Lot n° 825

VOLTAIRE (1694 1778) [AF 1746, 33e f]. —

Estimation : 4 000 - 5 000 EUR
Adjudication : 4 940 €
Description

L.A.S. « Voltaire », aux Délices 25 février 1760, à Jean-Louis LABAT, baron de GRANDCOUR ; 4 pages in-4.

Longue lettre au banquier et homme d’affaires genevois, qui avait négocié pour Voltaire l’acquisition des Délices.

« Il est vray que je digère mal. Il n’est pas moins vray que je n’ay pu digérer votre refus de me donner une quittance generale après que je vous en ay donné une. Vous croiez que j’ay un papier de vous du mois d’avril, un double d’un ancien compte. […] J’ay toujours eu en vous assez de confiance pour n’exiger aucune sureté. Je vous ay rendu tous les papiers que j’ai retrouvez concernant la seule affaire que j’aye jamais eue avec vous [un prêt au duché de Saxe-Gotha en 1758], et vous ne m’avez rendu aucun des miens ». Ce double a d’ailleurs été annulé par une quittance générale… « ma situation est précisément le contraire de la votre. Je vous ay rendu des papiers qui ne vous chargent pas, et vous retenez ceux qui me chargent. Je vous ay donné une quittance generale et vous ne m’en avez point donné. […] Vous avez eu mon argent entre vos mains et je n’ay jamais eu le votre. A mesure que vous m’avez rendu mon argent vous m’avez fait signer des reçus, et il y en a de votre main qui portent que je vous tiendrai compte. J’ay signé ces reçus par la confiance que j’ay toujours eue en vous. Mais malheureusement, il se trouve que ces reçus, portant que je vous tiendrai compte sont des billets exigibles. Il parait par la nature de ces billets que je vous suis redevable quoyque je ne le sois pas. Je me vois exposé, moy ou mes héritiers, à payer en cas de malheur un argent que je ne dois point ».

Il supplie Labat de mettre tout en règle : « Faut-il que vous me mettiez en peril, quand vous n’y etes pas ! Votre famille ne peut jamais redemander un ecrit double à la mienne ; mais elle peut demander le payement des billets mal conçus, que vous m’avez fait signer, portant je tiendrai compte, au lieu de mettre j’ai reçu a compte. Un héritier mal instruit peut se prévaloir de cette méprise, et me demander avec bonne foy ce que mes heritiers ne devraient point. Il faut donc que vous me mettiez à l’abri quand vous y etes. J’ay annullé j’annulle tous billets tout ecrit à votre charge, faites en donc autant a mon égard. C’est une justice qu’on n’a jamais refusée, et que sans doute vous ne refuserez pas »…

Correspondance (Pléiade), t. V, p. 806.

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