Lot n° 804

SOULT Nicolas Jean (1769 1851) marechal, duc de Dalmatie.

Estimation : 10 000 - 15 000 EUR
Adjudication : Invendu
Description
223 L.A.S. « Soult », « Mal d. de D. », « Mal S »…, 1800-1850, à SA FEMME ; 511 pages in-4 ou in-8, nombreuses adresses avec cachets de cire rouge et marques postales de la Grande Armée (notes au crayon bleu). 

Important ensemble de lettres du maréchal Soult à sa femme, principalement pendant les campagnes de Pologne et d’Espagne. [Soult a épousé en 1796 Jeanne-Louise-Élisabeth BERG (1771-1852), qui lui donnera deux enfants : Napoléon-Hector (1802-1857) et JoséphineLouise-Hortense (1804-1862).] Dans ces lettres, dont nous ne pouvons donner ici qu’un rapide aperçu, Soult manifeste une grande affection pour sa femme et ses enfants Napoléon et Hortense, dont l’éducation l’intéresse vivement, et témoigne de beaucoup de confiance en Louise, qu’il charge de nombreuses commissions auprès d’agents d’affaires, avocats et entrepreneurs, ainsi que de démarches parfois délicates au ministère et à la Cour. Toute interruption dans leurs échanges le rend très malheureux : « Il me faut plus de courage pour supporter pareille peine que pour affronter sur un champ de bataille les dangers. Alors je cours seulement des chances » (Liebstadt 5 mai 1807). Les lettres sont écrites au fil des campagnes : Alexandrie (Italie) ; Passau (Bavière) ; en Pologne : Prausnitz, Willenberg, Liebstadt, Rosenau, Morangn, Elbing ; Königsberg (Prusse Orientale), Dantzig ; en Esapgne : Madrid, Mora, Almagro, Santa Cruz de Mudela, Baylen, Cordoue, Carmona, Séville, Puerto Santa Maria, Ronda, Malaga, Grenade, Xérès, Chiclana, Almansa, Piedrahita, Tolède ; Dresde en Saxe... 1800. La première lettre, datée d’Alexandrie (Italie), est écrite après que Soult fut blessé à l’attaque du Monte Creto, au nord-est de Gênes. Il paie enfin son « tribut à ce terrible dieu de la Guerre », qui jusqu’alors le traitait en « enfant gatté ». Soult fut emporté du champ de bataille par ordre de son frère, qui réclama des gardes à l’ennemi, « et le Lt Gal Prince d’HOHENZOLLERN, me fit panser en sa presance dans son logement » (2 prairial VIII/22 mai 1800)… 1806 voit Soult à Passau (Bavière), où il fait un récit de la bataille d’Austerlitz pour son fils. L’Empereur, « voyant que le dernier mouvement lui assuroit la victoire, et que ce qu’il restoit d’ennemis alloit être détruit, me dit, marechal Soult vous vous êtes couvert de gloire. J’avois une grande confiance dans l’armée de Boulogne aujourd’hui elle l’a justifiée et a surpassé toute attente. – Je repondis à Sa majesté […] que ma plus grande ambition avoit toujours été de combattre ses ennemis sous ses yeux pour meriter le suffrage du plus grand capitaine que le monde eut produit »… Transporté de bonheur, il balbutiait… Napoléon relève un point commun entre Austerlitz et Aboukir (16 juin)…
1807 le voit prendre part à la campagne de Pologne (environ 60 lettres). Son frère est son premier aide de camp, et M. ANTHOINE, neveu du Roi de Naples, en est un autre. Il parle de la mort du général d’HAUTPOUL, qu’il attribue autant à la folie incurable de son épouse qu’à ses blessures à Eylau ; HEUDELET se remet de la sienne ; les généraux LEGRAND, GUDIN et SALME vont bien… Un violent incendie a ravagé Liebstadt… Fin mai, il refuse l’offre de Louise de venir auprès de lui, car ils s’attendent à reprendre les hostilités, depuis la prise de Dantzig ; le 6 juin, ils se battent depuis deux jours, et il se porte bien : « Hier au milieu d’un feu très vif on me remit ta lettre du 21 may. Je l’ai lue avec transport »… Il entre à Königsberg le 16 juin, et se repose dans cette ville « opulente » en attendant l’Empereur : « Sa Majesté a elle-même poursuivi ses ennemis qui continuent à s’éloigner, et à le raprocher de leurs frontieres, il faut esperer […] que tous les avantages que l’empereur a obtenus produiront un heureux resultat, et que la paix en sera peut être la consequence » (18 juin)… « L’empereur poursuit toujours les debris de l’armée russe, déjà il leur a fait repasser leurs frontieres apres avoir eprouvé des pertes immenses » (20 juin)… « C’est presque un reve ! que dans dix jours de campagne l’empereur ait pu obtenir d’aussi grands avantages et preparer des resultats aussi inattendus, que de gloire ! Dans ces dix jours il a effacé tout ce qu’il avoit precedament fait, que de reconnoissance et d’amour de si hauts faits nous imposent ! L’admiration pour son genie etoit déjà ineffable, et cepandant il a encore ajouté à ce sentiment, que rien ne sauroit egaler et qui ne peut être contenu. Les trois souverains sont reunis à Tilse [Tilsitt] sur le Niemen, où leurs plenipotentiaires traitent de la paix […], l’armée se mettra en marche pour en assurer l’execution » (28 juin)… L’Empereur donne des domaines en Pologne à ses maréchaux et à plusieurs généraux ; renseignements sur celui de Raciazek que lui-même a reçu… Donation en rentes sur l’État et
en argent de l’Empereur… Une épidémie terrible règne depuis l’Oder jusqu’à la Vistule ; Louise serait effrayée de voir la misère autour de lui… Arrivé à Dantzig le 7 décembre, il devra rejoindre Louise et les enfants le 9 à Stettin… 1810, année riche pour la correspondance (près de 100 lettres), voit Soult, désormais major-général du Roi Joseph, mener la guerre d’Espagne, envahir l’Andalousie et s’emparer de Séville. Il se plaint des agissements de ceux qui jalousent ses succès (depuis Austerlitz !) ; il a rendu en Espagne et au Portugal des services trop remarquables ; cependant il reste confiant en la justice de l’Empereur… À Baylen, où DUPONT avait capitulé aux Espagnols, il se félicite d’avoir manœuvré de manière à faire oublier « ce facheux evenement, et pour cette fois les français pourront prononcer avec honneur le mot de Bailen […], et j’ai le bonheur insigne de voir realiser ce que j’eus l’honneur d’écrire à l’empereur en aprenant la fameuse catastrophe du général Dupont, “que je m’estimerois le plus heureux des hommes si je pouvois par mes actions, sur les lieux mêmes faire oublier à sa majesté, cette honteuse deffaite” » (21 janvier)… Les troupes sont entrées à Grenade, puis à Séville… Les insurgés ont conduit le général FRANCESCHI à Malaga, et Soult œuvre des mois durant pour faire échanger son ami prisonnier… Content que l’Empereur lui impose « l’honorable tache de terminer les affaires d’Espagne » (2 mars), il aspire surtout à rentrer dans la vie privée, et regrette de ne pouvoir assister aux fêtes à Paris, à l’occasion du mariage de leur souverain : puisse l’Empereur voir une « nombreuse postérité faire comme Titus les delices du genre humain » (17 mars)… Il envoie à S.M. à cette occasion les aigles que le général Dupont perdit à Baylen, et des drapeaux pris à l’ennemi dans la campagne de 1810… Il voudrait vendre ses domaines de Poméranie, Pologne, Westphalie et Hanovre, et constituer un majorat
pour son fils… Tristesse après les obsèques du comte de Cabarrus, ministre des Finances de Joseph ; il dit son inquiétude d’être dans une position équivoque, depuis le retour de Joseph à Madrid… À plusieurs reprises, il parle de tableaux de maîtres que le Roi Joseph lui a donnés (dont un Sébastien del Piombo et un Ribera) ou que lui-même a achetés pour meubler des galeries dans leurs hôtels, et qu’il envoie à Paris ; il a des projets pour la présentation de trois des tableaux de MURILLO… Il apprend avec horreur l’incendie meurtrier de l’ambassade d’Autriche à Paris, à l’occasion d’une fête en l’honneur des souverains (une migraine avait empêché Louise d’y assister)… Que l’Empereur l’ait nommé général en chef de l’Armée impériale du Midi en Espagne, le 14 juillet, lui fait oublier bien des chagrins, mais son désintéressement lui fait du tort : « j’idolatre mon souverain pour lui je me ferois ouvrir les veines, et malgré tout cella je parois en quelque sorte méprisé, il semble qu’on me soupçonne, on diroit presque que je suis proscrit, depuis deux ans que l’épreuve dure ; […] il me seroit plus doux de renoncer à tout, et des aujourd’hui j’en ferois volontiers le sacrifice si l’empereur vouloit me laisser mourir en repos dans les lieux qui mont vu naître. Mon ambition est satisfaite, et depuis longtemps je suis rassasié des biens et des honneurs de ce monde, j’emporterai dans ma retraite le souvenir des bienfaits que j’ai reçus de Sa majesté » (30 octobre)… 1812 (17 lettres) engage Soult à de nouveaux exploits en Espagne, et à une vive déception : lors de sa nouvelle campagne en Estrémadure, « j’ai eu la douleur de voir les ennemis s’emparer de Badajoz sans pouvoir l’empêcher, je croyais qu’avant mon retour en Andalousie je livrerois bataille mais cella n’a pas eu lieu […]. La perte de Badajoz sera très sensible à l’empereur, jen suis vivement faché » ; ses ennemis vont se déchaîner (21 avril)… Il donnera chasse à WELLINGTON, vers Ciudad Rodrigo : « les papiers d’Angleterre t’auront instruite que j’étois encore au monde » (29 novembre)… Il attend comme une grâce, un congé de quelques mois, mais est fort troublé par la nouvelle de la conspiration de MALET… Nouvel envoi d’œuvres de maîtres espagnols, dont une qu’il destine au Museum impérial… 1813 (6 lettres) le retrouve toujours à Tolède, s’inquiétant des rapports défavorables qu’on a pu faire à S.M. sur l’Armée du Midi. « À l’heure ou je t’écris s’accomplit ma 28me année de service, ça n’est pas un compliment à faire à un femme aimable que de lui dire qu’elle a un vieux soldat de mari, que même elle ne peut voir, il est peu de militaires qui dans leur carrière se soient trouvés dans des situations aussi difficiles que celles ou j’ai été » (2 février)… Enfin en juin, il attend toute la famille à Dresde, et il prie Louise d’arriver le soir, car « dans les premiers moments nous aurons beaucoup de choses à nous dire » (23 juin)… Moins de quinze jours plus tard, à Paris, lendemain de sa nomination au commandement en chef des armées en Espagne et sur les Pyrénées, s’en allant à Bayonne, il exprime sa reconnaissance et son admiration, alors que « le mal à réparer est prodigieux […], mais notre réunion sera prompte aussitôt que j’aurai battu les ennemis » (7 juillet)… Après la chute de l’Empire, Soult écrit lorsque l’un ou l’autre séjourne dans son Tarn natal, à La Bastide Saint-Amans au château de SoultBerg, ou à Albi lorsque Soult assiste aux sessions du Conseil général (16 lettres en 1824, 1 en 1827, 3 en 1834, 5 en 1847, 2 en 1848, 1 en 1849, 2 en 1850), et de Londres en juin et juillet 1838 (17) lorsqu’il assiste en tant qu’ambassadeur extraordinaire au couronnement de la Reine VICTORIA… On rencontre aussi les noms des généraux ou maréchaux MASSENA, DAVOUT, DEMBARRÈRE, BERTHIER, GAUTHIER, COMPANS, MORTIER, DUMAS, de CLERMONT-TONNERRE (alors colonel et aide de camp du Roi Joseph), EXELMANS, VICTOR duc de Bellune, CURIAL, etc., ainsi que ceux de DARU, MARET, le prince de SCHWARTZENBERG, CHAMPAGNY duc de Cadore, le duc d’ARENBERG, LACUÉE comte de Cessac, etc. On joint une note de sa fille Joséphine, marquise de Mornay, concernant les tableaux rapportés d’Espagne par Soult.
 
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