Description
Voyage du Luxor en Égypte, entrepris par ordre du roi pour transporter, de Thèbes à Paris, l'un des obélisques de Sésotris. Paris, Arthus Bertrand, 1835. In-8 (203 x 127 mm). Gravures par Ambroise Tardieu, Bigant et Benard. Veau vert, plats de papier, dos lisse à décor doré, reliure signée F. Valentin en pied du dos (Reliure de l'époque).Édition originale du récit par Verninac Saint-Maur, commandant du bateau le Luxor, du VOYAGE DE L'OBÉLISQUE DE LA PLACE DE LA CONCORDE DEPUIS L'ÉGYPTE.
En 1829 le vice-roi d’Égypte, Méhémet-Ali, qui emploie de nombreux officiers et ingénieurs français à la modernisation de son pays, propose le don des deux obélisques d’Alexandrie à la France. Champollion, dont c'est le premier voyage en Égypte, suggère de faire plutôt transporter à Paris ceux du temple de Louxor, édifiés sous le règne de Ramsès II au XIIIe siècle avant J. C., mieux conservés. Un seul obélisque sera finalement choisi, mais transporter un monolithe de 23 mètres pesant 230 tonnes est un défi : il faut l’abattre sans le briser, descendre le Nil, traverser la Méditerranée et l’Atlantique, remonter la Seine et ériger le monument au centre de Paris.
Un navire qui défie les lois de la construction navale, le LUXOR, est spécialement construit à Toulon en 1830 : «Il fallait construire un bâtiment léger et plat de navigation fluviale, capable cependant d’affronter la haute mer lesté d’un mastodonte». Parti de Toulon en avril 1831, le bateau arrive à Louxor le 14 aôut. Le monolithe, enrobé dans un coffrage de protection, va être abattu en deux mouvements le 31 octobre, au moyen de deux appareils actionnés par 200 hommes. Le 16 novembre débutent les manœuvres de halage destinées à lui faire parcourir les 400 mètres le séparant du Luxor, échoué dans le sable, dont l’avant a été découpé pour permettre le chargement.
Il faut ensuite attendre la crue du Nil et le Luxor appareille le 25 août 1832. Remorqué par le Sphinx - premier navire de haute mer à vapeur de la Marine française – il arrive au Havre via Alexandrie, Rhodes, Corfou, Toulon, Gibraltar, La Corogne, et Cherbourg. Démâté, rasé et allégé, le Luxor part de Rouen le 13 décembre 1833, halé par des chevaux. Enfin, le 23 décembre 1833, soit deux ans et neuf mois après son départ de Toulon, il est amarré au pont de la Concorde à Paris. Il est à nouveau scié sur l’avant afin d’en faire sortir l’obélisque. Sur la place de la Concorde, un viaduc incliné long de 120 m a été édifié pour faire glisser l’obélisque jusqu’à son piédestal. L’érection du monument a lieu le 25 octobre 1836, par 300 artilleurs et marins actionnant quelque 10 cabestans, devant le roi Louis-Philippe au balcon de l'Hôtel de la Marine et une foule de 200 000 personnes.
Cette mission vaudra une certaine notoriété à Verninac : son nom est aujourd’hui gravé sur le socle de l'obélisque. Son parcours, un moment consacré au développement des paquebots à vapeur, le hisse brièvement au fauteuil de ministre de la Marine en 1848. Contre-amiral, il termine sa carrière comme gouverneur des établissements français en Inde.
L'édition est illustrée de 7 planches, dont 4 dépliantes : Tombeaux de Beni-Assan (en couleur) , Entrée et coupe horizontale du Palais de Luxor, Obélisque occidental de Luxor vu sur ses quatre faces, Porte sud du palais de Karnak, Appareil qui a servi à abattre l'obélisque occidental de Luxor, Embarquement de l'obélisque, Le Luxor remorqué par le Sphinx. Même si son nom n'y figure pas, elles sont très probablement inspirées des dessins de Léon de Joannis (1803-1868), commandant en second du Luxor, choisi pour ses talents de dessinateur.
Élégante reliure de François Valentin, relieur à Paris (Culot, Relieurs et reliures décorées en France à l'époque romantique, 1995, p. 565, Ramsden p. 212, Fléty p. 171).
Prov. Succession duc d’Albufera.
Rousseurs dans un cahier et aux deux dernières planches. Charnières fendues au niveau de la pièce de titre, coins émoussés.
Le voyage de l'obélisque, Louxor / Paris ( 1829 - 1836), exposition au Musée de la Marine, 2014.