Lot n° 98
Sélection Bibliorare

HITCHCOCK ALFRED (1899-1980). MANUSCRIT DESSINÉ autographe ou STORYBOARD, Stage Fright, [circa 1949]; 130 feuillets 26,2 x 20,8 cm dessinés à la mine de plomb la plupart au recto

Estimation : 30 000 - 40 000 €
Adjudication : 62 400 €
Description

[seul trois feuillets sont dessinés au verso : esquisse d’un profil derrière scène 103 et 104 ; esquisse d’une mise en scène derrière la scène 98A, 98B, 99 ; sous chemise d’origine de toile noire estampée à froid, avec étiquette collée sur le plat sup. avec la mention manuscrite “J. Martin” à l’encre rouge pâle et “Stage Fright / R.Todd / M. Dietrich / M. Wilding” à l’encre bleue ; l’ensemble sous emboîtage de papier glacé ivoire.

Extraordinaire storyboard, ou découpage dessiné, de son film Stage Fright (Le Grand Alibi).
340 dessins à la mine de plomb de sa main, dont un rehaussé au crayon bleu, chaque feuillet comportant trois cases. 46 cadres sont restés vierges et 22 dessins ont été barrés. Numérotation dans la marge à la mine de plomb et au crayon rouge (1-152, 240-293, plus 8 feuillets numérotés en chiffres romains à la fin pour les scènes finales de poursuite dans le théâtre, la décapitation par le rideau et la scène finale).

Stage Fright (Le Grand Alibi), tourné en 1950, se situe dans l’œuvre d’Hitchcock entre Les Amants du Capricorne et L’Inconnu du Nord Express. Le film fut tourné à Londres avec Marlène Dietrich dans le rôle principal. Jonathan Cooper (interprété par Richard Todd) est amoureux d’une actrice. Soupçonné d’avoir assassiné sa femme, il convainc son amie Eve (Jane Wyman) de l’aider à prouver son innocence. On retrouve là un des thèmes fondamentaux d’Alfred Hitchcock, celui de l’innocent injustement persécuté.

Le film déconcerta à l’époque par l’emploi d’un « flashback mensonger », procédé que n’avait jamais encore osé un cinéaste. Hitchcock s’en justifia ainsi : « Dans les films, nous acceptons très bien qu’un homme fasse un récit mensonger. Par ailleurs, nous acceptons très bien aussi, lorsqu’un personnage raconte une histoire passée, que celle-ci soit illustrée en flashback comme si elle se déroulait au présent. Dans ce cas, pourquoi ne pourrions-nous pas également raconter un mensonge à l’intérieur d’un flashback ? »

Ce découpage dessiné du film est une parfaite illustration de la méthode d’Alfred Hitchcock : chaque scène est précisément écrite, et le film est entièrement dessiné plan par plan selon l’angle de vue décidé, de sorte que les storyboards d’Hitchcock sont une préfiguration exacte de ce qui va apparaître à l’écran. Lorsque le tournage commence, le réalisateur n’a plus qu’à suivre le canevas qu’il a minutieusement élaboré, laissant le moins de place possible à l’improvisation.
On prétend que sur un plateau il ne regardait jamais lui-même à travers le viseur de la caméra, tant il savait exactement ce qui allait apparaître à l’écran.

Ayant suivi une formation de dessinateur, le cinéaste, d’un trait stylisé mais vivant, fixe sur le papier chaque image du film. Ainsi pour la scène d’ouverture, alors que Jonathan et Eve fuient la police en voiture, on passe d’un plan général du paysage à un gros plan sur le radiateur de la voiture, puis sur les deux personnages à l’avant. Le plan suivant montre ce qu’ils ont dans leur champ de vision, la voiture fonçant vers la caméra. À la lecture du storyboard, une tension s’installe, on est déjà dans l’action.

Les archives des films réalisés après 1940 par Hitchcock sont conservées dans les Hitchcock Archives, Margaret Herrick Library, Academy of Motion Picture Arts and Sciences, Beverley Hills.

Provenance : Jack Martin (1899-1969) premier assistant de Alfred Hitchcock pour Stage Fright. – Hugh Harlow (né en 1939), assistant au réalisateur sur plusieurs films.

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