciple »), pour les premières études italiennes de Cochin, « modèle du travail français, attrayant et savant, discutant les textes comme il faut qu’ils le soient, mais respectant leur âme et les faisant épanouir », à la différence du travail des Allemands, à qui manque cette union de « solidité d’esprit critique et parfaite courtoisie du cœur, de l’esprit et des mœurs »…
• 7 octobre, à propos de l’étude de Cochin sur Lamartine : « Ah ! si l’on avait le temps ! Oui, ce serait joli une suite d’articles pour rechercher et pour justifier ce qui demeure en nous de vivant et de fécond du grand amour qu’à vingt ans nous avions pour les maîtres romantiques »…

─ 1913.
• 8 août. Recommandation de son ami le bénédictin Dom Pastourel ; réflexions sur Montalembert qu’il admirait dans sa jeunesse à travers le livre parfumé de Mme de Craven, qu’il a fait lire au petit-fils de Renan…
• 17 août, au sujet de ses articles sur Lamartine : n’y est donnée « que la couleur de mon sentiment »…
• 27 octobre 1913, remerciant Cochin pour son discours Pour les églises populaires, arrivé alors qu’il met en ordre son récit de « la campagne pour les vieilles églises »…

─ 1914.
• 9 janvier. Il sera ennuyé de revenir à la Chambre, « au milieu de mes modèles, si bénin que je sois. Quand je peignais les gens du Panama, je me sentais moins mal à l’aise. C’est peut-être que j’étais plus jeune, c’est surtout que l’état de guerre était général. Cette Chambre est devenue un club, à ce point que si l’on trouve crétin ou méchant un collègue et si on l’imprime, on se demande si on n’a pas manqué au règlement ! Il n’est que de penser à nos églises qu’ils font mourir exprès, et heureusement on retrouve du plaisir à leur déplaire »…
• [8 février], sur les Espérances chrétiennes d’Augustin Cochin [père d’Henry] : « Ma femme, qui est grande lectrice de livres catholiques, et moi nous allons lire ces pages dont hier souvent j’ai entendu parler par des personnes de goût sérieux et délicat »…
• 17 avril, autorisation de reproduire des extraits de la Grande Pitié ; félicitations sur l’élection de son fils Claude Cochin à la Chambre, « un de nos traits d’union »...
• [21 avril], renvoyant l’épreuve corrigée (jointe) de sa préface au Lamartine de Cochin.
• 12 septembre, demandant des nouvelles de Claude Cochin, « mon bien cher collègue qui repoussé du pays des étangs n’en a pas moins contribué pour sa part à reconquérir Metz […] derrière ses parents tous les Français l’aiment, lui et ses camarades, et lui tendent leurs vœux. Quelle admirable entrée dans la vie pour un jeune représentant du peuple ! »…

─ 1915.
•18 janvier. Sur l’œuvre des invalides de la Guerre : « Guérir moralement et physiquement quelle noble tâche ! »…
• 4 septembre, félicitations à Claude Cochin, pour sa Croix de guerre : « Voilà un objet qui pour toute votre vie va être lié à votre nom, à votre figure dans l’esprit de chacun »… Octobre-novembre, sur la campagne sur les églises dévastées, et en faveur d’un mutilé…

─ 1916.
• [Juillet]. À propos de la mort du fils aîné de Denys Cochin, Augustin, un an après celle de son frère Jacques : « j’ai vu avec cette impression de sympathie terrifiée, que tous ont dû éprouver, le nouveau coup qui vient d’ébrancher votre famille, et je n’en écris pas à votre frère par un sentiment injustifiable et que je dois surmonter : de tels redoublements de ses sacrifices pour la France le mettent à part, peuvent faire que nos témoignages lui semblent inutiles, superflus. Si on lui parle de sa fierté, il a le droit de juger qu’on méconnaît sa douleur, si on lui parle de sa douleur, il doit se redresser. La vérité, c’est que la part qu’il porte est excessive. Il faut que la guerre continue, mais elle ne devrait pas continuer pour la maison de votre frère »…
• 4 octobre. Il met debout une brochure analogue aux Traits éternels, ayant interrompu momentanément ses articles, car « les événements sermonnent mieux, aident mieux les esprits qu’un écrivain qu’on a tant lu ne pourrait faire »…
• [Début novembre]. « Après bien des tergiversations, je vais publier dans l’Écho ma petite série […] sur les Diverses familles spirituelles françaises, et c’est seulement après que je publierai la série les pays du Nord »…
• [11 décembre]. Il lira Charles Droulers, « dès que mes “familles” me laisseront un peu de liberté »…
• 28 décembre, pour le placement des enfants d’un soldat sans ressources et d’une femme « devenue folle dans sa fuite devant l’invasion »…

─ 1917.
• 13 février. « J’ai des difficultés avec la censure sur les articles sur les régions envahies. Le gouvernement désire là-dessus le silence »… 16 mars. Il ne sait dans quel volume « tomberont » les articles sur les églises…
• 30 avril, à propos de la demande de secours d’un malheureux prêtre.

─ 1918.
• 3 juin. « Oui nous passons des jours très durs. Il nous faut sans doute encore une semaine d’angoisse et de patience »…
• 17 octobre. Son fils Philippe « a été blessé à la tête de sa section, le 26 à l’assaut du Mont Muret, mais a pu atteindre l’objectif. Il est lieutenant au premier bataillon de chasseurs qui est un très beau bataillon. […] Cette magnifique fin de guerre, cette certitude de victoire, à laquelle se mêle la piété pour ceux qui nous la valurent, ne me laisse (à cet instant) aucun sentiment personnel, aucun désir d’activité. Je suis heureux sans plus »…

─ 1919.
• 27 mars. Il transmet un don pour les habitants des régions dévastées, et demande son aide pour le curé de Magnières : « Tous ces coins de Lorraine me touchent particulièrement »…

─ 1921.
• Mirabeau 12 avril. Il a accepté de parler de Dante lors des fêtes commémoratives, et expose le plan de son discours : « C’est un artiste, un politique passionné, un philosophe chrétien. J’admire en lui la réussite de cette fusion parfaite de tous ces éléments »…
• Ä 30 avril. « N’a-t-il jamais été question de faire de Dante un saint ? De la même manière que je voudrais que l’église fît pour Pascal »…
• 17 mai. « Du moins à écrire quelques pages insuffisantes j’ai appris ce qu’est ce prodigieux poème géométrique et je me suis ouvert des fenêtres nouvelles »…
• Charmes 5 octobre. L’article de Cochin sur Dante l’a ramené quarante ans en arrière : « Vers ma vingtième année je suis allé à Rome et comme je n’avais pas une culture qui me permît de puiser à pleines mains dans cet immense trésor je recherchais les fresques d’Overbeck et des autres, dont je ne sais même plus le nom, et je lisais Rio et Ozanam (en sorte qu’en bonne foi je devrais me demander si les influences de Renan que l’on peut voir chez moi ne sont pas pour une part des nuances d’Ozanam qui se trouvait aussi très sensible chez Renan) »...
• 15 octobre : « Quant aux Barbares, ne les regardez pas, c’est un pauvre petit livre d’enfant tellement mal à l’aise dans cet affreux Quartier latin. (Affreux ? Je ne savais pas y trouver l’excellent. Il y a là bien de ma faute. Mais à vingt ans tomber, sans une relation, dans ce Paris, c’est noir) »… 1923. 20 mars. Remerciements pour la brochure d’Augustin Cochin : « je dis, d’accord avec ses conclusions, que j’ai trouvé dans Renan un témoin du catholicisme, au moins un témoin de l’Église »…
─ 13 octobre. Il reçoit sa traduction des Triomphes de Pétrarque, au moment de s’embarquer pour la Rhénanie… Etc.

─ On joint
• une carte de visite, et la copie d’un article sur H. Cochin et Lamartine à Bergues (1913) ; plus 15 l.a.s. de sa femme Paule Barrès, une de son fils Philippe, et divers documents.
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