Lot n° 163

BEAUVOIR Simone de (1908-1986). — 2 L.A.S. « Votre charmant castor », [Espagne 13-14 et 30 juillet 1954], à Jean-Paul SARTRE ; 6 pages in-4 et 2 pages oblong in-8, et 5 pages et demie in-4, enveloppes.

Estimation : 1000 - 1200
Adjudication : 5 200 €
Description
Lettres à Sartre pendant un voyage en Espagne.

[Du 9 juillet au 12 août 1954, Simone de Beauvoir est partie avec Jacques Lanzmann en Espagne, alors que Sartre se repose en Italie avec Michelle Vian, après un accident de santé.]
Mardi [13] et Mercredi 14. Elle raconte au « Cher petit vous autre » (en évoquant les souvenirs de précédents séjours avec Sartre) le voyage, qui a commencé par les gorges du Tarn, puis Perpignan, Cadaquès, Figueras, Gérone : « nous avons visité la cathédrale, superbe, avec une immense nef unique, au bout d'un escalier monumental. Nous avons même un peu écouté la messe, dite par cinq curés et chantée par dix autres. Petits cloîtres, petites églises, belles places, beaux remparts, Gérone est une vraie merveille »...
Puis c'est Barcelone : les Ramblas grouillant de monde, le Barrio Chino, cabarets le soir. « Ce matin L. travaille pendant que je vous écris. [...] C'est dur de trouver le temps de travailler, mais on y arrive »... L'impression joyeuse se dissipe après une visite de « quartiers misérables »... « Le paradoxe c'est que le plaisant de Barcelone vient de ce que les gens sont si sympathiques - mais que ça semble d'autant plus dégoûtant qu'on les laisse vivre dans cette ordure »... Dîner au Tibidabo « chez les riches, dans un jardin illuminé et on s'est bien diverti à les regarder »... Elle recommande au « cher petit vous autre » de bien se reposer. « Je pense tout le temps à vous mais je ne fais plus de cauchemar et j'espère que j'ai raison »... (Au dos de l'enveloppe adressée à Rome, notes et signatures de Sartre).
Vendredi [30]. Elle est à Séville (Sartre à Capri) : « c'est toujours l'enchantement d'être en Espagne ». Avant de quitter Grenade, arrêt à l'endroit « où Boabdil regarda pour la dernière fois Grenade en pleurant ». Ils passent deux jours à travailler dans « une chambre sur une petite plage déserte » près de Malaga, assistant à une course de taureaux à la Linea près de « Gil Braltar ». Puis c'est Tarifa, Cadix, Ronda, avant d'arriver à Séville : « L'Alcazar ne mérite pas qu'on le visite, mais la Cathédrale est belle et surtout la Giralda. Mais l'essentiel ce sont les rues ». Dans l'Alameda, « les bars sont pleins de putains, monstrueuses ou charmantes, très misérables, avec des fleurs dans les cheveux » ; une petite les emmène dans un salon de danse : « Ensuite elle m'a supplié de l'emmener comme bonne à Paris »... Etc.
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