Les faux chercheurs volaient des cartes géographiques anciennes. Des malfaiteurs se faisaient passer pour des chercheurs et dérobaient, dans des bibliothèques municipales, des cartes vieilles de plusieurs siècles, pouvant valoir plus de 20 000 euros. Ils viennent d’être mis en examen.

Une loupe, un bloc-notes, une petite mallette et une tenue soignée. Rien d’étonnant quand on se présente comme chercheur à l’accueil d’une bibliothèque municipale et que l’on demande à consulter de très anciennes cartes de géographie dans les archives… Les trois hommes qui viennent d’être interpellés à côté de Béziers (Hérault) par les enquêteurs de l’Office central de lutte contre le trafic de biens culturels (OCBC) et ceux de la police judiciaire de Montpellier n’étaient pourtant pas intéressés par la richesse patrimoniale des reliques qu’ils venaient étudier. Leur objectif, c’était de les voler et de les revendre, parfois à prix d’or. « Il y a un vrai marché de collectionneurs pour ce genre de cartes anciennes, souligne un proche du dossier. Une carte similaire à celles qu’ils ont volées a récemment été vendue plus de 25 000 euros aux enchères.

Entre la fin 2018 et le début de l’année 2019, les trois malfaiteurs ont ainsi réussi à subtiliser au moins cinq cartes datant des XVe et XVIe siècles, à Limoges (Haute-Vienne), Auxerre (Yonne) et Le Mans (Sarthe). « D’autres tentatives avaient échoué », souligne le parquet de Béziers.

«Ils agissaient sans doute sur commande»

À chaque fois, le mode opératoire est identique. Un des trois interpellés se présente à l’accueil de la bibliothèque, affirme être un chercheur venu étudier une carte géographique ancienne. Si besoin, il n’hésite pas à présenter de faux documents d’identité, ou une fausse carte d’enseignant-chercheur.

Une fois isolé, le prétendu géographe découpe la carte au cutter et quitte tranquillement la bibliothèque. Dans son sac, des documents valant plusieurs milliers d’euros. « Les malfaiteurs n’y connaissent pas grand-chose en cartes géographiques et agissaient sans doute sur commande, confie un proche du dossier. Il y a très certainement une filière de revente derrière. »

C’est finalement la bibliothèque municipale d’Avignon (Vaucluse) qui va alerter les enquêteurs de l’OCBC à la suite d’une tentative de vol avortée. En 2012, après le démantèlement d’une filière de grande ampleur, l’OCBC avait ainsi averti de nombreux organismes culturels de ce type de vol. La bibliothèque d’Avignon avait retenu la leçon et, voyant arriver ce chercheur un peu louche, elle a prévenu les autorités.

Les cartes restent introuvables

Avisés, les enquêteurs se mettent alors sur la trace d’une vieille connaissance, condamnée dans le cadre de cette première affaire et sortie de prison depuis quelques mois. Rapidement, ils ont la conviction que ce malfaiteur a repris ses activités. « Le mode opératoire était exactement le même, confie un proche de l’affaire. C’était sa signature. »

Originaire de Béziers, cet homme est finalement retrouvé de l’autre côté des Pyrénées, notamment grâce à l’aide de la Guardia Civil espagnole. Eurojust, l’unité de coopération judiciaire de l’Union européenne, est mise dans la boucle. Commence alors une longue enquête afin de tenter de confondre le malfaiteur. Durant les investigations, les policiers découvrent qu’il travaille avec deux complices installés à proximité de Béziers.

La semaine dernière, la tête de ce réseau rend visite à ses complices dans l’Hérault. Les enquêteurs passent à l’action et l’interpellent en compagnie de ses deux comparses. Écroués, les trois hommes, proches de la cinquantaine, « ont été mis en examen pour vol en bande organisée, association de malfaiteurs et usage de faux documents », précise le parquet. Les cartes, elles, restent introuvables pour le moment, mais l’enquête se poursuit pour tenter de mettre la main sur les receleurs.

Réf. : Vincent Gautronneau (@VGautronneau)| 28 mai 2019. Le Parisien

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