Lot n° 122

SAND George (1804-1876).L.A., [La Châtre 17 mai 1836], à son fils Maurice DUDEVANT ; 4 pages in-4 (plis fendus, petite déchirure avec manque de 2 mots). Étonnante lettre de conseils de George Sand à son fils Maurice. [Elle répond ici au...

Estimation : 800 - 1000
Adjudication : 1 040 €
Description
courrier que lui a adressé Maurice le 15 mai 1836 et dans lequel il se plaignait des railleries de ses camarades envers sa mère « parce que tu es une femme qui écrit [...] ils te nomment, je ne pourrai pas te dire le mot parce qu'il est trop vilain, P... je te le dis malgré moi »... (Correspondance, t. III, p. 358).] « Mon cher enfant, le collège est une prison, et les pions sont des tyrans. Mais tu vois que l'humanité est si corrompue, si grossière, qu'il faut la mener avec le fouet et les chaînes. Je vois que tes camarades ont déjà perdu l'innocence de leur âge, et que sans un joug sévère, ils se livreraient à des vices honteux. Tous les collèges [...] sont infectés de ce vice affreux, de ces saletés dont tes oreilles sont révoltées. [...] Ceux qui comme toi, n'ont pas perdu leur pureté, sont des exceptions [...] La vie est une guerre mon pauvre enfant, et tu entres en campagne. Les bons y sont en lutte éternelle contre les méchans, et les méchans sont en nombre, mais ils n'ont pas la force morale, et c'est celle-là qui triomphe. Qu'un profond mépris pour les amusemens ignobles, pour les paroles sales, soit donc ta défense. Souviens toi que je t'ai élevé dans des idées de chasteté, et que tout mon bonheur est de te cultiver comme une belle fleur à l'abri des chenilles et des cantharides. Souviens toi de la confiance sans bornes que j'ai toujours eue en toi. Dès le moment, où tu sus marcher et parler, je t'ai traité comme un ami. Je t'ai dit les dangers auxquels ton enfance serait exposée, et tu m'as promis de n'y pas succomber ». Elle lui a confié sa sœur Solange : « tu dois être son soutien, son conseil, son défenseur. Ta sœur est un ange d'innocence, son âme est aussi pure que sa figure est belle et fraîche »... Elle compte que Maurice aura en horreur les amusements grossiers, comparés à « ceux de notre chambre, à nos vacances, à nos promenades dans les bois, à nos bonnes causeries, à nos griffonnages du soir, à ton paisible sommeil lorsque ta sœur ronfle ou rit à côté de toi. [...] Tout est calme, pur, et heureux. Mon plus grand bonheur serait de vous avoir toujours. Mais je ne le puis. Ton père veut que tu sois élevé au collège [...] Tout ce que tu souffres est nécessaire pour que tu sois un homme, pour que tu apprennes à discerner le bien d'avec le mal, la vraie joie d'avec la peine »... Elle le voit comme « un brave soldat »... Etc. Puis elle répond aux railleries et attaques contre elle : « ne t'en occupe pas. Tu sais que mes écrits font beaucoup parler, et qu'on parle de même par curiosité et par oisiveté, de tous les gens qui écrivent beaucoup. [...] Quand on dit ces choses en ta présence, tu as une réponse bien simple à faire. - C'est ma mère, avez-vous envie d'en dire du mal devant moi, et croyez-vous que je puisse l'entendre ? - Alors tourne le dos et va t'en ». Elle lui recommande de se tenir à l'écart des grands, « beaucoup plus corrompus que les petits », et qui « les outragent quelques fois. [...] garde ta fierté comme un trésor ». Et si des pensées mauvaises lui viennent, « élève ton âme vers le ciel, songe aux anges gardiens, à ta sœur, aux belles fleurs de Nohant, à la mousse de nos bois, à tout ce qui est pur et riant, tu trouveras alors le vice si laid que tu cracheras dessus ». Et elle termine : « Adieu, mon petit ange [...] Je te presse dans mes bras avec amour ». PROVENANCE Ancienne collection Sacha GUITRY (vente 21 novembre 1974, n° 86). Correspondance, t. XXV, p. 270 (S 139).
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