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BIBLIOTHEQUE FELIX MARCILHAC. Binoche et Giquello. MERCREDI 5 DECEMBRE 2012 Hôtel Drouot. Expert : Monsieur Dominique Courvoisier

Estimation : - 1
Description

Catalogues et résultats de la vente du Mercredi 5 décembre 2012. Bibliothèque de Félix Marcilhac

Chacun connaît le nom de Félix Marcilhac, et il serait vain de tenter de produire ici la liste des ventes prestigieuses d’objets ou de mobilier Art Nouveau ou Art Déco auxquellesil a apporté le concours de son expertise.

Historien et spécialiste des arts décoratifs du XXe siècle, il a publié de nombreux ouvrages qui font aujourd’hui autorité sur des artistes ou des décorateurs : René Lalique - il fut l’initiateur du musée éponyme au Japon -, Edouard Sandoz, Chana Orlof, Joseph Csaky, Gustave Miklos, Jean Dunand, Paul Jouve, Jacques Majorelle, André Groult et la maison de décoration Dominique ; il termine aujourd’hui le catalogue raisonné de Maurice Marinot, le célèbre verrier.

À tous ces mérites, Félix Marcilhac ajoute celui (et non le moindre à mes yeux) d’avoir fait partie du premier groupe des aventuriers de l’Art Déco, les vaillants redécouvreurs de ses beautés et les défricheurs de ses arcanes.

Ils n’étaient pas nombreux ceux qui, vers la fin des années 60, s’intéressèrent à tous ces artistes et artisans qui font à nouveau aujourd’hui l’admiration de tous par le renouvellement dont ils ont fait preuve et la perfection luxueuse de leurs créations. Ce ne fut pas facile, et il fut un temps où aucun expert ne possédait la compréhension d’un meuble de Eugène Prinz ou de Pierre Legrain, d’une statue de Gustave Miklos, d’un coffret de Jean Goulden, d’une dinanderie de Jean Dunand, d’un fauteuil d’Eileen Gray ou d’un bijou de Georges Fouquet,la juste place à donner à une verrerie de François-Émile Decorchemont ou de Maurice Marinot. Il fallut éplucher les revues de décoration et les catalogues d’exposition de l’époque, interroger les artistes encore vivants, leurs descendants, mettre à profit leurs archives, fouiller les musées, mettre de l’ordre enfin.

Et j’admire sincèrement ceux qui ont eu l’oeil et l’ouverture d’esprit suffisants, et qui, par passion, n’ont pas craint de s’atteler à l’immense tâche qui fut celle de disperser les ténèbres.

Un livre récent de José Alvarez, le passionnant Histoires de l’Art Déco, paru en 2010, retrace la saga de cette redécouverte progressive. Félix Marcilhac y tient évidemment sa place, aux côtés des jeunes marchands, les Blondel, Lesieutre, Manoukian, Vallois, Walker, qui opérèrent, selon l’expression de José Alvarez, le sauvetage d’un patrimoine français négligé.

Félix Marcilhac a fait plus encore, en fondant une dynastie, son fils Félix-Félix se dédiant à la célèbre galerie ouverte en 1969 rue Bonaparte, sa fille Amélie qui suit ses traces d’expert pour les ventes publiques et son goût d’historien en publiant tout récemment un livre consacré au décorateur-ensemblier Marcel Coard, son autre fille, Joséphine, exerçant dans les ventes publiques la spécialité « vintage » ; seule sa fille aînée, Éléonore, a suivi une autre voie et poursuit une carrière d’avocate. Ainsi fait, le nom de Marcilhac, si haut placé par Félix le père, aujourd’hui le symbole de la passion alliée aux deux compléments indispensables la science et le travail, n’est-il pas près de cesser de briller.

Je vous présente aujourd’hui sa bibliothèque, c’est-à-dire dans son esprit non pas tant celle d’un bibliophile que celle d’un spécialiste ne voulant pas négliger ce domaine particulier dans lequel ses héros, les créateurs de la génération active en 1925, ont également apporté leur contribution.

Ses choix, effectués au coup de coeur et sans plan de collection, rendent ainsi, comme un fait assuré, un hommage au groupe Dunand-Goulden-Jouve-Schmied exerçant son art dans le domaine du Livre (quatuor auquel il conviendrait sans doute d’adjoindre Gustav Miklos, l’homme de l’ombre, dont le rôle auprès de Schmied, toujours occulté, sera peut-être un jour, espérons-le, mis en lumière). François-Louis Schmied, en particulier, a révolutionné l’esthétique du Livre dans toutes ses composantes, la typographie, l’illustration et la reliure, en en faisant un objet représentatif des autres créations du groupe. Félix Marcilhac, contrairement à la plupart des collectionneurs de l’Art Déco, aura eu la clairvoyance de ne pas le négliger ; il nous en offre par ce catalogue une éclatante démonstration.

Dominique Courvoisier

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