Lot n° 311

Albert GLEIZES (1881-1953) — « Vers une conscience plastique, la forme et l’histoire », Paris 3 avril 1930 — Manuscrit autographe signé daté, enrichi d’une suite de 63 maquettes originales à l’encre de Chine.

Estimation : 5 000 - 6 000 €
Adjudication : Invendu
Description
Albert Gleizes nous livre ici une profonde analyse transversale de la forme, de la mythologie à l’art moderne. La technologie, le cinéma, la photographie, ont vulgarisé la décomposition du mouvement. Cette recherche esthétique est intrinsèque à l’école artistique moderne, celle-ci est mise dans ce manuscrit en perspective avec l’iconographie et les bas-reliefs antiques et classiques.

Manuscrit In-folio de 396 pages écrites au recto de 404 feuillets précédés d’une page de titre, une bibliographie et un avant-propos de six pages. Texte écrit à l’encre noire d’une écriture soignée assez lisible avec ratures, corrections, rajouts et très nombreuses notes. Reliure in-folio d’époque (33,5x22,5 cm) plein maroquin rouge, plats intérieurs avec filets dorés d’encadrements, tranche de tête dorée, dos à nerfs avec titre doré orné d’un décor mosaïqué géométrique (G. Badaire). Boite.
Gleizes précise sur la page de titre les différentes étapes de la création du manuscrit : « La première esquisse a été faite en décembre 28, la mise au net a été commencée le 10 janvier 29 et terminée le 3 avril 1930 … les corrections et notes ont été mises au point en mars 1932 ». Le manuscrit définitif de « Vers une conscience plastique, la forme et l’histoire » sera édité en mai 1932 chez Jacques Povolozky Paris. Cette édition comprend 66 illustrations imprimées dans le texte d’après 63 dessins originaux à l’encre de chine d’Albert Gleizes et 3 photographies.

Les 63 dessins qui ont servi à la reproduction sont montés au recto de cartons d’origine annotés au verso. L’ensemble est conservé sous chemise cartonnée dans une demi-reliure d’époque de maroquin rouge assortie à celle du manuscrit. Boite.
C’est cette maquette composée des dessins originaux de Gleizes qui ont servi à l’édition que nous présentons.

— On joint un manuscrit autographe d’une page in-4 signé Albert Gleizes : « L’Histoire de l’art et la valeur de la Forme » et un brouillon de la table des illustrations de 4 pages in-folio et in-4
Extraits du manuscrit pp.10 et 11 et pp.263 et 264
Je me suis trouvé à un certain moment de mon existence très attiré par des recherches plastiques qui paraissaient déjà vouloir réadapter l’artiste indépendant à l’artisan dépendant. Ces recherches nouant dans un esprit commun quelques hommes furent placées sous le vocable « Cubisme » et par les gens spirituels du temps. On connait la fortune et l’infortune du Cubisme depuis cette époque : je n’insisterai donc pas sur ces points. Mais il ressort de ces fluctuations une méconnaissance absolue de ce qu’il signifiait et de ce qu’il signifie actuellement. Son véritable sens reste encore à être aperçu aussi bien par un public qui se pique de savoir la fin du fin que par des peintres qui n’ayant pas renoncé à des habitudes de formation, n’y discernent qu’une certaine apparence. J’ai pour ma part depuis le moment où mes yeux se sont ouverts, essayé d’avertir ceux capables d’un effort. Mais le Cubisme, dans sa lettre, avait été dépassé par d’autres manifestations en ismes et la crainte de ne pas être à la page avait vite persuadé le public et beaucoup de peintres qu’il n’avait été qu’une manière, un procédé quelconque sans lendemain. Après tout, cela ne vaut-il pas mieux ainsi ? Car pendant que la majorité se précipite sur ce qui fait le plus de bruit, ceux qui ont vraiment la passion de la vérité peuvent à leur aise, sans redouter les gêneurs, approfondir ce Cubisme qui est encore loin d’avoir dit son dernier mot…

Dans ma préface de « Cubisme et Traduction » j’ai affirmé que « ce qui donne une expression différente à la technique c’est que celle-ci peut être soumise à deux états d’esprit procédant d’une position intellectuelle opposée, le milieu n’est pas le même pour ces deux états d’esprit. »
Ce qui précède permet de comprendre aussitôt ces deux états d’esprit dépendant de positions intellectuelles différentes. De l’une le milieu est une résonance sensible, de l’autre une résonance volontaire ; l’intellect la est spectateur, ici il agit ; dans le premier cas il enregistre dans le second il émet. Au point de vue technique, moyens employés : lorsque la volonté-mesure commande la technique est organique : lorsque la substance a le dessus et qu’elle s’enferme dans la forme instantanée et décrit la figure sensible. Voilà les expressions différentes de la technique, en positif ou en négatif. Ces changements de position intellectuelle entrainent de radicales modifications dans la nature des organes et des sens […] Dans Peinture et Perspective descriptive j’ai attiré l’attention sur les modifications mécaniques d’un organe tel que l’œil qui progressivement, selon que l’état d’esprit modifie la position intellectuelle, passe irrésistiblement du mouvement au repos ; je l’ai de nouveau démontré ici même lorsque j’ai étudié la vérité du son et de la lumière et que j’ai montré la vanité des inventions modernes telles que la photographie et le cinéma…
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