Lot n° 226

MESSIAEN Olivier (1908-1992). — MANUSCRIT autographe signé « Olivier Messiaen » avec EXEMPLES MUSICAUX autographes, Technique de mon langage musical (1944) ; 1 f. de titre et 99 pages in-4 (paginées 1-97 avec des bis) ; et 1 f. de titre et 47...

Estimation : 20 000 - 25 000 €
Adjudication : Invendu
Description
pages in-fol. de papier musique (paginées 1-44 plus 9 bis et ter et 13 bis).
♦ Important texte théorique avec 382 exemples musicaux, « remarquable ouvrage d’auto-analyse dans lequel le compositeur explique son vocabulaire musical, explore ses origines, fournit une liste d’œuvres (dont plusieurs ont disparu) et juge de ses propres compositions » (P. Hill et N. Simeone).

Publié en 2 volumes (un de texte et un d’exemples) en février 1944 par les éditions Alphonse Leduc, l’ouvrage est dédié à Guy BERNARD-DELAPIERRE (1907-1979) ;
égyptologue, compositeur de musiques de films sous le nom de Guy Bernard, mais aussi agent et impresario, il soutint Messiaen pendant les années de l’Occupation, après son retour de captivité ; c’est chez lui, rue Visconti, que Messiaen organisa des cours privés d’analyse et de composition pour quelques élèves. Sur la page de titre, Messiaen a fait figurer son titre de « rofesseur au Conservatoire de Paris ».

Citons le début de l’Introduction, où Messiaen explique son propos : « Il est toujours dangereux de parler de soi. Cependant, plusieurs personnes m’ayant ou vigoureusement critiqué, ou louangé – et toujours à côté et pour des choses que je n’avais pas faites – d’autre part, quelques élèves particulièrement avides de nouveauté m’ayant posé de nombreuses questions relatives à mon langage musical – je me suis décidé à écrire cette petite “théorie”. À part quelques rarissimes exceptions […], tous les exemples cités ici seront tirés de mes œuvres (passées ou futures ?). Dans l’espoir que mes élèves reprendront les quelques idées que je vais développer – soit pour s’en servir mieux que moi, soit pour en tirer autre chose, soit pour les rejeter définitivement si l’avenir les prouve non viables – je rédige mon traité en prenant le lecteur par la main, en cherchant avec lui, en le guidant doucement dans les ténèbres où j’ai espéré, vers une lumière restreinte et préparatoire à ce “mieux” qu’il pourra trouver ensuite. Si le lecteur est nanti de solides études d’harmonie, contrepoint et fugue, composition, orchestration, sans oublier la rythmique et l’acoustique, il me suivra beaucoup plus facilement. S’il est appelé par “l’inspiration d’en haut”, et que je me trouve être – sur un tout petit point seulement – son précurseur, ma tâche sera remplie et au-delà »… Malgré l’importance des mélodies et œuvres vocales dans sa production, il parlera peu de « la prosodie et l’union de la ligne musicale avec les inflexions vivantes du parlé », et insistera surtout sur des formes moins usuelles, « notamment les formes plain-chantesques ». Son langage musical est considéré « du triple point de vue rythmique, mélodique et harmonique ». Il a également écarté ce qui concerne l’instrumentation et le timbre, et ne parlera pas non plus de la musique sacrée, tout en rappelant son inspiration « mystiquement, chrétiennement, catholiquement » religieuse. Il termine en remerciant ses maîtres Jean et Noël Gallon, Marcel Dupré, Paul Dukas, et ceux qui l’ont influencé : « ma mère (la poétesse Cécile Sauvage), ma femme (Claire Delbos) [qui remplace son frère le poète Alain Messiaen], Shakespeare, Claudel, Reverdy, Eluard, Hello, Debussy, « le plain-chant, la rythmique indoue, les montagnes du Dauphiné, et enfin tout ce qui est vitrail et arc-en-ciel », ses interprètes, ajoutant le nom de la pianiste Yvonne Loriod. « Enfin, tous ceux qui m’ont incité à écrire cet ouvrage et particulièrement mon ami André Jolivet ».

L’ouvrage comprend une Introduction, puis les 19 chapitres suivants :
– I Charme des impossibilités et rapport des différentes matières.
– II Râgavardhana, rythme hindou : 1) Musique amesurée ; 2) Râgavardhana.
– III Rythmes avec valeurs ajoutées : 1) Valeur ajoutée ; 2) Emploi de la valeur ajoutée ; 3) Préparations et chutes rythmiques ; 4) Rapport avec les notes ajoutées.
– IV Rythmes augmentés ou diminués et tableau de ces rythmes : 1) Rythmes augmentés ou diminués ; 2) Ajout et retrait du point ; 3) Tableau de quelques formes d’augmentation ou diminution d’un rythme ; 4) Augmentations inexactes.
– V Rythmes non rétrogradables : 1) Rythmes rétrogradés ; 2) Rythmes non rétrogradables ; 3) Rapport des rythmes non rétrogradables et des modes à transpositions limitées.
– VI Polyrythmie et pédales rythmiques : 1) Superposition de rythmes d’inégale longueur ; 2) Superposition d’un rythme à ses différentes formes d’augmentation et diminution ; 3) Superposition d’un rythme à sa rétrogradation ; 4) Canons rythmiques ; 5) Canon par ajout du point ; 6) Canon de rythmes non rétrogradables ; 7) Pédale rythmique.
– VII Notations rythmiques : 1) Première notation ; 2) Deuxième notation ; 3) Troisième notation ; 4) Quatrième notation ; 5) Quelques rythmes mesurés.
– VIII Mélodie et contours mélodiques : 1) Intervalles ; 2) Contours mélodiques ; 3) Chansons populaires ; 4) Plain-chant ; 5) Râgas hindous.
– IX Chant des oiseaux.
– X Développement mélodique : 1) Élimination ; 2) Interversion des notes ; 3) Changement de registre.
– XI Phrase-lied, phrases binaire et ternaire : 1) Phrase-lied ; 2) Commentaire ; 3) Phrase binaire ; 4) Phrase ternaire ; 5) Liste de périodes mélodiques.
– XII Fugue, Sonate, formes plain-chantesques : 1) Fugue ; 2) Sonate ; 3) Développement de 3 thèmes, préparant un final issu du 1er ; 4) Variations du 1er thème, séparées par des développements du 2e ; 5) Formes plainchantesques ; 6) Psalmodie et vocalise ; 7) Kyrie ; 8) Séquence.
– XIII Harmonie, Debussy, notes ajoutées : 1) Notes ajoutées ; 2) Sixte ajoutée et quarte augmentée ajoutée ; 3) Rapport des notes ajoutées et des valeurs ajoutées ; 4) Emploi des notes ajoutées.
– XIV Accords spéciaux, grappes d’accords et liste d’enchaînements d’accords : 1) Accord sur dominante ; 2) Accord de la résonance ; 3) Accord en quartes ; 4) Effets de résonance ; 5) Grappes d’accords ; 6) Regard sur d’autres styles ; 7) Harmonie naturelle ; 8) Liste d’enchaînements d’accords.
– XV Agrandissement des notes étrangères, anacrouses et désinences : 1) Groupepédale ; 2) Groupe de passage ; 3) Groupe-broderie ; 4) Anacrouses et
désinences.
– XVI Modes à transpositions limitées : 1) Théorie des modes à transpositions limitées ; 2) Premier mode à transpositions limitées ; 3) Deuxième mode à transpositions limitées ; 4) Troisième mode à transpositions limitées ; 5) Modes 4, 5, 6 et 7 ; 6) Rapport des modes à transpositions limitées et des rythmes non rétrogradables.
– XVI I Modulations de ces modes et leur rapport avec la tonalité majeure : 1) Rapport avec la tonalité majeure ; 2) Modulation d’un mode à lui-même ; 3) Modulation d’un mode à un autre mode.
– XVI II Rapport de ces modes avec les musiques modales, atonales, polytonales et en quarts de ton.
– XIX Polymodalité : 1) Deux modes superposés ; 2) Trois modes superposés ; 3) Modulation polymodale.

L’ouvrage s’achève sur le Catalogue de mes œuvres.
Les 382 exemples musicaux qui illustrent ce traité sont notés sur papier 20 lignes, allant d’une ou deux mesures à des citations musicales plus développées de presque une page entière, principalement tirés de ses propres œuvres.

— Bibliographie :
- Peter Hill et Nigel Simeone, Olivier Messiaen (Fayard, 2008), p. 179-180.
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