Description
Belle correspondance artistique et amicale au peintre orientaliste Guillaumet. 10 avril 1876. Invitation à déjeuner avec « quatre brigands de la manufacture de Sèvres, à la tête desquels Renard [.] j'ai travaillé sans relâche à mon grand tableau, qui est, enfin, sur ses pieds et, je crois, assez d'aplomb ». À la fin de la lettre, il a dessiné une petite lampe à huile... 30 novembre 1877. Il vieillit : sa santé vacille et le force parfois, à 60 ans, à « suspendre le peu de travail auquel je me livre ». Cela n'est pas dröle pour sa compagne Louison, « à laquelle “Ma vieillesse refait une virginité” ». Il envie son ami d'être au soleil, et lui propose de choisir pour lui, pendant son absence, le tableau à exposer au Salon et d'en commander les cadres. Mais il lui déconseille l'Exposition Universelle, « Univermicelle », qu'il a en horreur : « Ce mélange de vapeur, de canons, de caoutchouc, de casseroles, de tout ce qui constitue enfin un attrait pour les foules, si bêtes ! me semble tout à fait indigne de tout artiste qui ne fait pas de tableaux pour les primes des épiciers ». Il encourage donc Guillemet à voyager et repousser son retour, même si son absence lui pèse : « Il n'y a guère qu'avec vous que je causais et que je m'entendais sur l'art et mon isolement est grand », malgré la visite parfois de Francis Wey. Il souhaite une bonne fête à sa petite Cécile [dessin d'un bouquet]... 19 février 1878. Il est démoralisé et souffre beaucoup : « Courbet est mort. Poulet-Malassis est mort. La Fizelière (un brave homme) est mort », etc. « Je me dépêche de vous écrire avant ma mort, et, si vous ne vous hâtez point de revenir, vous ne trouverez plus personne ! » Il l'a recommandé auprès du Conservateur du Musée d'Alger. Il essaie de travailler à des petites choses entre les crises : « je vais tâcher de terminer mes Religieuses en vacances pour l'Exposition non universelle. [...] l'état des affaires est au pire, [...] Delacroix lui-même, aujourd'hui, ne fait pas un sou en vente publique »... 7 juillet-Décembre 1879. Il se réjouit de son retour, et ira le voir, dès que sa santé et l'avancement de son travail, qui n'avance pas faute de soleil, le permettront ; il verra, encadré, « le premier tableau de ma nouvelle manière - manière moderne et mondaine. Il est temps de ne plus vivre avec les morts, et, ma foi, je commence à être de l'avis de Courbet qui trouvait Titien, Véronèse, Rembrandt et tutti des chiqueurs manquant de sincérité ! ». Il ajoute aussi à son « néo-genre un peu de rigolo, car il faut être gai aussi - m'a dit Burty que je n'aurais pas cru si follichon, mais qui l'est devenu depuis qu'il a découvert le coté grivois et soulographe de Delacroix ! »... 26 mai 1879. Il est malade et regrette de ne pouvoir assister à sa petite fête, où il aurait aimé saluer Nadaud, avec qui il avait partagé un déjeuner galant, il y a trente ans, avec une « très bonne fille -Camille Thibaut de Villers - noble damoiselle, fille de laitiers, laitière elle-même, faisant de son creur et de son corps des parties de pain-béni qu'elle offrait en faisant de ses bras une corbeille d'amour où chacun de nous venait puiser - et s'épuiser ! »... - Il prie son ami de l'excuser auprès de sa mère et des Cogniet de ne pouvoir accepter une invitation à cause de l'état déplorable de sa santé, et répond, ému, à sa déclaration d'amitié : « Ma fin seule pourra la rompre, et je mourrai avec sureté de n'être point oublié de vous »...