Description
Importante correspondance du librettiste au musicien.
[Jules Barbier fut, en collaboration avec Michel Carré, le librettiste privilégié de Gounod, de Faust à Polyeucte. Certaines lettres de Barbier sont annotées par Gounod. Nous ne pouvons donner ici qu’un trop rapide aperçu de cette passionnante correspondance.]
24 avril 1860. Au sujet de Philémon et Baucis, sa publication en deux ou trois actes, et des droits que doit payer Choudens aux librettistes.
22 février 1865. Il est en train d’écrire le livret de Roméo et Juliette : « je nage en plein Shakespeare et je tâche d’en imprégner les humbles vers que tu réchaufferas des sons de ta musique »… Il raille Gounod sur Legouvé, un « vieux mastodonte » et un « fossile »…
1868.
– 19 juin. Au sujet de la faillite de Carvalho au Théâtre Lyrique, qui les dégage de leur engagement. Mais le traité les lie à la Renaissance pour Roméo et Faust ; au dos, l.a.s. de Gounod (à Perrin, directeur de l’Opéra ?) : « Je n’ai aucun traité avec Carvalho »…
– 6 juillet. Gounod à Barbier au sujet de Faust et Roméo après la faillite de Carvalho, et de ses négociations avec Perrin ; copie par Gounod de leur traité avec Carvalho pour Roméo et Juliette.
[1869]. Barbier au sujet de sa mère, âgée de 84 ans, « avec tout un quartier de lune dans la tête », qui s’invite à dîner chez Gounod.
1871.
– 27 février. Barbier reproche à Gounod de planer dans les hauteurs ; il dit sa rage contre « les misérables qui nous ont fait cette guerre de peaux-rouges, et même encore de filoux », des « bêtes brutes » ; Carré lui, ne s’en soucie guère….
– 25 mars. Il attend la musique de Gounod sur son poème sur l’Alsace. Sa maison d’Aulnay a été saccagée par les Prussiens. Il raille le « souffle patriotique » du Suisse Choudens !... 20 juin. Après le
« règne exécrable de la Commune », il a retrouvé sa maison de la rue Pergolèse, pillée par son domestique….
– 19 juillet. Leuwen et Du Locle veulent engager Mme Carvalho à l’Opéra-Comique pour chanter Juliette, qui quitterait ainsi l’Opéra, totalement désorganisé. Ambroise Thomas voudrait voir Gounod accepter une chaire au Conservatoire.
– 25 juillet. Martinet voudrait jouer Le Médecin malgré lui, mais il faut l’autorisation de Gounod. 14 septembre. Il apprend par Choudens que Gounod a préféré faire lui-même la traduction de Gallia : « tu aurais pu m’en aviser toi-même ».
Puis sur les négociations concernant Roméo et Mme Carvalho : « ce n’est pas Juliette qui devait suivre Roméo, mais Roméo qui devait suivre Juliette »…
Plus les copies de 2 lettres de Gounod du 20 septembre à Barbier et à Mme Carvalho.
1872.
– 7 janvier. Du Locle a abandonné leur projet de Ruth… 19 janvier. Sur ses soucis familiaux, son inquiétude sur l’état d’esprit et de santé de Gounod : « tu es fatalement né pour le théâtre, […] c’est au théâtre que tu reviendras avec des chefs-d’œuvre que le premier rayon de soleil fera germer dans ton cerveau. […] En attendant ta résurrection tu feras bien d’employer ta léthargie à compléter la toilette de Polyeucte »…
– 22 janvier. Envoi du poème du Sermon sur la montagne.
– 9 mars. Vif désaccord après le rejet par Gounod des propositions de Frederick Gye pour Roméo et Juliette à Covent Garden, avec des droits d’auteur de 500 F par représentation : « le succès à Londres ouvrirait à Roméo toutes les grandes villes de l’Europe. […] Il est peut- être fâcheux que la coutume ait fait une part égale de droits au poëme et à la musique d’un opéra, mais cela n’en est pas moins un fait acquis. Permis à certaines personnes de croire que tu pourrais acheter un livret, comme on achète des petits pâtés, pour redevenir le seul et souverain maître ; mais en ce cas-là tu en aurais pour ton argent, et tes collaborateurs ne se ne s’appelleraient pas Jules Barbier »….
– 12 mars. Il s’incline devant l’ultimatum de Gounod, mais il regrette « de voir l’Angleterre t’enlever à tes amis, à tes œuvres, à ton pays »….
– Londres 12 mars. Vigoureuse réponse de GOUNOD, blessé par ces insinuations, demandant « une nette et immédiate explication »…
– 14 mars. Barbier n’a pas voulu intervenir dans la vie privée de Gounod, mais il déplore l’influence « injustifiable qui est venue s’ériger en juge de tes affaires, de tes travaux, de tes collaborations, de ta vie, de tes devoirs, et, pour tout dire, de ta conscience même »…
– 17 mars. Il est en larmes devant la lettre de Gounod : « je savais bien tes tristesses ; je ne me rendais pas un compte exact de ta fatigue morale, ni de l’épuisement physique qu’elle a pu produire »… Il faut arriver avec Gye à un bon accord pour Roméo, et il rappelle les conditions pour Hamlet…
– 12 avril. Protestation de GOUNOD contre les réclamations de Gye, qui prétend avoir été volé sur les droits de Faust ; explications détaillées..
14 avril. Barbier a transmis à Gye son ultimatum ; il s’oppose à toute restitution sur les droits de Faust…
– 16 avril. Longue explication de GOUNOD sur l’affaire Roméo, et sur Gye qui menace Gounod de prison ; il regrette que Barbier lui déclare la guerre….
– 17 avril, GOUNOD raconte la visite qu’il a reçue de Gye fils ; il reconnaît avoir mal géré ses affaires, « mais je veux la Justice et elle se fera » ; il se voit obligé de poursuivre Choudens, « parce qu’il m’a laissé porter pendant plus de huit ans le poids et la honte d’une situation inacceptable à un honnête homme ».
– 18-19 avril, sur le litige avec Gye, et la législation anglaise.
– 27 avril, récapitulatif sur l’affaire Faust, et les droits de l’éditeur Chappell.
– 2 mai : « Non, mon ami, je ne reprends pas, je ne reprendrai jamais Polyeucte !... Crois-tu donc que j’aurais le courage d’entendre sur ce poëme une note qui ne fût pas de toi ?... Polyeucte vivra ou mourra, peu importe, pourvu que nous vivions de la même vie ou que nous mourions de la même mort »….
– 3 mai. « Je garde la conviction que ta défaillance n’est que passagère […] tu es et tu resteras l’unique auteur de Polyeucte ». Il dément l’existence d’une cabale contre Gounod…
– 12 mai. Il pense que Gounod est dans l’erreur au sujet de Faust et « cette prétendue assimilation entre la publication et la représentation » ; compte rendu de sa conversation avec Batz concernant Roméo en Allemagne. 14 mai. Lettre de GOUNOD à Gye (en partie de la main de Georgina Weldon), cédant le droit de jouer Roméo à Covent Garden à raison de 50 livres par représentation pour sa part, en dehors des conventions faites avec ses collaborateurs….
– 17 mai. Sur Choudens qui « passe décidément sa vie à mettre ses pieds dans tous les plats, faute de savoir y mettre les doigts proprement ». Il n’a pas voulu mettre en cause Mme Weldon : « si son amitié cherche à sauvegarder tes intérêts, rien de plus légitime. Je me borne seulement à défendre les miens, surtout au point de vue de la justice et de la dignité. Je tiens surtout à établir, non pas vis-à-vis de toi mais vis-à-vis de tes amis, qu’il serait injuste d’assimiler nos poëmes à ces poëmes italiens fait à la hâte et à la douzaine »…
– 17 juin. « Je vois venir la fin de la saison, et Roméo me paraît définitivement écarté […] ton opéra eut certainement fait partie du bagage de Mlle Patti en Amérique et le résultat n’était pas à dédaigner […] Roméo est plus que jamais à l’horizon de l’Opéra-comique. Les peintres sont à l’œuvre. Tu connais ta Juliette »…
– 28 juin. Il apprend par Heugel que Gye songe à reprendre son procès… 1er juillet. Mort de Carré ; le machiavélisme de Gye…. 9 juillet. Nouvelles de la famille Carré. 28 août. Son installation à Aulnay. 31 août. Visite à Choudens, et renseignements sur la propriété de Mireille… 3 septembre. Mise en garde sur les négociations avec Karl Batz pour l’Allemagne. 7 septembre. Sur Choudens, et la « disproportion considérable entre les bénéfices de Choudens et les nôtres »… 12 septembre. Gounod se maintient dans l’absolu, mais il faut se placer dans le relatif. Certes, Choudens n’est pas honnête. 16 septembre, sur leurs droits d’auteur qui n’existent pas en Russie. 17 septembre. Sur les conventions internationales et la différence entre représentation et publication, et la mauvaise interprétation des tribunaux anglais…. 24 septembre. Le manuscrit de Roméo est sous séquestre par suite de la faillite du Théâtre Lyrique… 26 septembre. Choudens accepte des coupures dans Roméo. Barbier demande « pleins pouvoirs pour exiger en ton nom le rétablissement du texte primitif […] Que Choudens vende ta musique, même trop cher, soit ! mais qu’il la refasse, non ! »… 26 novembre. Copie de sa lettre à Karl Batz. Mme Carvalho est enchantée de son Roméo, Duchesne. 7 décembre. Ses soucis d’argent et de santé ; son impression sur la musique des Deux Reines ; les répétitions de Roméo : « Du Locle pousse jusqu’au scrupule le respect de ta partition et la restituera dans son intégralité. L’exécution promet d’être bonne » ; il revient sur la Patti et l’intérêt qu’elle ait Roméo
« dans son bagage lyrique ». Il se réjouit que Gounod songe à Polyeucte. 29 décembre.
« Je sens bien que je t’aimerai toujours ; je t’aime à travers ta musique et j’aime ta musique à travers toi ! » Il espère que Paris acclamera Roméo en 1873. – Plus 2 notes autographes de GOUNOD : « Copie de mes conditions envers Mr Gye adressées à Barbier pour Roméo en 1872 à Londres », et un mémorandum concernant les conditions demandées à Gye pour la représentation de Roméo à Londres.
1873.
– 21 janvier. Création triomphale de Roméo et Juliette à l’Opéra-Comique ; impressions sur la mise en scène et les chanteurs. 12 mars. Il ignorait qu’on donnerait Roméo à Londres la saison prochaine.1ère nouvelle. À Paris Mme Carvalho triomphe :
« Elle se relève de ses défaillances passagères par des bonds de cent coudées ! quelle artiste ! »… Il regrette de se sentir impuissant à aider Gounod, mais lui répète de ne pas abandonner Polyeucte !...
– 14 mars. Il est « en parfaite communion de pensée » avec Gounod et attend ses instructions.
– 15 mars. On lui demande Jeanne d’Arc à la Gaité « avec des chœurs » ; il demande à Gounod de s’y mettre ; il a été échaudé avec Ulysse et les Deux Reines. Avec Jeanne d’Arc : « gloire et argent ». Il donne le plan détaillé des cinq actes, et est prêt à se rendre à Londres…
– 19 mars. Il viendra à Londres début avril.
– 25 mars. « La Gaité se dresse devant moi comme un immense point d’interrogation », il attend la réponse de Gounod.
– 27 mars. Il se réjouit de l’acceptation de Gounod ; sur la 4e page, l.a.s. de Jacques OFFENBACH :
« vous pouvez compter sur moi pour monter l’ouvrage digne de votre grand nom »… Il annonce son arrivée à Charing Cross.
– 18 avril. Il est heureux d’avoir revu Gounod à Londres.
– 22 avril. Jean va à Londres voir son père. Barbier relate sa conversation avec Anna Gounod, enfermée dans son « parti-pris d’un orgueil froissé, blessé, évidemment soutenu par l’aveuglement de tout un entourage, et se décernant à lui-même un brevet de dignité […] “Il a quitté sa famille ; pourquoi ne revient-il pas ?” – Madame Gounod ne sort pas de là »… Il faut terminer Jeanne d’Arc….
– 27 avril. On parle de représenter Polyeucte à Vienne. Et Jeanne d’Arc ?..
– 7 mai. Il s’inquiète de ne pas recevoir la musique. Mauvais renseignements sur Lebeau.
– 13 mai. Copie de sa lettre à Choudens, proposant ses bons offices dans l’affaire anglaise de Roméo.
– 14 mai. « Offenbach est ravi, enchanté de ton cœur de fugitifs et de ton final des voix. Le voilà alléché et demandant la suite avec enthousiasme. C’est Bizet qui nous a déchiffré ta partition avec le talent que tu sais. On aurait cru que ton âme avait passé dans ses doigts. C’est lui aussi qui veut bien se charger de la réduction au piano »… Réaction de Choudens à sa lettre.
– 20 mai. Il attend la suite de la musique.
– 22 mai. Il s’attriste des mauvaises nouvelles de la santé de Gounod, et reproche à Mme Weldon ses courants d’air ; elle « a élevé les courants d’air à la hauteur d’une institution ». Vizentini se charge de la copie de la partition de Jeanne d’Arc.
– 27 mai. Commentaire sur Jeanne d’Arc : « Ta partition sera un chef-d’œuvre »…
– 31 mai. Anna Gounod a accusé Barbier de dépouiller ses enfants. Lemoine parle de la traduction de Biondina, et Barbier se propose.
– 4 juin. Il fera « avec amour les paroles de Biondina ». Il aimerait une Introduction pour Jeanne d’Arc, peut-être en orchestrant la Marche funèbre d’une marionnette. Mots aimables pour Georgina Weldon : « je compatis à une souffrance supportée si vaillamment au nom de l’amitié »…
– 4 juin, Offenbach rapportera à Gounod son manuscrit.
– 22 juin. Offenbach prend les eaux à Aix, et ira à Londres dès son retour.
– 25 juin. Il enrage de voir Gounod perdre son procès ; c’est une « coalition de coquins ». Le n° 12 de Biondina existe-t-il ? L’article de Gounod sur les chefs d’orchestre est admirable…
– 4 juillet. Il s’inquiète de la perte de la musique. Il a terminé sa traduction de Biondina.
– 5 juillet. Les manuscrits ne sont toujours pas arrivés … Plus un télégramme à ce sujet. 8 juillet. La police cherche les manuscrits. « J’ai entendu hier ta poëtique introduction. C’est bien charmant. C’est bien la Jeanne d’Arc de Domrémy gardant ses troupeaux et perdue dans ses rêves »… Offenbach est retrouvé !
– 15 juillet. Il propose une modification à la fin de Jeanne d’Arc. 9 septembre. Il a lu Jeanne d’Arc aux artistes. Il se réjouit de savoir que Gounod n’ira pas en prison.
– 10 septembre. Ses démêlés avec Choudens, qui a avoué ses gains : « plus de mille francs par jour ! »…
– 12 septembre. Bizet corrige l’épreuve de Jeanne d’Arc ; des détails de mouvement et de métronome manquent pour certains morceaux...
– 21 septembre. Envoi de la réponse de CHOUDENS (lettre jointe, 20 sept.,sur les droits en Russie et sur Mireille à Saint-Pétersbourg avec la Patti).
– 24 septembre. Frappé de stupeur par l’attitude de Gounod : « Comment peux-tu supposer un instant que je sois contre toi ?... Mais je suis pour toi, avec toi, devant toi, derrière toi ! »… Réflexions sur Choudens et ses traités. Demande de renseignements sur Jeanne d’Arc...
– 23 octobre. Impressions après avoir entendu Jeanne d’Arc avec orchestre...
– 7 novembre. Vive réaction à l’accusation injuste de Gounod de modifier sa musique. Il justifie les changements apportés.
– 10 novembre. Grand succès de Jeanne d’Arc. Vive hostilité de la famille Gounod à l’égard de Barbier. Mme Weldon a été charmante…
– 18 novembre. C’est Gounod qui mérite les applaudissements du public. Projet de donner Jeanne d’Arc à Londres…
– 2 décembre. « Notre Jeanne va toujours supérieurement à la Gaité. Les recettes dépassent tous les chiffres connus. Le succès de ta musique va grandissant, en dépit de quelques imbéciles »…
– 6 décembre. Sur la question des droits de Jeanne d’Arc.
– 24 décembre. Précisions après les articles de Gounod : « je n’étais pour rien dans le Faust de Carré au Gymnase, et ce n’est pas dans ce Faust qu’a joué Frédéric Lemaître. Quant au Médecin je crois me souvenir qu’il nous a été payé six mille francs et non quatre mille »….
1874. 22 janvier. Réaction à l’article de Gounod contre Choudens. « Jeanne d’Arc irait toujours merveilleusement n’était la fatigue réelle de Lia Félix et le désir non moins réel d’Offenbach de remettre au jour Orphée aux enfers. Nous faisons encore près de six mille francs de recette »…
– 20 février, à un ami, au sujet de Mireille : « il n’est pas présumable que Gounod, dans la disposition d’esprit où il est, consentît à écrire une note nouvelle pour une pièce dont il ne veut même pas autoriser la représentation »…
– 6 juin 1876. GOUNOD à Barbier sur la divergence de leurs points de vue concernant Polyeucte.
–20 novembre 1881, au sujet de la mélodie Medjé, qui appartient à Choudens et que Lemoine n’a pas le droit de publier.
— On joint :
– une L.A.S. à Jean Gounod (17 déc. 1908), au sujet du procès « dans l’affaire des cinématographes » ;
– 2 l.a.s. de Mme Barbier mère à Gounod ;
– 3 l.a.s. de l’avoué Delacourtie à Barbier, concernant notamment les droits de Faust en Angleterre, et désapprouvant le procès que veut faire Gounod, qui ne lui rapportera que des ennuis ;
– une l.a.s. d’Anna Gounod pour une rendez-vous avec Delacourtie (juin 1884) ;
– une note autogr. de GOUNOD concernant « l’obligation imposée aux auteurs et compositeurs dramatiques par la Convention Internationale franco-anglaise quant au dépôt et enregistrement de leurs œuvres ».