Lot n° 121

Paul VERLAINE (1844-1896). 3 L.A.S. « P. Verlaine » ou « P.V. », octobre 1887, à son ami Edmond Lepelletier ; 2, 4 et 4 pages in-12 à l’encre rouge. Belles lettres de l’Hôpital Broussais sur ses projet littéraires. Paris 9 octobre....

Estimation : 4000  -  5000
Adjudication : 5 120 €
Description

Il le remercie de son offre d’hospitalité.

« Je ne sais encore quand je sortirai. Je tâcherai que ce soit le plus tard possible, d’autant plus que je suis en voie d’amélioration et commence à espérer qu’on continuera à me traiter par des mouvements gradués. De la sorte j’éviterai – non sans joie – une opération d’ailleurs peu sûre de réussir. [...] Je vais envoyer mes Romances à Mario Proth. Dis lui un mot en ma faveur. J’ai des raisons pour désirer une phrase aimable dans sa causerie littéraire du Mot d’Ordre. Je fais des proses pour journaux payants, – mais où m’adresser ? Mendès qui avait promis de s’occuper de moi ne s’en occupe guère, après une fantaisie des Mémoires d’un veuf insérée en août à la Vie pop[ulai]re (12 fr.) »...

Paris 21 octobre. ...« Je m’attends à sortir bientôt. En réalité, je me crois incurable, ou tout au moins guérissable si à la longue qu’autant dire pas ! Un vague, mais très pénible amour-propre, me pousse à l’impatience. On a l’air d’être là par charité. Quoiqu’au fond la société qui m’a dépouillé sous la forme du juge de paix du XIIe arrt me doive peut-être un peu l’hospitalité. Et puis je puis d’un moment à l’autre être renvoyé, quelque bienveillants que soient les directeurs ». Il prie son ami de lui envoyer de quoi payer le train pour Bougival... « Quelques amis m’apportent de temps en temps du tabac, et Vanier – mais qu’il est dur à la détente ! – me “fade” par instants, sur de vagues copies miennes. Je vais aussi conclure des traités quelque peu nourrissants... pour l’avenir avec cet éditeur intelligent, mais, je le répète, serré !! [...] Je ne te gênerai pas beaucoup d’ailleurs, ni longtemps. [...] je crois que je dois espérer gagner par la littérature et me compléter le pain (et un peu de beurre) avec autres menues besognes, leçons, écritures, etc. – Chez toi, je lirai en masse, me remettrai au courant; j’en ai besoin, depuis des années que je vis chez les Anglais, les curés, les croquants et les nourrissons de l’A. P. ! [...] Amour, un volume de vers, va paraître chez Vanier. C’est-à-dire va être imprimé. Il y a un des principaux morceaux dédié à Edmond Lepelletier »...
26 octobre. Il a reçu son mandat qu’il va garder jusqu’à sa sortie. Il compte sur des rentrées et une créance à récupérer qui lui permettront « de m’habiller un peu plus, de me choisir un local convenable et d’attendre en travaillant pour les journaux et de chercher des leçons, ou emplois, etc. Un volume de moi va paraître, Amour. C’est catholique, pas clérical, bien que très orthodoxe. Une pièce t’est dédiée, dans le ton simple et descriptif du Nocturne parisien et du Grognard, de mes deux premiers volumes à dédicace. Je pense que ce livre, plus varié de ton que Sagesse, aura quelque succès qui pourra m’ouvrir une voie dans des choses un tantinet lucratives. Suivra Parallèlement, un recueil tout à fait “profane” alors, et même assez roide, amusant, je crois. Ces deux machins, absolument finis, et sous presse, pour ainsi dire. J’ai deux nouvelles courtes et plusieurs morceaux pour une seconde série des Mémoires d’un Veuf (mais, à propos, t’a-t-on envoyé ma Louise Leclercq, recueil de nouvelles paru presque en même temps que les premiers Mémoires ?). Ces proses, toutes prêtes aussi. Tu vois que j’ai quelque travail d’avance. Des amis s’occupent de les placer, mais... ! Que c’est drôle tout de même cette situation littéraire ? Mais je crois que si j’étais plus déniaisé au point de vue librairie et journalisme, je pourrais tout de même me débarbouiller. Je vais donc essayer. Que diable ! Ce serait trop fort de mourir de faim ! Et d’abord je vais me faire d’une économie et – mais quel effort, l’économie ! même avec rien dans sa poche, – très raisonnable »...

Anciennes collections Henri Saffrey, puis Jean Hugues (Succession Jean Hugues. Rimbaud, Verlaine. 20 mars 1998, n° 98).

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