Lot n° 193

SAND (Aurore Dupin, dite George). Manuscrit autographe. 210ff. in-8, avec ratures et corrections, …

Estimation : 800 - 1 000 EUR
Adjudication : 2 340 €
Description
SAND (Aurore Dupin, dite George). Manuscrit autographe. 210ff. in-8, avec ratures et corrections, la plupart brochés en cahiers de 12ff., conservés dans un portefeuille de carton souple à nouettes de tissu portant sur le premier plat un titre de la main de la fille de George Sand, Aurore Sand: «Césarine (fragment original)». Projet de pièce composé d'après son propre roman Césarine Dietrich écrit en 1870 et publié en 1871, pour lequel George Sand s'est inspirée de sa fille Solange, à l'intelligence brillante mais au caractère dominateur et rugueux. L'intérêt de l'œuvre s'avère plus large par des allusions à des problèmes politiques (césarisme du Second Empire) et des questions de mœurs. «...Paul. De quoi donc souffrez-vous? Césarine. De votre injustice, car l'injustice me révolte. J'ai été nourrie, moi, d'idées généreuses; on m'a enseigné la bonté, la bienveillance, le dévouement. J'ai passé ma vie à donner du bonheur... Paul. Ce n'est pas bien difficile quand on en a de reste. Césarine. Ne confondez pas le bonheur avec la fortune. Je suis assez riche pour être généreuse sans mérite, mais n'y a-t-il que l'argent pour mouvoir la bonté? Je croyais avoir une richesse plus précieuse, celle de l'âme, et j'ai été entourée d'affections que je passe pour mériter. Paul. Il y en a une que vous ne méritez pas. Césarine. Lavôtre? Paul. Non, celle du marquis de Rivonnière. Césarine. Qu'en savez-vous? Paul. Vous l'humiliez devant moi qui suis un étranger pour vous. Césarine. Vous devriez vous dire que mon amitié est un grand bienfait pour lui, puisqu'il l'accepte avec ses bourrasques. Paul. Alors pourquoi l'offrez vous, cette amitié, à un inconnu, comme si vous n'en saviez que faire? Césarine. Est-ce que je sais, moi, pourquoi j'ai besoin de la vôtre? Ne le voyez-vous pas? Paul. Je vois que c'est une idée fixe! Ehbien je vais vous dire pourquoi elle s'impose à votre esprit! Césarine. Oui, dites ! Paul. C'est le dépit de voir, pour la première fois de votre vie peut-être, un homme qui ne vous demande rien. Césarine. Oui, c'est la première fois, j'en conviens, et cela me blesse jusqu'au fond de l'âme. Dites que je suis une enfant gâtée, une ambitieuse de domination, une coquette, même. Cela prouve que vous manquez de coup d'œil, car je ne suis rien de tout cela! Je suis une bonne âme toute grande ouverte à l'affection et à la confiance. On m'a habituée à être adorée. Je le méritais apparemment un peu, car sauf mon père, personne n'y était forcé. j'étais plutôt dans une position , à faire des jaloux, à être dénigrée par l'envie. Eh bien non! On me voit, on m'écoute, on sent que je suis aimable et on m'aime. Il n'y a pas de préventions, il n'y a pas de méfiance que je n'ai vaincue, et on m'a toujours bénie d'avoir voulu vaincre. Vous seul, de près comme de loin, vous me résistez. C'est mal, c'est injuste, , c'est cruel. Il faut qu'il y ait en vous je ne sais quelle perversité, ou que vous pensiez que cette perversité existe en moi. Voyons, vous voilà au pied du mur. Vous me fâchez, vous me faites de la peine: pourquoi? Répondez!...»
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